Indignation à géométrie variable !
Lorsqu’il s’agit des populations affectées par la guerre en Ukraine, l’Europe fait preuve d’une bienveillance inhabituelle. Les images qui ont défilé sur les chaînes de télévision des mois durant, montrent une mobilisation non seulement des États qui accueillent des migrants à bras ouverts, mais aussi une forte implication des populations. Rien de bien insolite dans tout cela. Disons même qu’il est tout fait normal que secours soient portés aux civils ukrainiens lorsque la guerre impose sa loi d’acier à des populations qui ne peuvent pas se défendre contre l’agression russe.
Mais comment comprendre que ces mêmes populations soient réfractaires à accueillir d’autres migrants venus d’Afrique ? Qu’est-ce qui peut expliquer ce ‘’deux poids, deux mesures’’ surtout lorsqu’on sait que la plupart des jeunes qui quittent leur pays ne viennent pas en tourisme en Europe, mais plutôt pour eux aussi fuir des guerres, ou pire encore, échapper aux griffes de régimes dictatoriaux bien souvent soutenus par ces mêmes pays européens qui refusent d’assumer leurs responsabilités lorsque leurs intérêts sont en jeu ? Les images qui ont défilé ce week-end sur les chaînes de télévision du monde et sur Internet, évoquant plus de 20 morts (un bilan qui risque de doubler) dans l’enclave espagnole de Melilla, sont tout simplement scandaleuses.
Elles impliquent à la fois la responsabilité d’un État africain - le Maroc en l’occurrence - et celle de l’Espagne. Face à ce drame, le Premier ministre espagnol Pedro Sànchez n’a rien eu de mieux à dire que de qualifier ceci d'"assaut (...) violent et organisé de la part de mafias qui se livrent au trafic d'êtres humains contre une ville qui est un territoire espagnol". Et que "par conséquent, il s'est agi d'une attaque contre l'intégrité territoriale de notre pays". Le chef du gouvernement espagnol a également souligné que "la gendarmerie marocaine avait travaillé en coordination avec les forces de sécurité (espagnoles) pour repousser cet assaut si violent dont nous avons été témoins", selon le compte-rendu fait par ‘’Le Monde’’. Et évacue toute responsabilité en pointant du doigt ‘’des mafias qui se livrent au trafic d'êtres humains".
Une explication trop facile qui ne saurait justifier le nombre de morts ? Ce durcissement de la répression trouve son explication ailleurs. Elle est la conséquence de la politique de fer menée par le gouvernement espagnol, en complicité avec les autorités marocaines. Ce bain de sang n’est-il pas la conséquence du new deal entre l’Espagne et le Maroc, pour une répression plus féroce des migrants, maintenant que Madrid renonce à tout soutien en faveur du Front Polisario ?
Ce qui reste constant, c’est qu’on se soucie très peu du sort des migrants lorsqu’ils ont la peau noire. On les préfère morts plutôt que dans l’espace Schengen. Cela porte un nom : ça s’appelle racisme.