Publié le 8 Nov 2023 - 14:03
BEN BOURGEL, AMBASSADEUR D’ISRAËL, SUR LA GUERRE A GAZA

‘’Nous ne sommes pas initiateurs, nous n’en voulons pas, mais nous n’avons pas le choix’’

 

Malgré les atrocités de la guerre sur les populations civiles, le diplomate israélien, dont le gouvernement avait quitté la bande de Gaza depuis 2005, estime que pour sa sécurité, Israël doit mettre le Hamas hors d’état de nuire.

 

Un mois est passé, depuis le 7 octobre 2023, jour de l’attaque sanglante du Hamas en Israël. Face à l’ampleur sans précédent de cette percée de l’organisation armée, la réplique israélienne est en pleine intensification de son offensive terrestre. L'armée israélienne a affirmé mardi avoir encerclé la ville de Gaza, divisant l'enclave assiégée en deux : Gaza nord et Gaza sud. Des habitants fuyant la ville ont déclaré à l’AFP avoir vu des chars en position pour la prendre d'assaut.

Alors que les ramifications de ce conflit à la portée  internationale commencent  à toucher Dakar, l’ambassadeur d’Israël au Sénégal s’est exprimé sur cette guerre qui s’enlise dans une impasse.

Selon Ben Bourgel, qui s’est exprimé lors d’une rencontre avec des journalistes, dans cette nouvelle guerre, ‘’nous ne sommes pas les initiateurs, nous n’en voulons pas, mais nous n’avons pas le choix’’.

Depuis le 7 octobre, plus de 1 400 Israéliens ont été tués, dont 341 soldats. L'armée israélienne fait état de 240 otages aux mains du Hamas. ‘’Des méthodes barbares ont été utilisées pour porter atteinte à nos citoyens. Et parmi les victimes, il y a des juifs, des musulmans, des chrétiens. Depuis un mois, nous devons mener une guerre que nous avons ni voulue ni initiée contre le Hamas pour pouvoir mettre  un terme à la menace qui pèse sur nos populations, mais aussi sur les populations de Gaza qui sont des otages du Hamas dans la région’’, déplore le représentant de l’État hébreu.

Un conflit sans précédent

Dans ce conflit, symbole des relations tumultueuses depuis plus d’un demi-siècle entre Israël et les Palestiniens, la situation n’a jamais atteint un tel degré de violence. Les attaques du 7 octobre ont touché 30 villages israéliens et les victimes répertoriées concernent, selon les chiffres communiqués par le gouvernement israélien, 41 nationalités.  De plus, l’armée israélienne compte entre 200 et 300 personnes dont on ne connaît pas le sort (morts ou kidnappés), de même que plus de 250 000 déplacés.

De l’autre côté, le ministère de la Santé du Hamas palestinien a annoncé mardi que le bilan des bombardements israéliens dans la bande de Gaza avait atteint les 10 328 morts depuis le début de la guerre le 7 octobre, dont 4 237 enfants. Assez pour pousser le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, à lancer un énième coup de gueule : ‘’Gaza devient un cimetière pour les enfants.’’

‘’C’est toute la tragédie’’, reconnaît Ben Bourgel. ‘’Nous déplorons tous les civils qui meurent, qu’ils soient palestiniens ou israéliens. Nous devons nous défendre contre un ennemi qui utilise les populations civiles comme bouclier humain, soit parce que leurs positions sont complètement intégrées dans des installations civiles (des écoles, des mosquées, des hôpitaux, etc.) soit parce que leurs actions offensives sont menées contre nos populations civiles’’, ajoute l’ambassadeur israélien.

Malgré l’horreur des deux côtés, la posture est claire : il faut détruire les capacités militaires du Hamas.   

Un cessez-le-feu encore difficile à obtenir

Hier, 18 agences des Nations Unies ont réclamé un ‘’cessez-le-feu humanitaire immédiat à Gaza’’ où 88 membres de leur personnel ont été tués depuis le début de la guerre, avec ce message : ‘’Trop c'est trop, ceci doit cesser maintenant.’’

Mais cela est loin d’être acquis. Au cours d'un entretien accordé à la chaîne américaine ABC News, le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, a assuré qu’il ‘’n'y aura pas de cessez-le-feu général à Gaza sans la libération de nos otages. En ce qui concerne des petites pauses tactiques, une heure par-ci, une heure par-là, nous en avons déjà eu, je suppose, pour vérifier les circonstances permettant aux marchandises et aux biens humanitaires d'entrer ou aux otages de partir’’.

Cette position a été réaffirmée par son représentant au Sénégal. Ben Bourgel rappelle qu’Israël a ‘’toujours été constant dans son engagement vis-à-vis de la coexistence’’, insistant sur le fait qu’aujourd’hui, ‘’au vu des attaques qui ont été portées contre nous, il faut d’abord rétablir la sécurité de nos populations. On ne peut pas envisager de mesures qui puissent renforcer le Hamas dans ses capacités offensives et que nos otages restent sur place’’.

Des centaines de Sénégalais se sont rassemblés, samedi dernier à Dakar, pour protester contre les bombardements de l'armée israélienne à Gaza. Certains manifestants ont réclamé le départ de l’ambassadeur et la rupture des relations diplomatiques avec Israël. Toutefois, Ben Bourgel se félicite que le Sénégal ait ‘’sa position constante dans son engagement pour la cause palestinienne d’un côté et pour la paix entre Israël et ses voisins palestiniens de l’autre’’.  

Le Sénégal, inspirateur d’une coexistence pacifique  

D’ailleurs, le diplomate assure que son pays cherche à s’inspirer du Sénégal où l’on constate une coexistence entre les différentes communautés. ‘’Dans le cadre de notre coopération, ajoute-t-il, nous avons une composante du dialogue interreligieux qui se base sur le retour à nos racines abrahamiques à tous et sur des échanges de pratiques. L’an dernier, le chef de la communauté druze (Cheikh Muafek Tarif, en visite au Sénégal en décembre 2022, une première en Afrique) a présenté les mécanismes de coexistence qui existent entre les différentes communautés religieuses. Il est reparti du Sénégal avec beaucoup d’espoir pour l’avenir, voyant l’expérience sénégalaise comme un exemple’’.  

Alors que la guerre fait rage dans la bande de Gaza, un autre front menace de s’ouvrir au nord d’Israël où le Hezbollah libanais a ses roquettes braquées sur l'État hébreu. Le discours de son leader charismatique Hassan Nasrallah, vendredi prochain, est très attendu sur les actions à venir du tout-puissant mouvement islamiste chiite. D’autres menaces dans la région font qu’Israël surveille, dans l’immédiat, l’Iran, la Syrie, les Houthis au Yémen, etc.

C’est fort de cela que l’ambassadeur Bourgel invite la communauté internationale et le Sénégal à œuvrer afin d’éviter un élargissement régional du conflit qui ne profiterait à personne.

Lamine Diouf

 

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