L'anarchie dans la gestion des Agences
Note salée pour les agences nationales. ''De nombreux organismes publics autonomes ne transmettent pas leurs rapports budgétaires à l'administration centrale''. C'est ce qui ressort du rapport 2011 du Public Expenditure and Financial Accountability (PEFA), cadre de mesure de performance de la gestion des finances publiques de la période 2008-2010.
En effet, abordant la question de l'exhaustivité de la documentation sur les informations budgétaires et la transparence dans l'exécution du budget national, le rapport renseigne qu'en ce qui concerne les agences nationales, ces ''établissements autonomes relevant du régime de la comptabilité publique, le contrôle a priori de la dépense par le contrôleur des opérations financières ne se fait pas''.
Une prérogative pourtant réservée au ministère des Finances, dans la mesure où il est en charge de l'encadrement et du suivi des risques budgétaires et financiers. En réalité, ''les services du ministère en charge des finances éprouvent des difficultés à collecter les données pouvant servir à l'élaboration de synthèses consolidées de leurs recettes et dépenses budgétaires ou leurs situations financières'', relève le document.
De fait, les services du ministre d’État Abdoulaye Diop ne parviennent pas à centraliser les informations de suivi et les données nécessaires aux bilans annuels. Car, révèle le PEFA 2011, ''les textes régissant ces établissements ne précisent pas toujours le sens de la tutelle financière qu'elles attribuent au ministre en charge des finances''. Alors que, curieusement, ''ces mêmes lois attribuent au Contrôle financier, service dépendant de la Présidence de la République, un rôle prépondérant en la matière'', note le rapport qui juge cette situation ''dommageable''.
Le document souligne ainsi ''la diversité des statuts'' de ces établissements autonomes dont ''l'essentiel des ressources ne provient pas de la rémunération de leurs activités, mais provient de subventions de l’État ou de prêts rétrocédés par l’État''. Ayant constaté que les agences manipulent pour l'essentiel des deniers publics, le PEFA indique que ''leur mode de gestion devrait plutôt relever de la comptabilité publique''.
Flou juridique autour du régime comptable
Le rapport rappelle certes que ''les autorités ont entrepris la clarification des situations avec l'adoption en 2009 de la Loi d'orientation sur les agences d'exécution (Loi n°2009-20)''. Cependant, là où le bât blesse, c'est que ''la loi laisse la possibilité, au moment de la création de l'agence, du choix du référentiel comptable applicable ainsi que les modalités de gestion financière et comptable''. En 2010, une circulaire du Premier ministre a été prise pour organiser le suivi des budgets et de la trésorerie des agences d'exécution.
Ainsi, il a été procédé à "la nomination de comptables publics auprès des agences pour veiller à la bonne gestion des deniers publics (...) redevables devant le juge des comptes". Toutefois, cette décision risque d'être ''de portée limitée'', prévient le rapport. Dans la mesure où, estime le PEFA, c'est le régime comptable auquel sont soumises les agences qui est en cause. Le rapport indique qu'elles doivent relever du Règlement général de la comptabilité publique (RGCP). ''Le comptable public s'impose, indique le rapport, et elles (les agences) doivent établir un budget dont l'exécution est soumise à tous les contrôles réglementaires, y compris celui du Contrôle des Opérations Financières (contrôle préalable)''.
Pas d'avancées significatives entre 2007 et 2011
Cette exercice n'est pas nouvelle, le Sénégal a procédé en 2007 à sa première évaluation du système de gestion des finances publiques. Celle-ci avait permis d'en faire l'état des lieux et de déterminer les objectifs et priorités inscrits dans le programme de réformes (PRBF) pour la période 2009-2012, adopté en 2008.
Ainsi, la présente évaluation a permis de ''mesurer les progrès accomplis depuis l'état des lieux 2007, dans l'amélioration des performances du système de gestion des finances publiques au Sénégal''. Et sur ''les 28 indicateurs de haut niveau qui mesurent les performances du système national, 15 ont une note identique à celle attribuée en 2007, 7 ont une note plus élevée et 5 une note moins élevée''. Le rapport ajoute également que ''sur les cinq indicateurs dont la note 2011 est inférieure à celle de 2007, un seul correspond à une régression effective de la performance. Les autres baisses ne s'expliquent que par des divergences dans la méthode de notation''.
Le PEFA fait aussi savoir que ''parmi les indicateurs dont la note n'a pas évolué, un bon nombre se rapportent à des domaines où des progrès ont été réalisés, mais ne permettent pas encore de justifier l'amélioration de la note globale''.
573 milliards de dette du secteur parapublic
Sur un autre registre le PEFA a fait un état des lieux sur l'endettement des entreprises du secteur parapublic à fin 2009. Les chiffres ont été obtenus d'une direction du secteur parapublic nouvellement créée au sein de la Direction générale de la Comptabilité publique et du Trésor (DGCPT).
Dans le document figure uniquement les entreprises ayant une dette supérieure à cinq milliards. ''Elles sont au nombre de sept et le total de leur dette est évalué à 573 milliards, dont 317 milliards (soit 33 % du total des bilans) de dettes non financières'', renseigne le rapport. Dans le détail, le PEFA indique que ces entreprises doivent 100,8 milliards aux fournisseurs, 52,6 milliards de dettes fiscales et 15,4 milliards de découverts bancaires.
Le rapport révèle que ''la compagnie d'électricité Sénélec est redevable de plus de la moitié de ces dettes'' et conclut qu'elles ''représentent de gros risques financiers et budgétaires pour l’État''.
Gaston COLY