La piste belge prônée, la Rwandaise écartée
Extrader Hissène Habré en Belgique afin qu'il y soit jugé avec toutes les garanties d'un procès équitable. Mais aussi écarter toute proposition qui l'enverrait au Rwanda, ''terrain inconnu'' où les victimes seraient dans l'impossibilité de se rendre en cas de procès. C'est le souhait encore réaffirmé hier par le Comité international ad hoc, en lutte depuis plus de 20 ans pour que l'ancien président du Tchad réponde de ''ses crimes''.
Selon Jacqueline Moudeina, avocate des victimes et présidente de la Ligue tchadienne des droits de l'Homme, le statu quo devient insupportable. ''L'option la plus réaliste pour éviter l'impunité des crimes de masse reprochés à Hissène Habré, c'est son extradition vers la Belgique pour qu'il y soit jugé. Nous appelons la communauté internationale, en particulier l'Union européenne à soutenir cette opinion pour que les victimes obtiennent enfin justice'', a-t-elle indiqué.
Sur le choix du pays plat, l'avocate explique et justifie : ''la Belgique est le seul pays à avoir reçu et entendu les victimes, et qui continue à leur ouvrir une porte vers la justice. Ce qui est indispensable car beaucoup de survivants sont déjà décédés.'' A ce propos, Mme Moudeina a rappelé que ''depuis septembre dernier, une nouvelle demande belge est toujours pendante devant les juridictions sénégalaises.''
Présenté comme une victime sénégalaise du président Hissène Habré, Abdourahmane Guèye est dans la même dynamique visant à faire juger l'ancien président, mais il dit se heurter à l'obstacle sénégalais. ''En tant que citoyen, l’État refuse de me soutenir en jugeant Habré au Sénégal. Et comme mon pays est incompétent, je lui demande de l'extrader en Belgique. Nous allons tous mourir sans qu'il soit jugé'', a-t-il souligné.
Alioune Tine, président de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l'Homme (RADDHO) parle d'une honte pour les État africains. ''Cet échec signifie que nos institutions traînent toujours une faille judiciaire après 50 ans d'indépendance. C'est une catastrophe, une honte. Force est de constater que le Sénégal n'a pas la volonté de juger Habré. C'est une déception amère. Depuis 2000, les victimes font face à une succession d'amertumes. Mais nous allons tout faire pour que justice leur soit rendue'', a promis Tine.
Viviane DIATTA