Les opérateurs crient, les clients agonisent
Les infractions commises dans le secteur des télécommunications font perdre des centaines de millions aux opérateurs et appauvrissent une clientèle qui perd à tous les coups. Il urge d’agir, l’alerte est au maximum.
Avis aux usagers du téléphone portable : vous êtes arnaqués à longueur de journée par des voyous qui vous font rêver à travers des SMS qui vous ennuient parfois et vous ruinent toujours. A l’issue du diagnostic dressé hier par les acteurs du milieu des télécoms, les usagers n’ont que deux alternatives : perdre… ou perdre.
Surtout que dans les débats, les opérateurs ont presque étalé toute leur incapacité à faire face aux infractions commises dans leurs propres réseaux. Des actes illégaux qui ont pour noms, vols de câbles, de groupes électrogènes et d’antennes chez les opérateurs, et vols d’appareils téléphoniques portables et escroqueries sous diverses formes chez les clients des opérateurs de téléphonie mobile.
Des pratiques qui, selon le directeur général de l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (ARTP), impactent négativement sur la satisfaction du consommateur. Pire, elles ‘’constituent une menace pour la pérennité des réseaux des opérateurs et la qualité de service que nous exigeons d’eux’’, a déclaré Abou Lô. Des opérateurs qui constatent de jour en jour que les brigands gagnent du terrain et sont très en avance sur leurs technologies d’arnaque.
Keur Massar, champion en titre du vol de câble
Rien que pour l’année 2013, la SONATEL confie avoir perdu 27 km de câbles, à travers des vols savamment orchestrés. Parmi les zones où l’on note une forte fréquence de ces vols, figurent Bargny, Déni Biram Ndao, Grand Mbao, Thiaroye, l’intérieur des régions. Keur Massar reste le champion du vol de câble, avec des performances qui donnent le tournis, renseigne le directeur du département sécurité de SONATEL, Dame Mbaye.
Il confie que le préjudice total estimatif incluant travaux de réparation et perte sur le trafic, de 2006, date de l’apparition du phénomène, à 2013, s’élève à 200 millions de F Cfa. Pour l’opérateur de SENTEL Gsm, représenté au Sénégal par Tigo, cette somme perdue est à revoir à la hausse, puisqu’en plus des câbles volés, l’entreprise subit des vols du carburant qui sert à l’éclairage de ses stations dans certaines localités non encore électrifiées.
SONATEL ET TIGO ont perdu plus de 400 millions, depuis 2006
Les malfrats qui perpétuent ces infractions extraient le cuivre dans ces câbles pour les revendre. Un marché juteux qui rapporte au plan local 3 mille francs Cfa par kg de cuivre. Vendu sur le plan international, le kg de cuivre revient à 8 mille. Ce qui explique les proportions démesurées dans l’exportation du cuivre notée ces dernières années au Sénégal. Un paradoxe qui n’est pas passé inaperçu pour un pays comme le Sénégal qui ne produit pas de cuivre, mais curieusement en exporte.
Le Sénégal exporte du cuivre alors qu’il n’en produit pas
D’où l’appel lancé hier par les acteurs pour une synergie d’actions. D’ailleurs le choix de l’Ecole nationale de police pour abriter l’atelier sur les infractions commises dans le secteur des télécoms est loin d’être fortuit. L’application du code des télécommunications reste un puissant levier sur lequel l’ARTP entend s’appuyer, pour faire face aux infractions, a dit Abou Lô.
D’ailleurs son article 147 dispose que ‘’les employés assermentés de l’ARTP sont habilités à rechercher et constater les infractions prévues dans ladite loi, conformément aux dispositions du code de procédure pénale. Ils rendent compte de leurs constatations par procès-verbal. Leurs procès-verbaux sont transmis dans les cinq jours au procureur de la République. Ils font foi jusqu’à preuve du contraire’’. Police, Gendarmerie et Douane ont dit leur engagement à appuyer l’ARTP et les opérateurs dans cette lutte contre les bandits qui exploitent le réseau.
Amadou NDIAYE