Une répression aveugle !
Hier, le lycée Mame Cheikh Mbaye de Tambacounda a vécu la pire journée de son année scolaire. Les élèves ont essuyé des grenades lacrymogènes dans l’enceinte de l’établissement. Pis, d’autres ont été arrêtés et passent leur première nuit en prison.
Hier, le lycée Mame Cheikh Mbaye de Tambacounda a été le théâtre de violences inouïes. En effet, les forces de défense et de sécurité (FDS) ont durement réprimé une marche improvisée par les potaches pour réclamer la libération de leur professeur de philosophie arrêté le samedi dernier, à la suite des manifestations dans la ville, à l’annonce de l’arrivée du leader du Pastef Ousmane Sonko. Ce dernier est encore entre les mains de la justice.
Mais hier, les forces de l’ordre, sûrement informées de la grève, ont tôt pris position devant le portail du lycée. Non seulement elles ont empêché les potaches de sortir, mais en plus, elles ont lancé des grenades lacrymogènes dans l’enceinte du lycée. Ce fut la débande chez les lycéens, dans la cour de l’établissement. Rapidement, la fumée a pris possession des lieux. Dans ce tohu-bohu, certains ont escaladé le mur de clôture très élevé, au péril de leur vie, car le lycée, aussi grand soit-il, ne dispose que d’une porte d’entrée.
Beaucoup d’élèves sont tombés en syncope à cause des gaz lacrymogènes, à en croire M. Djongue, professeur au lycée. ‘’Je déplore vraiment cette situation. Que des éléments des FDS se tiennent devant le portail du lycée et lancent des grenades sur les enfants, c’est déplorable. J’ai dû personnellement transporter certains élèves qui ont perdu connaissance dans la salle des profs pour les aider. Ce qu’il faut savoir, c’est que parmi ces élèves, beaucoup ont des difficultés respiratoires et d’autres sont asthmatiques’’, fulmine-t-il.
Les forces de l’ordre, qui n’ont pas mis les pieds dans l’enceinte du lycée, ont toutefois poursuivi les élèves qui avaient réussi à sauter par-dessus le mur. Certains ont reçu des coups de matraque. D’autres élèves regrettent l’arrogance et le manque de respect des éléments des forces de l’ordre. ‘’En plus de nous frapper, ils nous injuriaient’’, fulmine l’un d’entre eux.
Également, des élèves ont été arrêtés, à la suite de cette course-poursuite. Ils sont plusieurs à être placés en garde à vue, jusqu’au moment où ces lignes sont couchées.
Les épreuves physiques du baccalauréat ont démarré, depuis hier. Certains élèves arrêtés sont des candidats. Le professeur Djongue souhaite leur libération, afin qu’ils passent leur examen. De même, les parents d’élèves sont inquiets et ne savent pas à quel saint se vouer.
Selon eux, si l’enceinte de l’école ne constitue plus un espace de sécurité pour les élèves, il y a de quoi s’inquiéter.
Même son de cloche pour les droit-de-l’hommistes. À en croire le coordinateur régional de la Raddho, Badara Tine, la situation est plus qu’inquiétante et il urge de se concerter pour apaiser les tensions. Il regrette aussi l’utilisation abusive et gratuite des grenades qui coûtent cher aux contribuables sénégalais.
Les populations de Tambacounda qui, depuis les affrontements durant la nuit du samedi au dimanche, respirent difficilement, du fait de la pollution de l’air causée par les nombreux gaz lacrymogènes lancés par les FDS, craignent pour leur santé et leur sécurité.
En tout cas, la tension est palpable dans la ville, ces dernières heures. Les FDS sont accusées d’abuser de l’utilisation de gaz lacrymogènes. Ces dernières, même si elles dissuadent certaines personnes malintentionnées à agir, indisposent également d’autres qui ne demandent qu’à vivre en toute quiétude.
Boubacar Agna Camara (Tambacounda)