Le fléau s'accentue dans les entreprises agricoles
Après Kédougou et Fatick, c'était au tour de Saint-Louis d'accueillir, hier, la Cellule de coordination de la lutte contre le travail des enfants (CCLTE) dans le cadre de sa tournée nationale dans les quatre régions pilotes. Une rencontre qui a permis à la délégation du ministère de partager le travail et de collecter des données justes sur le travail des enfants, en collaboration avec les partenaires sociaux de la région.
L'une des principales missions de la Cellule de coordination de la lutte contre le travail (CCLTE) est de prendre en charge l'ensemble des questions relatives au travail des enfants et de mettre en place un environnement favorable à son élimination. C'est dans ce cadre qu'une délégation de la CCLTE a rencontré, dans la capitale du Nord, des acteurs de défense des enfants et des partenaires sociaux.
Pour la coordonnatrice de la cellule de lutte contre le travail des enfants au ministère du Travail, Mame Coumba Thiaw Sow, le choix de Saint-Louis parmi les quatre régions pilotes pour l'élaboration d'un nouveau plan-cadre n'est pas fortuit. "Saint-Louis est une cible, parce que nous avons constaté que beaucoup d'enfants sont employés dans le secteur agricole. Dans la région Nord, de jeunes enfants sont souvent utilisés par des entreprises agricoles et le travail effectué sur les lieux dépasse très largement leurs capacités physiques. Mais pour des raisons économiques, ils acceptent. Ils sont également exploités par de grandes personnes dans d'autres activités. Dans ces conditions, ils exercent souvent les pires formes de travail des enfants", a déclaré Mame Coumba Thiaw.
Le social et le culturel, les facteurs bloquants
D'ailleurs, à l'issue des travaux, les acteurs ont diagnostiqué quelques goulots d'étranglement qui sont d'ordre culturel et social. À en croire l'adjointe au gouverneur chargée des affaires administratives, Fatou Moctar Fall, qui a présidé l'atelier, même si l'enfant doit être éduqué et travailler de manière domestique, ceci ne doit être en aucun cas un moyen pour exploiter les enfants par le travail. "Malheureusement, le constat à Saint-Louis, ce sont de grands talibés qui, à la fin de leur formation coranique, refusent de rentrer dans leur localité d'origine et s'adonnent à d'autres pratiques. La petite délinquance notée à Saint-Louis est l'œuvre d'adolescents talibés sous l'influence de grandes personnes. Ils s'adonnent au vol dans les marchés, gares routières, lieux publics ou à l'arraché, au vagabondage et même à la prostitution", a soutenu Fatou Moctar Fall.
Donc, a-t-elle poursuivi, c'est un constat qui est là, en dépit des efforts menés par l'État. "Le Sénégal a ratifié certaines conventions internationales et a des dispositions juridiques qui encadrent le travail des enfants et qui s'inscrivent dans l'éradication des pires formes de travail des enfants", a rappelé l'adjointe au gouverneur de Saint-Louis.
Malgré l'arsenal juridique que dispose le Sénégal pour faire face au fléau, les autorités privilégient encore la sensibilisation et le dialogue pour la préservation de la paix sociale. "Avant de punir, il faut faire de sorte que les textes soient bien compris et appropriés par tous les acteurs à tous les niveaux. Qu'ils comprennent ce qui est interdit et ce qui est légal en matière de travail des enfants. Toutefois, le Code pénal est très clair. Tous ceux qui sont pris de manière flagrante sont sévèrement punis par la loi", a expliqué la représentante du chef de l'exécutif régional.
Profitant de la présence des acteurs sociaux, Fatou Moctar Fall les a invités à s'approprier les concepts qui tournent autour du travail des enfants. "Pour mieux appréhender le problème du travail des enfants dans la région de Saint-Louis, il faut que les membres de la cellule et l'inspection régionale du travail puissent recueillir auprès d'eux des données fiables et justes au niveau territorial dont ils ont besoin. D'où ils sont attendus pour une meilleure implication dans la lutte contre le travail des enfants, surtout dans les pires formes", a-t-elle conclu.
IBRAHIMA BOCAR SENE SAINT-LOUIS