Publié le 22 Sep 2015 - 12:17
SITUATION AU BURKINA FASO

‘‘Les putschistes sont en négociations pour une reddition complète’’

 

Le journaliste burkinabè Zongo Touwendenda analyse les derniers développements du putsch militaire de jeudi dernier. Les forces loyalistes ont décidé de faire face aux éléments du Régiment de sécurité présidentielle depuis hier. La société civile quant à elle s’oppose à certains points du projet de protocole d’accord de la CEDEAO qui tient un sommet extraordinaire aujourd’hui, à Abuja.

 

Utiliser les armes pour désarmer un régiment. Alors que le président en exercice de la Cedeao, Macky Sall, s’efforce de trouver une issue pacifique à la crise politique au Burkina Faso, la situation se militarise dangereusement. Hier dans la matinée, des unités de l’armée loyale ont décidé de s’en prendre aux putschistes pour  remettre le pouvoir aux civils. ‘’Les forces loyalistes, c’est-à-dire les troupes de l’armée régulière,  sont arrivées dans la capitale en provenance d'une demi-douzaine de régions militaires et ont entrepris le quadrillage de la ville’’, témoigne le journaliste Touwendenda Zongo, joint au téléphone.

‘’Les populations sont sorties massivement jalonner le trajet de ces troupes à tous les quatre points cardinaux de la capitale. Conséquence : les éléments du RSP, auteur du coup d’Etat félon, désertent par centaines ; et certains cherchent à quitter la ville incognito’’, poursuit-il. Une nouvelle tournure qui ne devrait toutefois pas déboucher sur un embrasement généralisé, selon lui. Les putschistes ne seraient pas capables de faire face à la supériorité numérique et l’organisation des forces loyalistes. ‘’Le risque que ça dégénère est extrêmement faible parce que les forces en présence donnent un avantage écrasant à l'armée régulière. S'il y a des irréductibles, ils seront facilement neutralisés. Nous ne souhaitons pas qu'il y ait affrontement. L'opération qui se déroule actuellement est plus une action policière pour mettre hors d'état de nuire des bandits qu'une confrontation meurtrière entre deux factions de l'armée’’, continue le journaliste dans son analyse.

 Selon lui, le président de la transition par intérim, Cheriff Sy, et le chef d’Etat-major général des armées, le Général Pingrénooma Zagré, ont d’ailleurs appelé les éléments du RSP à se rendre dans un camp de cantonnement où ils seront accueillis eux et leur famille. Quant à une éventuelle radicalisation des putschistes, Zongo Touwendenda estime : ‘’Ils sont défaits, ils sont dans une phase de négociations pour leur reddition complète.’’ 

Jeudi dernier, 17 septembre, un coup d’état initié par le général Gilbert Diendéré débouche sur la destitution du président burkinabè de transition (Michel Kafando), la dissolution du gouvernement provisoire (dirigé par Isac Zida), du Conseil national de transition, et la création du Conseil national de démocratie.

Haro sur la Cedeao

La communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) s’est pourtant emparée de cet épineux cas burkinabè de manière réactive. Mais les exigences irréconciliables des forces en présence risquent de rendre la tâche beaucoup plus ardue pour Macky Sall, son président en exercice. Un projet de protocole d’accord de 13 points a été esquissé dimanche pour le sommet extraordinaire de la Cedeao qui a lieu aujourd’hui à Abuja. Mais deux points d’achoppement risquent de mettre du plomb dans l’aile de négociations serrées : participation possible des pro-Compaoré aux prochaines élections, et amnistie pour les putschistes. Des termes inconcevables pour la société civile.

Dimanche dernier d’ailleurs, le mouvement ‘Balai citoyen’ avait appelé à un rejet massif du texte. ‘’Le sommet extraordinaire de la Cedeao est sans objet.  En tout cas, la plupart des propositions contenues dans le projet sont caduques. Plusieurs points  du projet d’accord faisaient la part belle aux putschistes que l’Union africaine a pourtant qualifié de ‘’terroristes’’. On ne peut pas accorder l’amnistie à des terroristes, ni outrepasser les décisions du Conseil constitutionnel parce qu’on a un pistolet à la tempe’’, estime Zongo.

La volonté générale du peuple Burkinabè ne semble pas se contenter du retrait des militaires et d’un retour à la transition civile. Pas d'amnistie pour les auteurs de tueries de civils ; pas de libération extra-judiciaires des membres de l'ancien régime détenus pour crimes économiques et la dissolution du RSP sont des exigences que les militaires n’accepteront pas à coup sûr.

La société civile estime que l’ombre de Blaise Compaoré plane toujours sur le déroulement du jeu politique. Ce qui motive son rejet de certains points du projet. ‘‘Celui qui contrôle aujourd’hui le RSP contrôle aussi le CDP, le parti fondé par Blaise Compaoré à l’intermédiaire d’une tierce personne’’, fait savoir le journaliste Zongo Touwendenda, nourrissant une méfiance face aux tractations en coulisses dont pourrait être victimes les Burkinabè.  Le retour en arrière sur les décisions du Conseil constitutionnel d'invalider des candidatures de membres de l'ancien régime fait mal. ‘’Si on accède à cette revendication du RSP d’accepter les candidats qui ont été invalidés, il faut être sûr que la Cedeao viendra encore fabriquer d’autres résultats, lesquels seront proclamés par le Conseil constitutionnel et la Commission électorale nationale indépendante (CENI)’’, lance-t-il, critique.

OUSMANE LAYE DIOP

 

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