Manquements et porte de sortie de crise
Depuis une semaine, un banal fait-divers est en train de polluer la démocratie de notre pays. Les institutions de la République sont interpelées. Une fille de 21 ans, Adji Sarr, accuse le principal opposant du pays de viols répétitifs. Ousmane Sonko, accusé, affirme, sans aucune précaution, qu’il s’agit d’une cabale montée par le président Macky Sall pour le faire emprisonner et ainsi réduire toute l’opposition à sa plus simple expression.
La gendarmerie nationale, par sa célèbre Section de recherches (SR), est saisie directement par Adji Sarr d’une plainte contre Sonko pour viol. Le commandant de la SR mobilise toutes ses capacités pour mener cette enquête. A ce niveau, deux erreurs sont à relever, pour conforter cette analyse. La SR aurait dû refuser cette saisine qui n’est en mesure de la faire agir. Cette saisine n’est pas prévue par les textes qui créent et fixent la mission de cette unité d’élite de la gendarmerie. Le simple citoyen ne peut pas saisir directement la Section de recherches.
La lecture du procès-verbal de la SR laisse penser à une activité contrôlée et passive de cette unité. Les moyens d’investigations laissent de côté des aspects importants qui enlèvent du crédit aux informations fournies par la gendarmerie. Celle-ci n’identifie pas le véhicule qui a transporté Adji Sarr du lieu-dit du viol à l’hôpital ou elle dit avoir été visitée. Le nom du propriétaire du véhicule, les conducteurs et passagers, les laissez-passer délivrés pour circuler en plein couvre-feu, sont indispensables pour éclairer une telle affaire.
La gendarmerie enquête cependant à charge et à décharge, dans cette affaire. Elle relève, sans parti-pris, les contradictions de la plaignante, met la pression sur certains témoins pour établir la vérité. Elle ménage néanmoins d’autres témoins, comme l’avocat qui a organisé l’exfiltration de la fille, le médecin qui conduit à l’hôpital et surtout oublie de faire une réquisition qualifiée à la Sonatel pour établir les contacts d’Adji Sarr avant, pendant et après ledit viol déterminant.
Cette enquête lucide, équilibrée et guidée permet une analyse sereine de cette affaire, pour que notre pays puisse retrouver une paix juste et durable sans passion et sans violence.
Après avoir montré les limites de la ligne de défense du député Ousmane Sonko, il sera établi les failles de l’accusation pour dégager une ligne de conduite à même de mener à une sortie de crise.
I - FAIBLESSE DE LA LIGNE DE DEFENSE DE SONKO
Diantre, qu’allait-il faire dans cette galère ?
Ousmane Sonko a commis une faute politique qui montre un infantilisme politique impardonnable. Il est inadmissible, il est incongru. Il est surtout fatal qu’un homme politique de la dimension d’Ousmane Sonko, candidat déclaré à la succession du président de la République, de trainer comme un vulgaire maquisard dans un salon de massage. C’est une indignité qui, à elle seule, le disqualifie à la prétention des plus hautes charges de l’Etat.
Il a beaucoup de chance, s’il y a complot, comme il le prétend, d’être tombé sur des non-professionnels et de vrais idiots du complotisme. Qu’aurait fait, qu’aurait dit, comment se défendrait Ousmane Sonko, si une patrouille de police avait fait irruption dans le salon ouvert pendant une période de couvre-feu pour contrôler et arrêter une activité illégale ? Il suffit, comme c’est le cas journellement, de démanteler des lieux de massage ou des faits réels ou supposés de prostitution se passent.
Tout le monde tire son coup dans ce pays. L’alcool et le sexe sont les choses les plus interdites par toutes les religions. Les Sénégalais sont friands d’alcool et de sexe. Le marché est important et nécessite des procédures spéciales pour s’y mouvoir sans laisser de trace ou se faire prendre. Certaines personnes comme moi-même ne sommes pas des saints ; il nous suffit de prendre des précautions et des précautions pour que la clameur publique ne nous prenne pas la main dans le sac.
Autant sa présence est incongrue, inadmissible et condamnable, autant l’appel à la mobilisation est critique. Il ouvre une répression excessive sur ses jeunes militants qu’il engage dans une lutte injustifiable. Il est tombé tout seul dans la gueule du loup, en prêtant le flanc ; le désordre public ne saurait le soustraire de la procédure enclenchée contre lui. La violence ne ferait que le desservir face à une machine répressive de l’Etat qui en profite pour démanteler les bases solides du seul parti d’opposition capable encore de faire face.
La rue ne saurait disculper Ousmane Sonko sans jeter un nouveau discrédit sur la démocratie sénégalaise. La confrontation conduit l’Etat qui reste fort de réprimer légalement des manifestations violentes injustifiées et difficiles à mener. Cette affaire est judiciaire et elle est politique. Judiciaire, elle exige que le droit soit dit. Politique, elle exige une démarche lucide et argumentée du Pastef pour asseoir l’idée d’un complot mal ficelé.
II- UN COMPLOT MAL FICELE
Des ‘’Tchounés’’ ont profité des vices d’Ousmane Sonko pour le tuer et l’éliminer de l’arène politique. Les acteurs ont été mal choisis, inopérants et, surtout, ont laissé des traces visibles tout le long de l’enquête.
La personne d’Adji Sarr pose problème. En premier lieu, elle n’est pas cette fille innocente et correcte victime d’un homme plus mûr et plus sûr qui, par des menaces et autres contraintes, se fait violer à deux mètres d’un père de famille respectable. Soit le salon tolère certaines activités de prostitution, cas dans lequel le viol est à exclure, soit l’acte sexuel est inexistant et est une invention pure et simple pour porter préjudice. Adji Sarr, par ses multiples contradictions, ne peut établir le viol. Le scénario mis en place dépasse ses capacités pour faire comprendre comment elle a été violée.
Adji Sarr montre des limites certaines dans l’engagement qu’elle prend de faire tomber un homme célèbre. Son téléphone dans le matériel que l’emploi la trahit dans toutes ses prétentions et conduit directement à l’idée d’un complot contre Sonko. Le téléphone ne fonctionne qu’en mode mains-libres et tout le monde entend ce qu’Adji Sarr dit à ses commanditaires. Adji Sarr a trop téléphoné et ses différents comptes-rendus peuvent être établis par une enquête impartiale. Le téléphone d’Adji Sarr doit parler pour incriminer ou dégager Ousmane Sonko.
Beaucoup de personnes de bonne et de mauvaise foi sont intervenues dans cette affaire avec un intérêt particulier. Qui a exfiltré Adji Sarr ? Avec quel moyen ? Qui a envoyé Adji Sarr dans un hôpital en passant tous les points de contrôle ? Quelle idée de foncer chez un gynécologue pour constater un viol dès les premiers instants ? Quelle idée de saisir directement la Section de recherches ? Seul un en haut d’en haut peut faire cette saisine. Quelle lettre plainte écrite sans faute par une fille qui n’a pas le BFEM avec des articles précis du Code pénal ? Qui envoie des repas de la Résidence Mamoune ? Toutes ces questions fragilisent à jamais l’accusation et attestent du complot.
Les failles de l’accusation plaident pour le retour à une sérénité de la gestion sans passion de ce dossier qu’il faut dépoussiérer en tenant compte du droit et des valeurs de notre culture faite de dialogue et de respect.
III- VOIES DE SORTIE DE CRISE
La sortie de crise est possible, après deux semaines de confrontations inutiles, inefficaces et spectaculaires dont la seule victime reste le Sénégal.
En premier, bien ou mal ficelé, le dossier d’Ousmane Sonko doit être traité de façon systématique par l’Assemblée nationale. La levée de l’immunité parlementaire du député Ousmane Sonko est indispensable. Autant la rue que les blocages des députés de l’opposition ne peuvent entraver cette procédure. Il faut, en tout état de cause, lever cette immunité pour qu’Adji Sarr et Ousmane Sonko soient égaux devant la loi. Quel que soit son acte, Ousmane Sonko, accusé bien ou mal par Adji Sarr, doit répondre de ses actes et de ses seuls actes.
En second lieu, la justice doit retrouver ses lettres de noblesse et juger en bon droit les faits et uniquement les faits. Plus que Karim Wade, plus que Khalifa Sall, Ousmane Sonko ne saurait faire l’objet d’une justice aux ordres. Les faits ne sont pas du même ordre et les acteurs sont différents. Karim Wade paie les fautes politiques de son père. Khalifa Sall n’a pas le courage politique pour faire face aux donneurs d’ordre. Ses pleurs pour sa mère et son boubou blanc n’étaient ni suffisants ni adéquats pour mobiliser les jeunes. La crédibilité de la justice sénégalaise est en jeu. Le président Macky Sall n’a aucun intérêt, cette fois, à ce que la justice soit décriée. La justice ne s’en remettra jamais et alors, la rue dira le droit.
Enfin, ce pays a besoin de sérénité, de dialogue et de tolérance. Le manque de tolérance des ‘’sonkistes’’ tue et tuera Pastef. Il est inadmissible que toute critique contre Sonko conduise à l’échafaud. Les ‘’sonkistes’’ font preuve d’une intolérance inadmissible et cela aura des répercussions sur l’avenir de leur parti.
De même, doit cesser cette marque complotiste des gens du pouvoir qui sont prêts à toutes les bassesses pour plaire au président Macky Sall. Ils dénaturent son action par leur vampirisme sans nom et tous azimuts. Seules l’intelligence et la conviction peuvent sortir ce pays du marasme économique et social qui engendre une pauvreté et tue à petit feu tout espoir.
En tout état de cause, la démocratie sénégalaise mérite des acteurs plus conscients de leurs responsabilités. Le pays vit des heures sombres. La Covid-19 fait des ravages, malgré les multiples efforts du corps médical.
On ne saurait garantir la paix par les prières des saints et croire que leur passage sur cette noble terre exclut notre pays des violences qui sont tout le long de nos frontières.
Pour survivre, la paix a besoin d’hommes et de femmes de paix. Le Sénégal ne vous appartient pas. Nous refusons d’être des spectateurs de l’arène politique. Nous exigeons que les règles soient respectées dans le cadre de la Constitution et des lois et règlements en vigueur. Les textes ne sont rien, si ceux qui sont chargés de les mettre en œuvre sont de pauvres types.