Publié le 14 Apr 2013 - 23:37
COMMUNICATION GOUVERNEMENTALE

 Evaluation diagnostic

 

Le Gouvernement du Sénégal organise, dans un hôtel de la place, un séminaire atelier sur la communication de l’État. Nous saisissons cette occasion pour faire un diagnostic de la gestion de la communication gouvernementale. Oui ! Nous parlons de diagnostic. En effet, les nouvelles autorités reconnaissent les difficultés dans la gestion de la communication de l’État. Fort de ce constat, nous essaierons d’utiliser les termes simples pour faire l’état des lieux.

 

Maîtriser un système de communication c’est essentiellement maîtriser 4 éléments : des émetteurs, des messages, des supports de transmission et des destinataires. En matière de communication politique, il y a une autre variable à intégrer : les messages concurrents et ''démonteurs''. En effet, par sa stratégie de communication, l’État veut convaincre les populations de la pertinence de ses choix, tandis que l’opposition cherche à discréditer le pouvoir.

 

En effet, le 25 mars 2012 est marqué par l’arrivée au pouvoir d’une équipe hétéroclite. Nous avons eu une majorité présidentielle avec une multitude d’émetteurs ; chacun ayant son propre message et suivant ses propres objectifs. Personne ne maîtrise en réalité les centres d’émission des messages de la majorité (Benno Bokk Yaakaar). Ce défaut de coordination des centres émetteurs a largement profité à l’autre camp (PDS et les éditorialistes). En fait, le pouvoir, par ses contradictions et tiraillements internes, donnait de la matière aux journaux et facilitait à l’opposition son travail de contestation.

 

Un cas d’exemple : Idrissa Seck, président de Rewmi, parti de la mouvance présidentielle avait tiré sur Abdoul Mbaye, premier ministre. Quoi que puisse être le gain politique attendu, Idrissa Seck, par sa sortie, avait servi sur un plateau d’argent des arguments solides aux détracteurs du régime. En effet, l’opposition, sous la houlette du PDS, défendait l’idée selon laquelle Abdoul Mbaye serait incapable de faire décoller le développement du Sénégal. Après la sortie de Idrissa Seck, je ne sais pas quel expert en communication pouvait convaincre l’opinion que le PDS avait tort sur ce point précis ?

 

La communication ce n’est pas de la magie, ce n’est pas non plus des jeux de mots. Malheureusement, au niveau de la majorité, il y a eu plusieurs centre d’émissions aux intérêts occultes et dont personne n’a le contrôle. Or la communication, c’est d’abord une discipline dans la prise de parole. Trop de cacophonies au sommet de l’État !

 

Toutefois, nous parlons ici des centres émetteurs, le diagnostic montre aussi, que même la formulation des messages pose problème. En guise d’illustration, de quoi parlent les tenants du pouvoir en public : sur la question des ''biens supposés mal acquis'', par exemple? Si ce n’est pas X qui tire sur Y, c’est Z qui diabolise W… Le choix des sujets (pourquoi parler de ceci et non de cela), la hiérarchisation des informations…obéissent à une logique à la fois commerciale et politique. Sur ce papier, nous préférons ne pas entrer dans ce débat.

 

Malheureusement, pour la majorité, au-delà des difficultés dans la formulation des messages, il y a le problème des supports. C’est l’un des problèmes les plus difficiles auxquels la majorité peine à gérer. En effet, cela pose l’éternelle question des rapports entre : diffuseurs (médias) et émetteurs des messages politiques. L’État n’a plus le monopole de la diffusion (médias d’État). La presse privée reçoit à la fois, les messages de l’État et ceux des autres groupes organisés et non organisés. Malheureusement, la majeur partie des messages reçus par la presse privée interpelle l’État ou remette en cause les messages fournis par l’État. Et puisque les messages de l’État sont parfois mal conçus et les émetteurs souvent très indisciplinés, il est très facile de les démonter et de mettre à nu les carences de l’État. Hélas ! Le fait que les médias privés (Groupe Walfadjri par exemple) mettent en valeur - assez souvent - les informations contradictoires à celles fournies par l’État, est perçu comme un acharnement. Mais il faut dire, que même l’acharnement mérite une solution intelligente et non pas de menaces ou de boycott (exemple de Youssou Touré qui a boudé le plateau de WalfTv, en pleine émission).

 

Aujourd’hui, nous vivons dans une société dite de l’information, et l’État n’a aucun pouvoir sur l’oreille des citoyens. Un pauvre paysan du village de Kagnarou peut démentir le Président de la République, une minute après son discours. Alors quel type de rapport faut-il entretenir avec les destinataires des messages.

 

Il nous plaît d’évoquer la dernière variable : le discours concurrent et ''démonteur''. En effet, l’opposition a une mission officielle : discréditer le pouvoir. Et le malheur du régime de l’alternance c’est qu’elle a en face de lui une opposition expérimentée, qui connaît bien l’appareil d’État et une grande maîtrise de certains dossiers de l’État.

 

Hélas ! Ce n’est pas par magie, que le Gouvernement réglera ses problèmes de communication. Il devra rapidement prendre conscience que communiquer ce n’est pas seulement mettre sur la place publique des informations. Informer diffère de communiquer! Un journaliste n’est pas un communicant! Voilà la première équation que l’État doit résoudre. A ma connaissance, dans le pool communication du dispositif gouvernemental, il n’existe pas un communicant professionnel, mais des journalistes, quoi qu’émérites.

 

 

M. Idrissa Goudiaby, Communicant

idrissa2005goudiaby@yahoo.com

Tel : +221 709 36 1 368

 

 

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