Réflexions sur le triptyque : eau, paix et sécurité alimentaire au Sénégal et en Afrique
A l’occasion de l’avènement du 9eme Forum mondial de l’EAU organisé cette année au Sénégal, l’idée m’est venue de produire cette humble contribution, pour servir de brique à l’édification du grand mur de la construction des solutions concernant la problématique de l’eau dans le monde.
Le présent document est une simple réflexion sur le triptyque : « Eau, paix et Sécurité alimentaire au Sénégal et en Afrique ».
Il est une évidence qu’il n’est point de développent sans paix et sécurité. Ainsi, la sécurité alimentaire, ou même la souveraineté alimentaire au mieux, ne pourront être réalisées que dans la paix et la disponibilité en eau aussi bien pour la consommation humaine et animale, que pour l’agriculture, l’industrie, l’énergie et les autres utilisations du liquide précieux.
C’est là qu’il convient de mettre en évidence l’importance de l’eau pour l’homme et l’intérêt de la création du Conseil mondial de l’eau dont on célèbre en ce moment au Sénégal, la 9eme édition de son forum de l’eau sur le thème « Sécurité de l’eau pour la paix et le Développement ».
Au demeurant la disponibilité de l’eau en quantité et en qualité, ainsi que sa gestion équitable tant à l’intérieur des pays qu’entre ceux-ci, pour tous les emplois, sont une condition siné quanon pour la paix et la souveraineté alimentaire. C’est dire que l’existence des bases productives pour une production agricole suffisante, durable, et de qualité est incontournable.
Je veux citer ici : les terres de culture convenables, un climat stable et adéquat, des ressources en eau suffisantes et enfin un capital Humain compètent et efficace.
· Concernant le sol sa raréfaction et sa dégradation posent problème dans le monde entier :
Selon la FAO près d’un milliard d’habitants sont touchés dans le monde par la salinisation, soient 8.7% des sols de la planète, étendue à la quelle, il faut ajouter toutes les superficies dégradées par des facteurs tels que : l’érosion hydrique, et éolienne, l’effet des changements climatiques ainsi que les diverses actions anthropiques, (telle que l’urbanisation sauvage)
(Source : Afrique Agriculture supplément n°446 – janvier – février 2022).
Au Sénégal le phénomène de la dégradation des terres de culture à réduit depuis de longues années le potentiel foncier évalué aujourd’hui à 3 805 000 hectare , or il se chiffrait en 1951 à 6 745 300 hectare ( selon Pélissier dans les paysans du Sénégal), Cité par l’ingénieur agronome Mamadou Faye dans une contribution publiée en 2015 : Rétrospective sur l’agriculture sénégalaise .
· A propos des changements climatiques qui sont un phénomène mondial, le Sénégal les subit de façon significative à l’instar de ses pairs africains et sahéliens.
Et ce phénomène est davantage aggravé au Sénégal par la démolition des dunes et des Filaos plantés le long du littoral, sans oublier l’ampleur de la déforestation, les mauvaises pratiques agricoles, et enfin l’exploitation excessive des nappes d’eaux souterraines par les différentes industries notamment dans la région de Thies.
· J’en viens à la problématique de l’eau au Sénégal, analysée de façon globale et satisfaisante par la Direction de la Gestion et de la Planification des Ressources en eau dans son ouvrage : « Atlas de l’eau du Sénégal », à quatre niveaux à savoir :
- Les différentes ressources en eau ;
- La qualité de l’eau ;
- L’usage des ressources en eau ;
- Le cadre institutionnel et la gouvernance de l’eau.
J’insisterai essentiellement dans cette partie de mon propos sur la problématique de l’eau d’irrigation, autrement dit, de la maitrise de l’eau pour la promotion de l’Agriculture irriguée.
A ce propos, je considère que dans le cadre de la visite des champs des priorités pour les pays africains et notamment pour le Sénégal comme le suggère le Chercheur Docteur Pape Abdoulaye Seck dans sa contribution intitulée : « la revanche du secteur agricole africain : quelques préalables pour une souveraineté alimentaire durable », l’agriculture est devenue aujourd’hui en Afrique une sur priorité, c’est-à-dire la première des priorités.
Ce faisant, il s’agira de se pencher à nouveau sur une politique hardie de maitrise de l’eau, pour aller de façon accéléré, au-delà des 5 à 6 % des terres irrigués sur notre potentiel foncier en augment la cadence des aménagements dans la vallée du Fleuve Sénégal , ainsi que dans les autres bassins de nos nombreux cours d’eau.
L’objectif vise’ sera d’exploiter les différentes sources d’eau fluviale, de surface, et souterraine pour le développent de l’irrigation dans toutes les zones convenables pour sa mise en œuvre.
Les productions ussies de l’ensemble des périmètres irrigués, ajoutées à celles provenant des cultures pluviales, permettraient d’anticiper sur l’augmentation des besoins alimentaires découlant d’une démographie toujours accrue ainsi que de la rareté des produits alimentaires habituellement importés sur les marchés agricoles mondiaux.
La situation crée par la guerre russo-ukrainienne illustre à merveille la nécessité d’une quête permanente de la souveraineté alimentaire à tous les prix.
Je ne saurais ne pas évoquer, ici, les regrets de feu l’Agronome Amadou ndao Bourtanda dans ses mémoires, à propos de l’abandon du programme des vallées fossiles qui devait permettre d’alimenter en eau de consommation pour les Hommes et le bétail ainsi que l’irrigation de plus d’un million hectares dans le Ferlo, notamment dans les régions de Matam et de Louga.
Aujourd’hui, l’idéal serait de procéder à une étude judicieuse de façon à faire du canal du Cayor et de celui du Baol prenant leur source au niveau du Lac de Guiers, une réalité’ pour les terroirs de ces dites régions.et particulièrement pour la ville de Touba ou la disponibilité ’de l’eau pose problème surtout pendant la période du Grand Magal.
C’est le lieu de noter avec force qu’au total, une exploitation minutieuse de nos différents potentiels foncier, hydrique, solaire, forestier, halieutique et humain, devrait nous écarter de façon durable de la faim, de la pauvreté ainsi que de l’insécurité alimentaire.
· Concernant le capital humain qui est un axe majeur du Plan Sénégal Emergent ( PSE) , il faudrait, par-delà les efforts louable fournis par les pouvoirs publics pour soutenir le système éducatif national, surtout dans le domaine de la formation professionnelle et technique, toujours de plus en plus adaptée aux besoins de la société et de l’écosystème économique, la prise en compte de la capacitation et de l’appui multiforme aux différents acteurs économiques constitue aujourd’hui une réalité incontestable .
Cependant, au regard de l’évolution des technologies dans tous les domaines, dans le monde, des efforts soutenus d’adaptation devront être développés à tous les niveaux afin d’éviter le dépassement de nos systèmes de formation et de production par la science, la technique et la technologie.
Dans cette perspective, le développement du numérique, de l’intelligence artificielle et du digital est devenu un aspect majeur des transformations de nos systèmes de formation et de production.
Pour conclure, j’emprunterai simplement en partie à Monsieur le Président Macky Sall et à Monsieur le président du groupe de la Banque Mondiale Monsieur David Malpass, les constats majeurs mis en évidence dans leur contribution en prélude à l’ouverture du forum mondial de l’eau : repenser la gestion de l’eau pour en garantir l’accès à tous.
Les constats évoqués ci- dessus conduisent aux recommandations suffisantes :
- Améliorer la qualité de l’eau de consommation pour soustraire les populations africaines du cercle vicieux des nombreuses maladies découlant à hauteur de 70 à 80% de la mauvaise qualité de celle-ci ;
- Faire de l’agriculture une sur priorité’ notamment sur le plan de la maitrise de l’eau et de l’irrigation ;
- Mettre œuvre une diplomatie appropriée de l’eau, afin d’éviter les nombreux conflits découlant de la gestion non concertée et non équitable des bassins frontaliers.
- Placer le développement du capital humain au centre de toutes les initiatives et des politiques de développement ;
- Et infiné, encourager le relèvement des budgets attribués au secteur de l’eau, afin de tendre avec la cadence qui sied, vers l’atteinte des besoins en investissements de 20 milliards de dollars par an à l’échelle de l’Afrique, au lieu des 0.5% du PIB que chaque pays accorde à son secteur de l’eau.
Toutefois, ces recommandations ne serviraient à rien, si elles ne sont pas soutenues par une volonté politique effective, l’élévation du travail et de la justice au rang de cultes.
Mamadou Moustapha Mbaye
Ingénieur Agronome principal de classe exceptionnelle (ER), Directeur Général du cabinet Polyconsult International.
Email : mamadoumoustapha09@yahoo.fr