Publié le 21 Dec 2019 - 18:36
MARCHE PLACE DE LA NATION

L’annonce des deux marches affaiblit la mobilisation

 

Bon nombre de Sénégalais n’arrivent toujours pas à avaler la  pilule  amère de la hausse du prix de l’électricité. Hier encore, des citoyens ont arpenté les rues, de la place de la Nation au rond-point du Triangle Sud, pour dénoncer cette augmentation et exiger la libération de l’activiste Guy Marius Sagna et Cie.  

 

Dès 15 h 30, des Sénégalais mécontents ont commencé à envahir, par petits groupes, la place de la Nation. Sur les lieux,  ils ont trouvé  un dispositif policier très dense. L’absence des leaders du mouvement Nio Lank, Nio Bagn rappelle à certains, qui suivent la situation à la radio, que la marche était prévue à la place de l’indépendance. Ils prennent alors la direction du centre-ville pour rejoindre les leaders ‘’nio lank’’.

Tandis que d’autres, pensant que la marche est interdite, commencent à retourner chez eux. Un petit groupe, composé en majorité de personnes du 3e âge, de quelques jeunes et de femmes, décide, néanmoins, de rester sur place pour se faire attendre. Le débat était maintenant : faut-il marcher ou non, vu le nombre réduit de participants ? Ça tire ainsi dans tous les sens. Et il a même fallu l’intervention du commissaire en place pour décanter la situation.  En effet, vers 16 h 30, le policier en chef s’est rapproché du petit groupe de manifestants pour leur indiquer que la marche était autorisée et que ses éléments sont prêts pour encadrer le départ.

Ainsi, ces citoyens en colère ont marché de la place de la Nation au rond-point Rts, en scandant ‘’Nio lank, Nio bagn !’’, ‘’Courant bi dafa cher !’’ ou encore ‘’Senelec voleur !’’.

Vêtu d’un blouson bleu assorti à ses chaussures fermées, Thierno Ly se fait remarquer dans la petite foule par son calme.  Au moment où les jeunes et certaines personnes du 3e âge se disputent sur la pertinence de continuer la manifestation en dépit du nombre très réduit de participants, lui se retire du groupe, l’air tout pensif. En l’abordant, il nous indique qu’il est professeur de français et langues étrangères à l’Ucad.  Il dit venir pour poser un acte citoyen et afficher sa solidarité à l’endroit des Sénégalais qui n’ont pas la possibilité de payer l’électricité. ‘’Je crois que tout Sénégalais doit, aujourd’hui, prendre conscience que si l’on laisse passer cette situation, on arrivera à des augmentations dans d’autres secteurs et la vie sera beaucoup plus difficile. Il ne s’agit pas de perturber ou de lancer des pierres.

Il s’agit de marquer notre désapprobation contre la hausse du pouvoir d’achat des Sénégalais. Rappelez-vous qu’avant l’élection présidentielle, le chef de l’Etat avait clairement dit qu’il n’y aura aucune augmentation de l’électricité. Le directeur de la Senelec de l’époque avait aussi soutenu que la société avait fait des bénéfices considérables. On ne comprend donc pas pourquoi, aujourd’hui, il y a eu cette augmentation’’, souligne M. Ly.  A ses yeux, cette décision n’est que la partie visible de l’iceberg, car il y a le prix du carburant qui a augmenté et si l’on ne fait rien, ceux des denrées suivront.  

Toutefois, il estime que le choix de la place de l’Indépendance pour manifester n’est pas intelligent. ‘’Le plus important, c’est que les médias et les réseaux sociaux sachent qu’il y a des gens qui manifestent, quelle que soit le lieu. Le plus important, c’est qu’il y a une masse critique de Sénégalais qui prennent en charge la revendication et non l’itinéraire de la marche’’, souligne-t-il.

Faisant partie des rares femmes qui participaient à la marche d’hier, Ndèye Fatou Sow, venue de Guédiawaye, a dénoncé avec énergie la hausse du prix de l’électricité. ‘’Je suis citoyenne ordinaire, comme le président Macky Sall aime le dire. Je payais l’électricité à 11 000 F. Maintenant, ma facture est à 37 500 F Cfa. Je n’ai pas les moyens de payer, c’est pourquoi je me suis déplacée pour dire non à cette hausse’’, déclare-t-elle d’un ton déterminé.

Outre la hausse de l’électricité, les manifestants ont dénoncé la détention du Pr. Babacar Diop, qui est finalement libéré au moment où l’activiste Guy Marius Sagna est encore retenu. ‘’Nous dénonçons la détention arbitraire de nos camarades étudiants ainsi que celle du Pr. Babacar Diop. L’Etat doit savoir que la place du professeur n’est pas en prison, mais dans les amphithéâtres’’, martèle Mouhamed Mballo, étudiant à la faculté de Droit et membre du mouvement Y en a marre.

Arriver au rond-point de la Rts, les marcheurs se sont d’abord assis pour crier leur colère, avant de désigner Issa Diallo, retraité, apparemment doyen d’âge des manifestants, pour prononcer le discours final. ‘’Nous sommes sortis manifester parce qu’il y a des décisions qui vont à l’encontre du peuple sénégalais. Nous sommes un peuple qui se bat par les arguments. La violence est l’arme des faibles’’, déclare-t-il sous les applaudissements d’adhésion des jeunes. Il ajoute : ‘’La loi est impersonnelle. On ne doit pas autoriser ses partisans de marcher jusqu’au palais et l’interdire aux autres. Il faut libérer les prisonniers.’’ 

Avant de se disperser à 18 h, ces citoyens en colère se sont donné rendez-vous le vendredi prochain à la même place pour dire non, pour la énième fois, à la hausse du prix de l’électricité.  

Le commissaire Cheikh Niang réussit son épreuve

Armés jusqu’aux dents, les hommes du commissaire El Hadj Cheikh Niang ont rendu, hier, inaccessible la place de l’indépendance, durant une bonne partie de l’après-midi.

Si la mission consistait à empêcher l’arrivée des manifestants à la place de l’Indépendance, alors elle a été accomplie. Hier, pour mettre les pieds à la mythique place, c’était la croix et la bannière. Des policiers, armés jusqu’aux dents, ont jalonné tous les coins de rue.

A partir de l’ancienne gare Pompiers, des passagers descendent des véhicules, marchant, pour aller plus vite. Diary Ba, la quarantaine, cherche désespérément un taxi pour rentrer chez elle aux Hlm. Croisée à hauteur de la mairie de Dakar, elle raconte son calvaire : ‘’Moi, je suis sortie de mon lieu de travail plus tôt que d’habitude. C’est pour éviter les lacrymogènes. Mais là, je n’arrive pas à avoir une voiture. Je suis obligée de marcher encore et encore pour trouver une voiture. Je pense que si la manifestation était autorisée et encadrée, il y aurait moins de désagréments. Après tout, c’est juste pour dire non à l’augmentation du prix de l’électricité. Je pense que c’est tout à fait légitime.’’

Pendant ce temps, les hommes du commissaire Dramé semblent bien en place. Avec fermeté, ils dévient tout individu, souhaitant traverser cette allée qui mène directement au lieu interdit. Même les journalistes ne passent pas. La carte de presse n’y fait rien. Ordre est intimé de vider les lieux. Il faut donc faire un long détour pour accéder à l’avenue Ponty. Là aussi, il est impossible de franchir le Rubicond. Ce n’est que vers les coups de 17 h que l’étau s’est un peu desserré, le contrôle moins dense.

Arrivé à la place où devait se tenir les manifs, c’est le grand vide. Hormis quelques dizaines de policiers et des véhicules stationnés un peu partout, rien ne bouge. Plus loin, sur le boulevard de la République, un pick-up de la Lgi. Des barricades sont dressées à hauteur de l’immeuble Breda, comme pour marquer la ligne rouge à ne pas franchir. Un véritable bunker difficilement pénétrable par les manifestants, dont la plupart ont été interpelés sur l’avenue Ponty et au rond-point Sandaga.

Central, bête noire de ténors de la police

Sous le feu des projecteurs depuis 2012, le commissariat central peut, parfois, être faiseur de rois, mais bien souvent, il est le chemin du purgatoire pour beaucoup de commissaires. Avant-hier Arona Sy, hier Mamadou Ndour, aujourd’hui, c’est au tour du brillant El Hadj Cheikh Dramé de gérer ce commissariat plus que sensible. Sous haute pression, du fait du contexte de sa nomination et des menaces du collectif Nio Lànk, l’officier de police a fait son baptême du feu.

Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a bien réussi sa mission principale qui était d’empêcher tout rassemblement à la place de l’Indépendance. Même si la méthode utilisée pose problème.

Ancien commissaire du Point E, ancien chef de la Sûreté urbaine et du commissariat spécial de l’aéroport Blaise Diagne, l’homme était on ne peut plus habitué au bureau douillet. Cette fois, il sera de plus en plus confronté aux dures réalités du terrain. A la Sûreté urbaine (2015-2019), il s’était illustré en mettant hors d’état de nuire beaucoup de gangs. Ses performances avaient été saluées par les populations. Il disait : ‘’Nous voulons rassurer la population. Nous voulons leur dire que quiconque aura accompli ce genre de forfait, sera traqué, arrêté et mis hors d’état de nuire.’’

C’était le 19 juillet, un mois seulement après qu’une bande de malfaiteurs avait semé la panique un peu partout. Un as des enquêtes quasi impossibles, qui a eu à démanteler plusieurs gangs, avant d’être muté à l’aéroport, puis en catastrophe au centre de la capitale. Insigne honneur certes, mais attention : fonction très ingrate. 

MOR AMAR

ABBA BA

 

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