Le berger avait fusillé son ami par jalousie
Alors qu’il ne lui restait qu’une année de prison à purger, Djiby Oumar Bâ s’est retrouvé hier avec deux ans supplémentaires. La Cour d’assises d’appel a infirmé l’arrêt de la Cour d’assises de Saint-Louis.
24 octobre 2006, jour de Korité. A l’image des autres localités du pays, le village de Loro, situé dans l’arrondissement de Oudallaye en région de Matam, est plongé dans l’allégresse en cette journée marquant la fin du Ramadan. Après le festin, Djiby Oumar Bâ partit avec son épouse Rougui Diallo danser au village de Thiodore. Le jeune couple (le mari et la femme avaient respectivement 22 et 20 ans) se trémousse sur la piste de danse avec leurs amis Demba Diao et Kalidou Sow. Pendant que tout le monde esquivait des pas de danse, Djiby Oumar Bâ épiait les moindres faits et gestes de son ami Demba Diao. Car il le soupçonnait de vouloir faire la cour à sa femme. Ses soupçons vont se confirmer un peu plus tard. Le mari dit avoir vu son ‘’rival’’ ressortir de la case d’un marabout pour déposer un gris-gris sur le siège de son épouse. ‘’C’était destiné à envoûter ma femme pour qu’elle tombe amoureuse de lui’’, a confié l’accusé hier, à la Cour d’appel d’assises de Dakar. Heureusement pour le bonheur de son amour, Demba Diao n’a pas atteint son objectif puisqu’il l'a interpellé et celui-ci a promis de ne plus recommencer. Mort de jalousie, Djiby Oumar Bâ rumine sa colère en continuant de faire la fête. Demba Diao a même cru que l’incident était clos. Ainsi à la fin de la soirée, il se rendit chez le couple pour se reposer. Pendant qu’il est allongé dans un lit de fortune, Djiby Oumar prit le fusil de chasse calibre 12 mm de son père pour tirer à bout portant sur son hôte plongé dans les bras de Morphée. La balle entrée à la hanche s’est logée à l’abdomen. Évacué au district sanitaire de Ranérou, la victime succombe à ses blessures en cours de route. Ironie du sort, à quelques jours de la 7ème année de commémoration de la mort de Demba Diao, d’après le calendrier musulman, son meurtrier répondait de son acte devant Dame Justice pour la seconde fois. Car, le 18 novembre 2011, Djiby Oumar Bâ a été condamné par la Cour d’assises de Saint-Louis à huit ans de travaux forcés. Inculpé d’assassinat, les faits avaient été disqualifiés en meurtre.
L’accusé renvoyé à la barre par le parquet général
Le parquet général de Saint-Louis n’était pas satisfait de cette décision et avait relevé appel. Quoi qu’il en soit, Djiby Oumar Bâ dit regretter son acte parce qu’il n’avait pas l’intention d’ôter la vie à son ami. ‘’Lorsque je l’ai trouvé chez moi, je lui ai demandé de ne plus s’approcher de ma femme. Ensuite je lui ai intimé l’ordre de se lever et subitement, le coup de feu est parti’’, a raconté l’accusé. Pour attester de sa bonne foi, il a soutenu qu’il avait pris l’arme pour l’apeurer mais qu’il avait oublié qu’elle était chargée. ‘’Je l’ai tué par accident et depuis sept ans je suis en prison’’, a-t-il conclu. Pour l’avocat général Madiaw Diaw, il ne s’agit point d’accident mais d’un assassinat. Il reste convaincu que Djiby Oumar Bâ n’a aucun regret car après son arrestation, il a revendiqué son acte. C’est pourquoi, il a requis 12 ans de travaux forcés. La défense assurée par Me Ngoné Thiam a demandé que la peine soit ramenée à cinq ans de travaux forcés. Elle croit à la thèse de l’accident dans la mesure où, argue-t-il, son client ne sait pas manier une arme. C’est pourquoi, elle a demandé une disqualification du meurtre en coups mortels. La Cour a plutôt suivi le parquet général en infirmant l’arrêt de la Cour d’assises de Saint-Louis. Ainsi Djiby Oumar Bâ a été finalement condamné pour assassinat. Alors qu’il lui restait un an à purger, son séjour carcéral s’est prolongé de deux ans. Car, l’accusé a écopé de 10 ans de travaux forcés au lieu des 8 infligées par la Cour d’assises de Saint-Louis.