L’équation des missionnaires
Le dernier conseil des ministres du jeudi 17 mai a pris des mesures importantes portant sur le pèlerinage. Selon la presse, le Ministre des Affaires Etrangères et des Sénégalais de l’Extérieur, monsieur Alioune Badara Cissé, a déclaré que le nombre des missionnaires sera considérablement revu à la baisse avec un strict minimum de 145 à 150 et que le gouvernement va faire de la rupture cette année avec un moindre coût et une plus grande qualité.
Si la baisse annoncée du prix du transport est très salutaire, la réduction au strict minimum du nombre de missionnaires à 150, ne garantit guère un pèlerinage de qualité. Au contraire, pour un pèlerinage de qualité, il faut un nombre suffisant de missionnaires qualifiés. Cependant, nous comprenons parfaitement les raisons profondes qui sont à l’origine de cette décision du conseil des ministres.
En effet, depuis presque toujours, il était de coutume d’amener un nombre important de missionnaires compris entre trois cents et quatre cents personnes. En dehors de 30% de ce personnel, seule une cinquantaine de missionnaires relevant de l’autorité directe du commissaire général, s’acquittait réellement de cette fonction d’encadrement des pèlerins. Tout le reste, relevant particulièrement de la primature, des ministères et de la Présidence, n’était constitué que de pèlerins de luxe, rémunérés et bénéficiant d’une prise en charge totale de leurs frais de pèlerinage. La récompense politique prenait largement le dessus sur un choix objectif respectant les critères d’efficacité, d’expérience et d’aptitude à mener à bien la noble mission d’encadreur. Il était même paradoxal de constater que beaucoup de missionnaires sous la tutelle du commissaire général n’avaient qu’un statut d’auxiliaire malgré le travail abattu, et n’avaient droit qu’à la moitié des primes accordées aux missionnaires de luxe. La plupart de ces derniers en étaient d’ailleurs à leur première expérience et par conséquent avaient besoin eux-mêmes d’être encadrés.
«Supprimer les poids morts»
Malgré tous les efforts considérables, il faut le reconnaître, fournis pour l’amélioration des conditions du pèlerinage en particulier ces dernières années, il était difficile d’obtenir de réelles satisfactions du fait principalement de ces impairs.
Aujourd’hui, nous ne pouvons qu’encourager le nouveau gouvernement pour cette rupture. Cependant, nous l’invitons à ne pas se contenter de réduire drastiquement le nombre de missionnaires. Il faut bien sûr supprimer les poids morts mais aussi s’aligner impérativement sur les normes d’efficacité. Il faut absolument en finir avec cette pléthore de pèlerins sous la responsabilité d’un seul guide contraint de perdre le contrôle de son groupe lors des moments intenses de Tawaf (circumambulation), du Saï (Safa et Marwa) et des lancées de Jamrat.
Notre conviction est que, pour un pèlerinage réussi, il faut nécessairement un minimum de deux cents (200) missionnaires qualifiés composés du personnel d’encadrement et du personnel médical.
Aller en-deçà de ce chiffre, serait une façon d’hypothéquer encore les chances d’une vraie réussite du pèlerinage. En vérité, avec l’ancienne formule, l’on n’était pas loin du chiffre de 150 missionnaires actifs si on ajoute à la cinquantaine relevant du Commissaire, les 30% recyclables sur un total de 300. La solution n’est donc pas de reconduire ce chiffre même si le gouvernement a le mérite d’avoir supprimé 150 autres postes inutilement budgétivores.
L’Etat a tout à gagner dans cette suppression même s’il n’est pas exclu qu’il s’en serve à nouveau pour une récompense politique en la convertissant en billets à offrir à des pèlerins.
La résolution de l’équation des missionnaires est l’une des conditions sine qua non pour une réussite du pèlerinage à la Mecque. Et la solution réside dans la sélection d’un nombre suffisant d’encadreurs qualifiés et actifs.
Cheikh Bamba DIOUM