Publié le 4 Jun 2018 - 14:51
MEMORANDUM SUR L’ETAT DE LA JUSTICE SENEGALAISE

Barthélemy Dias vilipende Macky Sall auprès du Congrès américain

 

Le maire de Mermoz-Sacré cœur, depuis sa cellule, a adressé un mémorandum au Congrès américain, pour attirer son attention sur l’état de la justice sénégalaise souvent ‘’instrumentalisée’’, selon lui, par le président de la République, dans le but d’écarter des adversaires politiques de la course à la Présidentielle de 2019.

 

Barthélemy Dias internationalise son combat contre le régime en place. Depuis sa cellule où il purge une peine d’emprisonnement de 6 mois, il a adressé un mémorandum à la Commission des relations extérieures du Congrès américain. Dans le document dont copie est parvenue hier à EnQuête, le lieutenant du maire de Dakar, Khalifa Ababacar Sall, invite les membres de la sous-commission sur l’Afrique des relations extérieures du Sénat américain (subcommittee on Africa), à prêter une attention particulière sur la situation politique, judiciaire, économique et électorale en cours au Sénégal.

Procès de la justice sénégalaise

En effet, dans le document, Barthélemy Dias déplore ‘’les agissements anti démocratiques, dictatoriaux et illégaux’’ du président du Sénégal qui instrumentalise la justice sénégalaise à sa guise, contre des adversaires politiques pour conserver son pouvoir à travers une mal gouvernance devenue insupportable’’. A l’en croire, le Président Macky Sall est obnubilé par une éventuelle réélection en février/mars 2019. Car, ‘’depuis quelques mois, il s'emploie, avec acharnement, à écarter de la compétition future diverses personnalités politiques qui ne sont pas ou plus de son bord en les emprisonnant sous de fallacieux prétextes’’. Pour ce faire, relève-t-il, ‘’il s'appuie sur la justice sénégalaise qui est, en fait, à son service’’.

‘’C'est ainsi qu'après avoir fait condamner et emprisonner Khalifa Ababacar Sall, député-maire de la ville de Dakar, capitale du Sénégal, il vient de faire la même chose contre Barthélemy Dias, ancien parlementaire, maire de la Commune de Mermoz-Sacré-Cœur à Dakar et principal soutien politique de M. Sall’’, écrit-il dans son mémorandum. Non sans préciser que la justice sénégalaise est discréditée et tout le pays en a unanimement conscience, y compris les magistrats eux-mêmes’’. Il en veut ainsi pour preuves les déclarations de certaines personnalités publiques. Le 5 octobre 2015, Me Mame Adama Guèye, ancien Bâtonnier de l’Ordre des avocats, disait : ‘’Il y a une incertitude judiciaire grandissante, au moment où la situation de la justice est en train d’empirer et a atteint une vitesse phénoménale et où l’indépendance de la justice est instrumentalisée par certains magistrats qui la mettent au service d’intérêts illégitimes’’.

Reprenant dans la foulée les propos du vice-président de l’Assemblée nationale, Moustapha Cissé Lo, par ailleurs membre du parti présidentiel, Dias fils laisse entendre qu’il n’y a pas de justice au Sénégal et que les magistrats ne jugent pas équitablement. Toujours dans le but de convaincre les membres du Sénat américain de l’état de délabrement du système judiciaire sénégalais, Barthélemy Dias invoque les propos du président de l’Union des magistrats du Sénégal (UMS), Souleymane Téliko, tenus le 29 mars 2018, qui soutenait que ‘’personne ne peut contester, aujourd’hui, le manque d’indépendance de la justice. Tout le monde sait que quand l’Exécutif a la main mise sur la carrière des magistrats, il y a mainmise sur le fonctionnement de la justice’’. Aussi, cite-t-il le juge démissionnaire au Parquet de la Cour d’appel, Ibrahima Hamidou Dème qui, pour donner les raisons de sa démission, déclarait le 26 mars 2018 : ‘’Je démissionne d’une justice qui a démissionné… qui a perdu sa crédibilité et son autorité… qui ne joue plus son rôle de gardienne des libertés individuelles.’’

Si ces différentes déclarations confirment, selon lui, la ‘’mainmise’’ du pouvoir politique d’Etat sur la justice, Barthélemy Dias note qu’aucune de ces personnalités n’a pourtant été interrogée par la police, arrêtée ou passée en jugement pour leurs propos. Or, ‘’voilà que le 30 mars 2018, après qu’un verdict inique ait été rendu dans l’affaire précitée concernant le député-maire de Dakar, Barthélemy Toye Dias est arrêté, jeté en prison, jugé le 6 avril 2018 par la justice sénégalaise et condamné le 17 avril à une peine de 6 mois de prison ferme, simplement pour avoir dénoncé le jugement (objet d’un recours en appel de toutes les parties : Procureur, agent judiciaire de l’Etat, avocats de l’Etat, avocats de la défense) entrepris contre Khalifa Sall dans un pays où la liberté d’expression est garantie par la Constitution’’, déplore-t-il. Non sans ajouter : ‘’Le Tribunal écartera expressément « l’outrage à magistrat » et « l’appel à un rassemblement non armé » et retiendra « le discrédit jeté sur une décision de justice, ce qui est de nature à porter atteinte à l’autorité de la justice et à son indépendance...»

Plaidoyer pour Khalifa Sall

Ce verdict, à en croire le maire de Mermoz-Sacré cœur, était l’occasion rêvée par le chef de l’Etat pour le retenir en otage, parce qu’il s’est révélé clairement comme une personnalité opposée à sa politique devenue ‘’dictatoriale’’ sur le pays et son avenir. ‘’M. Macky Sall, conscient de ma popularité et de ma capacité de mobilisation, a profité de ce prétexte pour me faire taire. En effet, ayant décidé de tripatouiller la Constitution et le Code électoral comme le font la plupart des dictateurs africains pour se garantir d’ores et déjà une victoire sans adversaire de taille, lors de l’élection présidentielle de février/mars 2019, le président de la République a choisi de fouler au pied la liberté d’expression en me réduisant au silence parce qu’étant une des voix puissantes, un des hommes de refus et d’action, un des rares capables de faire face’’, écrit-il dans la note. Avant d’ajouter : ‘’Une fois son forfait accompli le 19 avril 2018, soit deux jours après ma condamnation, M. Macky Sall fera voter par l’Assemblée nationale, sans débat, une modification de la Constitution et une autre du Code électoral lui permettant, en réalité, d’invalider la candidature de qui il voudra.’’  

Ainsi, pour entrer en condamnation contre lui, il fait noter que le Tribunal a volontairement violé la loi et le Code pénal en ce sens que, ‘’dans le système judiciaire sénégalais, lorsque les déclarations incriminées ont été rendues publiques par la presse (presse écrite, radio ou télévision), c’est le média en question qui doit être d’abord poursuivi comme auteur principal (articles 248 et 270), la personne ayant fait les déclarations n’étant que complice (articles 198 dernier alinéa et 271)’’. ‘’Le pouvoir de M. Macky Sall et sa justice ont, délibérément, refusé de poursuivre l’organe de presse qui en l’occurrence était une chaîne de télévision en ligne pour ne s’attaquer qu’à M. Dias. Au début, brièvement interpellé, le journaliste a été immédiatement libéré sur ordre et avec les excuses de M. Macky Sall. Ce qui est illégal’’, dénonce le fils de Jean Paul Dias.

Dans son mémorandum, Barthélemy Dias ne s’est pas seulement soucié de son sort. Il a également sensibilisé les membres du Congrès américain sur le dossier du maire de Dakar député-maire de Dakar et candidat à l’élection présidentielle de février/mars 2019. Avec l’ouverture de son procès en appel prévu ce mardi 5 juin 2018, il dénonce une tentative de liquidation politique, en attendant de confirmer, sans vergogne, en cassation (cour suprême) ce vaste complot politico-judiciaire contre la démocratie sénégalaise. ‘’De mémoire de Sénégalais, ce sera la première fois dans l’histoire de notre pays, jadis démocratique, qu’on assistera à la condamnation d’un citoyen (politique et présidentiable) en l’espace de dix mois (en première instance, en appel, puis en cassation), dans le seul but d’empoisonner la démocratie’’, déclare-t-il.

ASSANE MBAYE

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