Aux annonces, succèdent les inquiétudes
Des promesses du candidat devenu président de la République à l’endroit des acteurs culturels, on se tue à en chercher les réalisations…
''Du 1er tour de la présidentielle au deuxième tour et au moment où je vous parle, je n'ai pas entendu le Président parler de la Culture''. C'est le sentiment de l'écrivain et éditeur Elie Charles Moreau. En effet, Macky Sall avait peu, ou presque, parlé de culture pendant sa campagne électorale, même si dans le programme Yoonu Yokkute, des projets assimilés par certains à des éléments de langage étaient associés à ce secteur.
Les grandes lignes des «ambitions» du pouvoir sont : une promesse d'allocation de 5% du budget de l’État à la Culture et au Sport (ce qui n’a pas été fait dans le budget 2013), la mise en place d'une protection maladie pour tous les artistes, la création d’une société de gestion collective et la promotion de la diversité culturelle. A ce jour, la société de gestion en question est à l’état de rêve, mais le second ministre de la Culture depuis avril 2012, Abdou Aziz Mbaye, en a promis la concrétisation pour l’année en cours, lors d’une conférence de presse. A cette occasion, il a également annoncé un programme réservé à la promotion des cultures, qui a d’ailleurs été entamé à Ziguinchor. Pour la protection médicale des artistes, on attend de voir…
Interrogés sur la gestion de la chose culturelle lors de cette première année de gestion, des acteurs culturels expriment des sentiments divers. Lamine, acteur et comédien, estime que «des choses» sont en train d'être faites, comme le soutient le rappeur Daddy Bibson. Ce dernier se dit quand même déçu par la lenteur notée dans la mise sur pied de la société de gestion collective et du Bureau pour la culture urbaine. Par contre, il est ravi par le soutien du ministère aux acteurs des arts urbains.
Après le Fespaco et la razzia sénégalaise, un soutien plus conséquent a été promis aux cinéastes par le président de la République. L'alimentation du fonds de soutien à l'industrie cinématographique ainsi que l'application de décrets de lois datant du premier mandat de Wade ont ainsi été projetés. ''Des promesses ont été faites et j'attends'', se contente de dire Mansour Sora Wade. Mais sans les distinctions rapportées de Ouagadougou, tout cela aurait-il été dit et promis ?
«Sus aux paramètres occidentaux»
Plus critique, Elie Charles Moreau déclare : ''Je n'ai pas de satisfaction, j'ai plutôt des inquiétudes''. On met la charrue avant les bœufs suivant son analyse. ''Je ne veux pas désespérer les espérances de tous ceux qui tournent autour du sang culturel, mais on ne peut pas développer la culture à partir de paramètres occidentaux. On ne peut pas parler de livres numériques alors qu'on n’arrive même à assurer une bonne promotion des livres qui coûtent 2 000 francs Cfa, s’insurge le patron des éditions Le Nègre international. «Une liseuse pour les livres numériques coûte 200 mille francs Cfa'', a-t-il averti.
''On ne peut parler d'industrie culturelle alors qu'on ne soutient pas les éditeurs qui n'ont pas de logistiques'', a-t-il martelé. Donc, ''il y a des préalables à toutes ces choses dont le renforcement des capacités des acteurs culturels. Le ministre va plus vite que la musique'', a-t-il conclu. Avec cette conviction : «Macky Sall peut faire mieux que Wade, Diouf et Senghor réunis dans le domaine de la culture…» Entre l’ancien et le nouveau régime, la ligne de convergence pourrait être l’instabilité chronique à la tête du ministère. Wade en avait grillé une bonne demi-douzaine en 12 ans. Macky Sall en était déjà à 2 après sept mois seulement.
BIGUÉ BOB
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