Publié le 3 Feb 2015 - 16:13
ENRICHISSEMENT ILLICITE

La partie civile hante le passé de Bibo

 

En dehors des questions habituelles sur les démarches ‘‘contournées’’ de Ibrahim Aboukhalil, dit Bibo, pour la création de sociétés, l’accusation a abattu hier une nouvelle carte : établir le lourd passif de l’homme d’affaires. La partie civile a fouillé dans le passé du prévenu.

 

La bataille d’usure continue au tribunal. Le passé industriel d’Ibrahim Aboukhalil a remonté à la surface hier. Un talon d’Achille pour le prévenu que Me Félix Sow a mis à profit. La cessation de paiement de la société sénégalaise de plastique et dérivés (Soplad), sa ‘‘banqueroute frauduleuse’’, et la décision de justice qui s’en est suivie, ont indisposé Bibo. ‘‘Combien de sociétés industrielles ont été fermées avant 2000 ?’’ a demandé l’avocat.

Le prévenu, sur la défensive, a tenté de contenir les assauts de la partie civile, en réitérant ses réponses antérieures : ‘‘J’ai essayé et je n’arrêterai pas de mettre toute ma volonté pour la manifestation de la vérité. J’ai répondu à toutes les questions. Je veux bien répondre à celles qui font l’objet pour laquelle je suis ici. On a évoqué une affaire dont le jugement a été cassé. Ce n’est pas moi qui étais en faillite, c’est une société, parmi de bonnes dizaines dans le groupe (Bourgi)’’, a déclaré Ibrahim Aboukhalil.

Fidèle à sa ligne de défense, le prévenu pour complicité d’enrichissement illicite s’est refermé comme une huître, à chaque fois que les questions ne concernaient pas la présente procédure. Les justificatifs de versement aux impôts émanant de Me Moustapha Mbaye ont rencontré un refus catégorique de Bibo. ‘‘Je ne répondrai plus à une question n’ayant pas recours à la procédure. Qu’on me pose des questions par rapport à la complicité d’enrichissement de Karim Wade.

Je suis fatigué. De grâce, qu’on m’en pose par rapport à l’objet de ma présence’’, a apporté Bibo comme réponse. Aux manœuvres de contournement dans la création de sociétés (actions au porteur, libération de capital en numéraires, identité camouflée...) motivées par son désir de ‘‘confidentialité’’, la partie civile a ajouté l’activité industrielle d’avant 2000 pour tenter de confondre un peu plus Ibrahim Aboukhalil.

Esquissée lors de l’audience de jeudi passé, cette affaire a été évoquée dans de plus amples détails. ‘‘Au 31 décembre 1999, quelle était votre fortune personnelle ?’’ a insisté Me Yérim Thiam. Une situation chiffrée exigée par l’avocat, sous le prétexte que Bibo est soupçonné d’avoir manipulé des sommes de 200 millions à plus d’un milliard (sur plusieurs tranches), en espèces. ‘‘ Ma fortune et mon patrimoine étaient largement suffisants à cette date pour faire des investissements’’, a lancé le prévenu.

Présomption d’innocence

Me Félix Sow a finalement révélé les détails de cette affaire. Le 14 avril 1999, une décision de justice condamnait Ibrahim Aboukhalil et Samir Bourgi à 2 ans de prison avec sursis et à 100 millions d’amende pour banqueroute frauduleuse de la société sénégalaise de plastique et dérivés (Soplad). Les faits reprochés à Bibo sont l’omission de 17 traites de 175 millions, et la disparition du matériel appartenant à cette société.

La Cour suprême a cassé la décision, mais depuis l’arrêt de cassation en septembre 2005, l’affaire n’a pas été rejugée. Impasse juridique ? Tout semble l’indiquer, car le dossier a...disparu. En tout cas, Ibrahim Aboukhalil s’est désolé qu’on fasse référence à une décision cassée devant une procédure pendante. ‘‘Vous êtes un éminent juriste. Vous n’allez pas bafouer la présomption d’innocence’’, a déclaré Bibo à l’intention de Me Félix Sow. Ce dernier estime que le jugement subsiste toujours, car il n’a pas été anéanti.

La confrontation soulage Bibo

Ainsi, la confrontation avec les autres prévenus a été un répit pour Ibrahim Aboukhalil. Pape Mamadou Pouye, Pierre Agboba, et Alioune Samba Diassé ont tous rejoint Bibo dans leurs propos. Une concordance qui s’est vérifiée sur l’épineux cas des HQ. L’ancien directeur général adjoint de la compagnie Air Afrique, Pierre Agboba, a révélé que toutes les fonctions sont codifiées dans le transport aérien. ‘‘Toutes les fonctions opérationnelles sont codées. Headquarter (hq) correspond à l’administration ou la direction.

Si vous voulez utiliser votre code comme adresse mail, il n’y a pas de problème’’, a-t-il déclaré, rejoignant Bibo et Mamadou Pouye qui ont toujours soutenu que ces noms leur servaient pour la messagerie électronique. ‘‘Je maintiens que c’est une adresse e-mail générique. Il n’y a pas des histoires de code pour se cacher dans l’aéronautique. Ce n’est qu’une adresse mail, il faut dissiper cet aspect de nébulosité à la James Bond’’, a renchéri Mamadou Pouye.

Ousmane Laye DIOP

 

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