Les pêcheurs artisanaux tirent la sonnette d'alarme
Les pêcheurs de la langue de Barbarie craignent pour l'avenir de leur métier. Depuis le début de l'installation de la plateforme gazière à Saint-Louis, il leur est interdit d'exercer à Diatara, la zone la plus poissonneuse de la côte de Ndar. Une mesure que l'Association des jeunes pêcheurs artisanaux fustige avec la dernière énergie.
L'exploitation prochaine du gaz à Saint-Louis inquiète les pêcheurs de la langue de Barbarie. Il leur est interdit de pêcher à 500 m à la ronde des plateformes gazières en cours d'installation.
Hier, face à la presse, l'Association des jeunes pêcheurs artisanaux de Saint-Louis a élevé la voix pour dénoncer avec la dernière énergie cette mesure. Pour le porte-parole du jour des jeunes pêcheurs de la langue de Barbarie, l'avenir de leur métier est compromis. "Si des solutions rapides et durables ne sont pas trouvées, cette interdiction inopportune et non concertée avec les véritables acteurs de la pêche va signer l'arrêt définitif de mort de la pêche artisanale à Saint-Louis. Déjà, nous le constatons et le vivons durement dans toutes les familles de la langue de Barbarie", a râlé Pape Mbaye.
Pour lui, si l'État consent les efforts nécessaires, la pêche artisanale et l'exploitation du gaz peuvent bien cohabiter. "Ce qui est réalisé dans des pays africains producteurs de pétrole et gaz peut bien se faire chez nous. Il suffit de s'investir sérieusement. Au Gabon et en Angola, par exemple, il est créé des récifs à moins de 500 m des plateformes pour faire cohabiter la pêche artisanale et l'exploitation des ressources naturelles. Donc, pourquoi pas réaliser cette alternative pour sauver des milliers d'emplois !", a-t-il déclaré.
L'attitude de la marine nationale dénoncée
Mais en attendant la réalisation de tels ouvrages, les pêcheurs guet-ndariens demandent aux autorités et à l'exploitant de les laisser pêcher à une distance assez raisonnable. "Mieux, nous invitons nos autorités à négocier avec la République sœur de Mauritanie la création d'une zone tampon de pêche entre les deux pays. Parce que s’ils peuvent se partager les ressources naturelles sans aucun problème, trouver une zone tampon de pêche ne doit pas être une difficulté majeure entre le Sénégal et la Mauritanie. Nous sommes des chefs de famille ; nous ne pouvons pas rester toujours à quai sans aller chercher de quoi nourrir nos familles. Il faut que l'État pense à nous pêcheurs dans leurs prises de décision’’, a signalé Oumar Boune Khatab Dièye, Coordonnateur du CLPA de Saint-Louis.
L'Association des jeunes pêcheurs artisanaux de Saint-Louis a également profité de son face à face avec la presse pour fustiger les exactions subies par un des leurs dimanche dernier en haute mer. Ils ont pointé un doigt accusateur sur la marine nationale qui a volontairement heurté une pirogue guet-ndarienne sous prétexte qu'elle exerçait dans une zone interdite. "Même si c'était vrai, le rôle de la marine nationale est de nous protéger au lieu de nous massacrer intentionnellement. C'est pourquoi, en tant que structure responsable, sans aucune forme de violence, nous exigeons que la victime qui a perdu tout son matériel de pêche soit indemnisée à la hauteur du préjudice subi et sans délai", a insisté Oumar Boune Khatab Dièye.
Pour rappel, dimanche dernier, une pirogue, qui avait à son bord un père de famille et ses deux enfants, a été brisée en deux morceaux par la marine sénégalaise à Diatara, aux alentours de la plateforme gazière de Saint-Louis.
D'ailleurs, pour manifester leur mécontentement, des populations de la Langue de Barbarie avaient barré et paralysé la circulation du pont Masseck Ndiaye pendant des heures.
IBRAHIMA BOCAR SENE SAINT-LOUIS