Les compagnies BP et Kosmos vilipendées
Les membres de l'Association des pêcheurs artisanaux à la ligne de Saint-Louis sont très remontés contre BP et Kosmos. Plusieurs centaines de jeunes pêcheurs guet-ndariens sont descendus sur la plage de Goxu Mbacc pour fustiger l'impact négatif de l'exploitation du gaz sur leur activité. Ainsi, ils exigent de BP l'arrêt immédiat de la pollution marine et une compensation financière pour tous les dommages subis.
La plage de Goxu Mbacc n'a pas été choisie par hasard pour abriter la manifestation des pêcheurs artisanaux de Saint-Louis. Pour le président de la commission environnement de l'Association des pêcheurs artisanaux à la ligne de Saint-Louis, Mamadou Sarr, le lieu est symbolique pour plusieurs raisons.
”Là où se tient le point de presse, se trouve, juste en face, à quelques kilomètres, une plateforme gazière dont les exploitants n'ont même pas la courtoisie de venir discuter avec les pêcheurs. Ce rassemblement est un sentiment de désarroi, d'injustice sociale, de colère et d'indignation. Nous savons tous que l'exploitation du gaz à Saint-Louis a un impact réel sur l'activité de la pêche et sur nos vies. Nous sommes des pêcheurs et notre seule source de revenus est la mer. Nous savons ce que représente la pêche dans ce pays, plus particulièrement à Saint-Louis. Nous savons ce que la pêche engrange comme emplois et génère comme recettes économiques. Donc, nous ne demandons rien à personne, sinon que du respect et de la protection pour notre secteur”, a râlé Mamadou Sarr.
Pour le responsable des pêcheurs artisanaux de Saint-Louis, en dehors de l'interdiction de pêche dans la zone de Diatara, BP pollue en silence les eaux maritimes sénégalaises et détruit la faune et la flore sans qu’on ne le dénonce.
”Malheureusement, des étrangers, avec l'autorisation de nos autorités, polluent dangereusement la mer et elles ferment l'œil. Depuis dix ans, pour exploiter le gaz, BP et Kosmos sont en train de créer une catastrophe écologique au vu et au su de tout le monde. Pourtant, le plus petit doigt n’a jamais été levé par nos hautes autorités. Les compagnies gazières nous ont porté préjudice et malheureusement, BP ne veut pas qu'on en parle. C'est peine perdue, parce que nous allons le dénoncer partout. Avoir le gaz, c'est bien, mais il faut aussi savoir que BP a causé d'énormes dégâts écologiques dans d'autres pays. Si jamais cela arrive à Saint-Louis, c’est nous, les populations de la langue de Barbarie, qui allons déguerpir. Raison pour laquelle il faut alerter et lutter pour que les intérêts des pêcheurs soient préservés. Parce que nous ne connaissons que la pêche et nous ne ferons que la pêche. Maintenant, il y a toujours des moments où il faut savoir arrêter”, a déclaré M. Sarr.
Les acteurs crachent sur la RSE de BP
Très remonté contre les compagnies gazières, le porte-parole du jour des manifestants invite les responsables de BP et de Kosmos à cesser leurs mensonges et manipulations auprès de populations locales. “BP nous a posé un tort ineffable. Elle nous a volé l'un des récifs les plus poissonneux du Sénégal, Diatara. Qu'est-ce qui empêche les compagnies BP et Kosmos de venir parler avec les acteurs locaux ? Qu'ils nous respectent. Depuis deux ans, BP a commandité des études pour l'érection de récifs artificiels. Elles ont été réalisées, mais classées sans suite dans les tiroirs. Pourquoi ? Cela démontre que les compagnies BP et Kosmos avec qui nous avons affaire n'ont aucun respect pour nous. Raison pour laquelle nous demandons qu'à défaut de la zone de Diatara, qu'elles nous proposent des récifs artificiels pour nous permettre de continuer dignement notre activité. Si elles le désirent, c'est bien possible”, a soutenu le président de la commission environnement de l'Association des pêcheurs artisanaux de Saint-Louis, avant de cracher sur la politique RSE que BP investit dans la langue de Barbarie. Pour les pêcheurs artisanaux, la RSE crée plus de problèmes qu’elle n’en règle.
“La fameuse politique RSE de BP ne nous ébranle pas. D'ailleurs, les modiques sommes injectées dans la langue de Barbarie n'ont fait que diviser la communauté plus qu'autre chose. À maintes reprises, on leur a dit que nous ne voulions pas de leur politique RSE, parce que ce n'est pas du sérieux. Cette politique de BP n'a réglé aucun problème de la langue de Barbarie. Pourtant, Dieu sait qu’il y en a beaucoup”, a-t-il fustigé.
Pour les pêcheurs manifestants, trop c'est trop ! Il faut que des solutions alternatives soient trouvées à leur secteur fort impacté. “Nous réclamons une compensation financière, parce que les exploitants nous ont ôté le pain de la bouche. Nous sommes des pêcheurs. Donc, quand des activités d'une quelconque entreprise impactent la pêche, nous devons être compensés du manque à gagner. Aujourd'hui, sur les côtes saint-louisiennes, la ressource halieutique est rare et nos familles sont dans la précarité, parce que la pêche est à l'agonie, sans aucune assistance”, a déclaré Mamadou Sarr.
Ainsi, pour tenir à témoin l'opinion publique nationale et internationale, les pêcheurs artisanaux de Saint-Louis lancent un appel au président de la République Bassirou Diomaye Faye pour la réparation de ces injustices.
IBRAHIMA BOCAR SENE (SAINT-LOUIS)