De la poésie pour panser les maux de la société
Après ‘’La cuisine Françafrique : quand le poétique rejoint le politique’’, ‘’Le Sénégal entre deux naufrages : ‘Le Joola’ et l’alternance’’, Almamy Mamadou Wane revient avec ‘’Le secret des nuages : Poésie sociale’’. La cérémonie de dédicace a eu lieu samedi dernier, à la maison d’édition L’Harmattan.
Et si, dans les nuages, se cachaient des secrets ? Almamy Mamadou Wane semble en être convaincu. Il a cherché à percer le mystère. Espérant, dans le ciel, trouver des remèdes aux maux dont souffre l’humanité, en particulier l’Afrique et le Sénégal. Tout est parti d’un long voyage. De Paris à Dakar, survolant le ciel ‘’magnifique’’ du Cap-Vert, avec ses nuages éparses en dessous, l’auteur en arrive à se faire une idée : ‘’Les nuages ont peut-être des secrets bien gardés.’’ C’est ce qui explique le titre de son tout nouvel ouvrage publié aux éditions L’Harmattan.
Dans ‘’Le secret des nuages, poésie sociale’’, l’auteur aborde de façon tout à fait particulière, les problématiques qui assaillent la société. Parmi ces thématiques : le dérèglement climatique, l’injustice sociale, la migration… A l’en croire, tout est imbriqué. ‘’Le dérèglement climatique qui change les saisons, pèse également sur la vie des gens. Lesquels deviennent de plus en plus pauvres et sont obligés parfois de quitter leurs terres natales pour aller vivre ailleurs’’, explique-t-il. Dans le livre, M. Wane parle également de la politique, de la femme et un peu d’amour aussi. Le tout à travers des poèmes courts et au verbe accessible. C’est tout simplement ‘’un régal’’, si l’on en croit Me Amadou Aly Kane, présent à la cérémonie de dédicace, samedi dernier.
‘’Je l'ai parcouru avec délectation. J’aime particulièrement sa plume. J’ai comme l’impression qu’il est une réincarnation de David Diop, d’Aimé Césaire’’, apprécie l’avocat.
Parlant de la politique, l'essayiste n’y va pas avec le dos de la cuillère. Pour lui, il y a trop de politique politicienne au Sénégal. Très critique à l’égard des adeptes de cette dernière, il déclame : ‘’Sous nos cieux, la politique brise plutôt les âmes. On ne parle que de politique à longueur de journée. Certains vivent de la politique. Celle-ci fragilise la société tout comme les citoyens. J’essaie d’aborder tout ça en vers libres.’’ Pourquoi la poésie pour dénoncer des phénomènes de société ? "J’essaie de donner de l’énergie à la vérité. C’est le cri d’un militant à ses semblables", rétorque-t-il.
Almamy Mamadou Wane a revisité l'histoire, pour rappeler aux extrêmes droits qui émergent un peu partout en Europe et qui sont contre l’émigration. Il est revenu sur la période pendant laquelle les Italiens, les Espagnols migraient vers la France ‘’pour trouver à manger’’ ou encore les Irlandais en Amérique ‘’pour trouver de la subsistance’’. De l'émigration des Africains vers l'Occident, il pense que "c'est absurde, mais nécessaire". Avant de lancer une alerte : "Ces milliers de jeunes qui tentent de regagner ailleurs, ils auraient pu se retourner contre la société elle-même qui secrète les injustices. Ils ne le font pas encore, mais un jour ils le feront."
Mais malgré toute cette souffrance, tous ces périls qui envahissent l'humanité toute entière, Almamy estime que l’espoir est toujours permis. S’inspirant de Mile Davis, il considère que la poésie sociale est le fait d’utiliser un langage poétique avec le décor politique, pour parler des faits de société. ‘’Ce qui permet, justifie-t-il, de donner une couche militante pour aborder la férocité des terrains politiques’’.
Quant au Pr. Abderrahmane Ngaide, dans le livre, qui s’écrit entre Dakar, Mboumba, Paris et Vienne, il soutient que M. Wane parle de manière poétique de plusieurs personnalités politiques, musicales, artistiques. Il regrette l’étiquette qui est habituellement collée à la poésie. ‘’Les gens, affirme-t-il, pensent que poésie rime avec futilité, avec le sentimental… Je pense que la poésie n’est pas que les sentiments. Elle nous permet également d’aborder des faits de société… C’est pourquoi je considère que les écrivains sont parfois des magiciens’’.
MOR AMAR