Un enfant infecté toutes les deux minutes
Dans son rapport 2020 publié hier, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (Unicef) indique que le taux d’infection au VIH chez les enfants a connu une hausse avec des décès. Les pays africains paient le plus lourd tribut.
Au moins 300 000 enfants sont nouvellement infectés par le VIH en 2020. Soit un enfant toutes les deux minutes. C’est ce qui ressort du rapport du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (Unicef) présenté hier, à l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le VIH. Cette enquête de l’Unicef révèle que la persistance de la pandémie de Covid-19 aggrave les inégalités qui marquent depuis longtemps cette épidémie.
Selon toujours l’Unicef, quelque 120 000 enfants sont décédés de causes liées au sida, durant la même période, soit un enfant toutes les cinq minutes. Il signale que deux enfants sur cinq vivant avec le VIH dans le monde ne connaissent pas leur statut sérologique et à peine plus de la moitié des enfants séropositifs reçoivent un traitement antirétroviral (ARV). ‘’L’épidémie de VIH entre dans sa cinquième décennie, au moment où sévit une pandémie mondiale qui a saturé les systèmes de santé et restreint l’accès à des services vitaux. Dans le même temps, l’augmentation de la pauvreté, des problèmes de santé mentale et de la maltraitance accroît le risque d’infection chez les enfants et les femmes’’, souligne la directrice générale de l’Unicef, Henrietta Fore, dans son communiqué.
Selon le dernier rapport mondial sur le VIH et le sida, intitulé ‘’Aperçu mondial de l’épidémie’’ publié ce 1er décembre, l’Afrique subsaharienne représentait 89 % des nouveaux cas d’infections pédiatriques en 2020. En outre, la région compte près de 88 % des décès d’enfants liés au sida. Malgré les progrès accomplis au cours des dix dernières années dans la lutte, des enfants et des adolescents de toutes les régions continuent d’être laissés de côté, déplore le rapport. Près de 150 000 enfants âgés de 0 à 9 ans ont été nouvellement infectés par le virus, portant à plus d’un million le nombre total d’enfants séropositifs au sein de ce groupe d’âge, selon l’Unicef. Le même nombre de nouvelles infections est constaté chez les ados de 10 à 19 ans, portant leur total à 1,75 million de séropositifs.
Par contre, le taux annuel de nouvelles infections parmi les adolescents a diminué de 41 % depuis 2010 en Afrique de l’Est et australe. Alors qu’au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, les infections ont augmenté de 4 % durant la même période. ‘’A moins d’intensifier les efforts pour remédier aux inégalités qui marquent l’épidémie de VIH, aujourd’hui exacerbées par la Covid-19, le nombre d’enfants séropositifs risque d’augmenter, ainsi que le nombre de ceux qui perdront leur combat face au sida’’, soutient Mme Fore.
‘’Les confinements ont contribué à la hausse des taux d’infection’’
Par ailleurs, souligne-t-elle, le taux de couverture des traitements antirétroviraux chez les enfants reste loin derrière celui des femmes enceintes (85 %) et des adultes (74 %) à l’échelle mondiale. C’est en Asie du Sud qu’il est le plus élevé (>95 %), suivi par le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord (77 %). L’Asie de l’Est et le Pacifique (59 %), l’Afrique de l’Est et australe (57 %), l’Amérique latine et les Caraïbes (51 %) et l’Afrique de l’Ouest et centrale (36 %).
Plus globalement, le rapport souligne que dans de nombreux pays, les services de lutte contre le VIH sont considérablement perturbés au début de l’année 2020, en raison de la Covid-19. Dans les pays durement touchés, les tests de dépistage chez les enfants ont chuté de 50 à 70 % et la mise en place de nouveaux traitements chez les enfants de moins de 14 ans a baissé de 25 à 50 %.
D’après l’Unicef, les confinements ont contribué à la hausse des taux d’infection, en raison des flambées de violence liées au genre, de l’accès limité aux soins de suivi et des ruptures de stock des produits de base. Plusieurs pays ont également connu une importante diminution du nombre d’accouchements au sein de structures de santé, de tests de dépistage du VIH chez les mères et de mise en place de traitements antirétroviraux.
Même si ces services ont repris en juin 2020, le niveau de couverture reste bien en dessous de ce qu’il était avant la Covid-19, note l’Unicef. L’incidence réelle de ces perturbations demeure inconnue. En outre, dans les régions durement touchées par le VIH, la persistance de la pandémie pourrait perturber encore davantage les services de soins de santé et accentuer les disparités dans la riposte mondiale au sida, souligne le rapport. L’année dernière, 15,4 millions d’enfants ont perdu un de leurs parents, ou les deux, pour des causes attribuables au sida, dont les trois-quarts de ces enfants, soit 11,5 millions, vivent en Afrique subsaharienne. Si les enfants devenus orphelins en raison du sida représentent 10 % de tous les orphelins dans le monde, 35 % de l’ensemble des enfants sans parents vivent en Afrique subsaharienne.
‘’Reconstruire en mieux dans un monde post-pandémie, implique de mettre en œuvre des ripostes au VIH fondées sur des données probantes. Elles doivent être axées sur les populations, résilientes, durables, par-dessus tout équitables’’, précise Henrietta Fore.
VIVIANE DIATTA