Publié le 11 Feb 2022 - 13:05
JUGE, HIER, POUR EVASION DE PRISON

Baye Modou Fall risque 2 ans de prison ferme

 

Baye Modou Fall, plus connu sous le sobriquet de ‘’Boy Djiné’’, a été appelé, hier, à la barre de la Chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Dakar. En détention préventive depuis neuf ans pour divers délits, le comparant était face aux juges de cette juridiction pour s’expliquer dans l’affaire concernant sa dernière évasion. Au prétoire, Baye Modou Fall n’était pas seul. A ses côtés, il y avait deux de ses amis, en l’occurrence Dame Sy et Cheikh Ndiaye. Mais également trois agents de l’Administration pénitentiaire qui étaient de garde, le soir de l’évasion, Idrissa Diop, Amath Ngom et Djibril Ciss.

 

S’il n’avait pas pris la poudre d’escampette, Baye Modou Fall n’allait pas ajouter un nouveau délit à la liste d’infractions qui lui valent sa détention depuis neuf ans. Hier, l’homme âgé de 32 ans a été appelé à la barre de la Chambre correctionnelle du tribunal de grande Instance de Dakar, pour s’être échappé de la maison d’arrêt et de correction du Camp pénal. Baye Modou Fall, qui a fait les choux gras de la presse du fait de ses évasions spectaculaires, mérite et traine, depuis des années, le sobriquet de ‘’Boy Djiné’’.

D’ailleurs, sa dernière prouesse a fait trembler l’Administration pénitentiaire. Le directeur du Camp pénal a été relevé de ses fonctions et trois agents pénitentiaires, Idrissa Diop, Amath Ngom et Djibril Ciss, ont été arrêtés. Dans sa chute, Baye Modou Fall a aussi entrainé deux de ses amis : Cheikh Ndiaye et Dame Sy. Tour à tour, Boy Djiné et ses co-prévenus, qui faisaient face aux juges du tribunal correctionnel, se sont défendus sur les faits qui leur ont valu leur comparution.

Baye Modou Fall retrace le film de son évasion

Premier à prendre la parole, Baye Modou Fall, poursuivi pour association de malfaiteurs et évasion, a contesté le premier chef et plaidé coupable pour le second. ‘’Je me suis évadé, mais je n’en ai parlé ni avec mes coprévenus ni avec les gardes. Ça m’est juste arrivé par hasard’’, dit-il.

Sur le film de son évasion, Boy Djiné détaille : ‘’Ça m’est juste arrivé par hasard. Je faisais une grève de la faim pour dénoncer ma longue détention préventive. J’étais enfermé dans une cellule isolée. Je suis sorti par la fenêtre. Mon codétenu Demba Sow était en train de dormir. La fenêtre était en grille et il y avait deux barreaux devant. C’est un détenu déficient mental, qui tentait de s’évader, qui avait brisé une barre. Les grilles n’étaient pas cimentées. Quand je suis passé par la fenêtre, je me suis retrouvé dans la cour. Je suis sorti par une porte qui n’était pas fermée, en profitant du sommeil des agents préposés à la garde. En effet, à cause de la sonnerie qui ne fonctionnait plus, cette porte était souvent ouverte.’’ Se voulant plus précis, il a ajouté : ‘’Je me suis évadé à 1 h du matin, mais je les ai entendus dire à 5 h.’’

Le prévenu, affaibli par ses grèves de la faim répétitives, avoue à la barre qu’il regrette son acte. Surtout, dit-il, le fait d’avoir entrainé ses amis Dame Sy et Cheikh Ndiaye dans cette affaire.

Les agents pénitentiaires le contredisent et dénoncent leurs conditions de travail difficiles

Après le célèbre détenu, les agents pénitentiaires, qui ont comparu libres, ont réfuté les allégations de Baye Modou Fall. Djibril Ciss, l’agent qui a découvert en premier l'évasion, renseigne que la grille d’aération de la cellule de Boy Djiné avait été sciée. ‘’Quand il est sorti de cellule, il s’est retrouvé dans la cour où il y avait une corde qui avait plusieurs nœuds et qui était attachée au poteau qui se trouvait dehors. C’est avec cette corde qu’il a escaladé le mur de la prison’’, a expliqué l’agent pénitentiaire qui a décrié leurs conditions précaires de travail.

Poursuivi au même titre que ses collègues qui étaient de garde au moment de l’évasion, pour entrave à l’action de la justice, il a pesté : ‘’Nous sommes censés être dans une prison de haute sécurité. Mais nous ne sommes pas dotés de caméras de surveillance. Je n’ai aucun rapport amical avec Baye Modou Fall.’’ Ses déclarations ont été confortées par ses collègues.

Cheikh Ndiaye : ‘’Je ne pouvais pas le dénoncer ; il est comme un frère pour moi’’

S’agissant des amis de Baye Modou Fall attraits à la barre pour association de malfaiteurs et recel de malfaiteurs, ils se sont dédouanés. Selon Cheikh Ndiaye, Baye Modou Fall l’a contacté, après son évasion. ‘’C’est quand il est sorti qu’il m’a appelé pour me demander de le rejoindre à Mermoz. Il m’a par la suite dit qu’il avait besoin d’un téléphone portable. Sur ces entrefaites, je suis allé lui en acheter un à Colobane, auprès d’un de mes amis, à 27 mille francs Cfa’’, a déclaré Cheikh Ndiaye. Il précise aussi n’avoir appris l’évasion de son ami qu’après son interview.

Dame Sy a, lui, renseigné que Baye Modou Fall et Cheikh Ndiaye sont venus le rejoindre à l’hôtel Radisson où il logeait durant ses vacances. ‘’Je ne pouvais pas le dénoncer, encore moins le renvoyer, car il m’a rendu un énorme service. De plus, il est comme un frère pour moi. J’avoue que je lui ai donné la somme de 250 mille francs Cfa, car je croyais qu’en le faisant, il allait partir. Mais, contre toute attente, il a changé d’avis et a décidé de dormir à l’hôtel. C’est plus tard qu’il m’a fait part de son souhait de quitter le pays. Il m’a ainsi emprunté ma voiture pour effectuer ce voyage, mais j’ai refusé de leur laisser mon véhicule. C’est la raison pour laquelle je suis parti avec lui et Cheikh’’, relate Dame Sy.

A en croire ce dernier, il a même dû annuler son billet d’avion pour son retour en Côte d’Ivoire. ‘’Baye Modou conduisait ma moto, tandis que Cheikh et moi étions dans la voiture. Malheureusement, on a été aperçu à Tambacounda où on a été arrêté’’, a poursuivi Dame Sy qui précise qu’il n’était que de passage à Dakar, car résidant en Côte d’Ivoire où il détient une boite de nuit.

Le parquet requiert deux ans ferme d’emprisonnement contre Baye Modou Fall

Dans son réquisitoire, le représentant du ministère public a soutenu que les chefs qui sont reprochés à Baye Modou Fall et à ses amis ne souffrent d’aucun doute. A cet effet, il a requis deux ans de prison contre Baye Modou Fall qu’il décrit comme un individu très futé. ‘’Il est dans une prison de haute sécurité. C’est un élément difficile à gérer dans une prison. De plus, il connaît très bien la procédure’’. En ce qui concerne ses amis, le parquet a demandé qu’ils soient condamnés à six mois assortis du sursis. S’agissant des gardes pénitentiaires, même si le maitre des poursuites estime qu’ils peuvent être relaxés du délit d’association de malfaiteurs, il trouve qu’ils ne peuvent pas être exemptés de peine. Car, à son avis, ils ont fait preuve de négligence. Il a requis six mois assortis du sursis contre eux.

Réquisitoire qui n’a pas été du goût des avocats des agents pénitentiaires. En effet, selon Me Cheikh Sy, sur ce qui est ressorti du dossier, on pouvait leur épargner leur comparution. ‘’On parle de complicité, mais l’accusation n’a établi aucun élément qui permet d’asseoir leur implication dans cette affaire. Ces agents travaillent dans des conditions très difficiles. Ils sont constamment en sous-effectif’’, s’est offusquée la robe noire qui a sollicité la relaxe pure et simple de ses clients.

Son confrère Me Ameth Sall de renchérir : ‘’Le métier des agents pénitentiaires est le métier le plus ingrat, après celui des enseignants. Dans cette affaire, on confond culpabilité et responsabilité. Ces personnes exercent un métier pénible et dans des conditions très difficiles.’’ Quant à Me Ousseynou Ngom, il a mis l’accent sur le parcours professionnel sans-faute de ses clients qui ont servi dans l’Administration pendant 18 ans et 17 ans.  ‘’Ils ont fait correctement leur travail. Ils sont moins de 10 personnes à garder cette prison de haute sécurité. Les autorités se sont empressées de mettre en place des caméras de surveillance, après l’évasion de Boy Djiné’’, a martelé la robe noire. 

De son côté, Me Ndiaga Dabo a apprécié le réquisitoire du parquet. Constitué pour Dame Sy, il a néanmoins précisé : ‘’Aucun élément ne permet d’asseoir que Dame Sy a posé un acte en ce qui concerne l’évasion. Il a une boîte de nuit qu’il gère lui-même à Abidjan. Il a les moyens de loger dans un hôtel. Les relations qui lient ces deux hommes sont explicables. Baye Modou lui a une fois rendu service.’’ Il a ensuite demandé la relaxe pure et simple de son client à titre principal et sa relaxe au bénéfice du doute à titre subsidiaire.

Pour sa part, Me Ibrahima Mbengue, avocat de Cheikh Ndiaye, a soutenu que son client n’a pas entravé l’action de la justice. Car, selon lui, son client n’a pas commis un délit, en rencontrant Baye Modou Fall. A l’instar de ses confrères, il a demandé la relaxe de son client.

Me Doudou Ndoye : ‘’Il ne va plus s’évader. (…) Il va être accompagné et aidé’’

A leur tour, les conseils de Baye Modou Fall, Mes Abdoulaye Tall et Doudou Ndoye sont restés formels : le délit d’évasion n’est pas établi à l’endroit de leur client. ‘’Dans cette affaire, il n’y a pas d’évasion, car il n’y a pas eu de violence, encore moins de bris de prison. Je ne sais pas s’il y a négligence ou pas’’, a relevé Me Tall. A l’en croire, dans cette affaire, il y a eu un seul fait : Baye Modou qui était dans une prison de haute sécurité s’est retrouvé dehors. ‘’Il s’est retrouvé dehors et il a donné des explications. Qu’est-ce qui démontre que Baye Modou Fall a cisaillé les grilles ? Où est la scie ? La corde ? Il a trouvé les gardes en train de dormir et il est parti’’, a tonné l’avocat.

Faisant parler sa fibre paternelle, Me Doudou Ndoye, qui dit considérer le prévenu comme son fils, s’est penché sur le vécu tumultueux de celui-ci. En effet, ayant flirté avec les affres de l’incarcération très jeune (16 ans), l’avocat affirme que son client était à la recherche de repères. De l’avis de Me Ndoye, Boy Djiné est détenu injustement. ‘’Il a été jugé à Dakar en 2017 pour des faits qualifiés de criminels. La chambre criminelle a ordonné l’annulation de la procédure. Il devait être libéré. Le parquet le convoque une nouvelle fois pour les mêmes faits. Il est victime d’injustice’’, a plaidé Me Doudou Ndoye.

Sur l’évasion de son client, il rassure : ‘’Cette affaire ne mérite pas autant de passion. Il ne va plus s’évader. Je le vois comme un fils, car il m’appelle papa. Il va être accompagné et aidé. Il est en détention provisoire depuis neuf ans pour une affaire de vol qui a eu lieu à Mbour. Il ne perturbera plus l’ordre public. Il a appris à m’écouter.’’

Ils ont sollicité une application bienveillante de la loi pour leur client.

L’affaire mise en délibéré, la décision sera rendue le 23 février prochain.

MAGUETTE NDAO

Section: 
SAINT-LOUIS : ALERTE DE LA MÉTÉO SUR DE FORTES HOULES : Les pêcheurs de la Langue de Barbarie restent au quai
PROJET DE LOI SUR LA SOUVERAINETÉ ÉCONOMIQUE : Sonko va rencontrer les industriels et les opérateurs économiques
LEVÉE DE L'IMMUNITÉ PARLEMENTAIRE DE FARBA NGOM : Les avocats dénoncent une procédure inéquitable
Réseau des anciens jécistes d’Afrique
RAPPEL A DIEU DE MADIOR DIOUF : Une grande figure politique et intellectuelle s’éteint
Distinction pour le dr Massamba Diop
Saisie de chanvre indien
Tas de retour de Déguembéré
CONSEIL DES DIFFUSEURS ET ÉDITEURS DE PRESSE DU SÉNÉGAL (CDEPS) : Mamadou Ibra Kane et Cie dénoncent la situation ‘’alarmante’’ de la presse
PROJET BEST - 1 000 LOCALITÉS SÉNÉGALAISES À ÉLECTRIFIER : Près de 130 millions de dollars réservés pour le Sénégal
ÉLARGI DE PRISON LE 31 DÉCEMBRE DERNIER : M. Diongue s’introduit tout nu dans la chambre d’une dame
ACCUSÉ DE VIOL PAR DEUX JEUNES DAMES : Mouhamed Sylla encourt 10 ans de réclusion criminelle
AFFAIRE DU SUPPORTER DE L'ASC FARBA TUÉ AVANT-HIER : La police de Yeumbeul-Sud a mis la main sur trois suspects
Saisie produits forestiers
L’AEME
Suspension importation oignon
Affaire Riu Baobab
LYNCHÉ PAR DES SUPPORTERS DE L’ÉQUIPE DE NATANGUÉ : Un supporter de l’ASC Farba succombe à ses blessures
CONFÉRENCE DES ADMINISTRATEURS ET MANAGERS : L'IGE décrit la bamboula
BILAN 2024 COMMISSARIAT DE YEUMBEUL : Deux mille cinq cent quatre-vingt-deux personnes interpellées