Publié le 11 Jun 2013 - 00:47
CAMPAGNE ANTI NOYADE

Engageons-nous !

 

Je ne suis pas un technicien en matière de noyade. Je veux tout simplement partager quelques informations glanées ici et là tournant essentiellement sur les causes des noyades et les précautions à prendre pour les éviter. Mais d’abord, je voudrais rappeler que nous sommes des Sénégalais, habitants d’un pays qui a des difficultés économiques énormes à résoudre, un retard technologique à rattraper et des priorités d’ordre vital à régler.

Alors, en toute urgence, nous devons nous pencher sur tous ces fléaux inhibiteurs du développement liés à nos mauvais comportements, leur trouver des solutions et les dépasser définitivement. Je veux parler du paludisme, de la tuberculose, du sida, des accidents de la circulation et autres, de l’encombrement des rues de notre capitale et de la saleté de nos quartiers, etc. Acceptons tous de dormir sous moustiquaire imprégnée toutes les nuits de l’année, orientons rapidement tous les tousseurs de quinze jours et plus vers les centres de dépistage de la tuberculose, surveillons notre statut sérologique, arrêtons d’uriner dans les rues, d’afficher partout et de jeter n’importe comment et n’importe où nos ordures. Oui, évitons les baignades dans les plages non autorisées. Surveillons de plus prêt les enfants. Veillons sur eux.

Car, en vérité, il s’agit là d’autant de comportements positifs à promouvoir et de comportements à risques à bannir. Et c’est en cela que la Campagne Anti Noyade (CAN) initiée par le Club Model et lancée ce dimanche 9 Juin 2013 à la salle de conférence de l’hôtel de ville de Dakar est importante et mérite l’implication de tous les citoyens et le soutien des autorités. Personnellement, je m’engage avec l’EMAD que je dirige et tous les Emadiens. Engagez-vous, en sensibilisant votre famille, vos amis, vos collègues, etc. Engageons-nous !  Car, au même titre que tous ces fléaux dus et/ou amplifiés par notre négligence, la noyade est un mal qu’on peut vaincre ou tout au moins réduire à sa moindre expression.

Et, disent les techniciens, pour la définir, elle est le processus d’altération de la fonction respiratoire résultante d’une submersion où d’une immersion en milieu liquide. Le sujet peut en sortir indemne ou avec une pathologie ou bien il en décède. Les statistiques parlent de près de 350 000 décès par noyade par an dans le monde. Au Sénégal, entre 1997 et 2006, on a enregistré 1000 décès sur un nombre total de noyades égal à 1500 si l’on en croit l'ex ministre de l’Intérieur, Me Ousmane NGOM, répondant à une question du député feu Abdou Latif Guèye, en 2007. Entre juin et décembre 2011, quelque 127 cas de noyades dont 102 décès ont été enregistrés. Rien qu’à Dakar, 51 cas ont été notés entre le 1er juin et le 22 juillet de l’année 2012. Des chiffres qui font froid au dos !

Les noyades peuvent survenir en mer, dans les eaux fluviales, dans les lacs, marigots, piscines, bassins de rétention et même dans les bassines remplies d’eau en ce qui concerne les tout petits abandonnées à eux-mêmes par des mamans trop préoccupées par les tâches ménagères. Au Sénégal, l’essentiel des cas sont notés à Dakar pendant les vacances scolaires, en saison chaude, essentiellement au niveau des plages non autorisées. Il faut toutefois noter que, ces dernières années, des noyades d’enfants sont signalées dans les bassins de rétention non sécurisés en banlieue dakaroise. Des quotidiens du jeudi 6 juin 2013 informent de la triste nouvelle du décès par noyade à Linguère, dans le quartier Thielly, d’une fillette de 6 ans, dans un fût d’eau où elle cherchait à étancher sa soif. 

La personne qui se noie ne facilite pas son sauvetage ; elle panique, crie en gesticulant de façon désordonnée, s’enfonce dans l’eau et remonte successivement. Ensuite, elle s’épuise tout naturellement et perd progressivement conscience pour avoir avalé une grande quantité d’eau. Enfin, elle perd totalement conscience, ne respire plus et meurt si on ne lui vient pas en aide rapidement.  C’est pourquoi, il est recommandé au sauveteur d’une personne en train de se noyer en mer ou en fleuve et en proie à la panique de faire preuve de prudence et d’une certaine technicité, car il risque de se faire agripper et entraîner sous l’eau. Alors il doit, si possible, utiliser une perche, une corde ou une bouée de sauvetage. L’appel au secours aux sapeurs-pompiers au plus tôt, en composant le numéro 18, est un impératif.

Les causes de noyades, disent toujours les techniciens, sont les suivantes : non respect des règles élémentaires, c'est-à-dire baignade au niveau des plages non autorisées, en état d’ébriété, après un effort physique intense ou bien après un repas copieux, etc ; méconnaissance ou sous estimation des risques ou bien surestimation de ses propres capacités ; méconnaissance du milieu aquatique ; négligence des parents, en ce qui concerne les enfants, etc.

On voit que l’inconscience et l’insouciance sont les principales causes de noyades. Ce qui montre l’importance de l’information, de l’éducation et de la sensibilisation des populations sur les questions y afférents. Les cours de natation à l’attention des enfants, des jeunes et même des adultes ainsi que leur formation aux techniques de survie dans l’eau sont des stratégies pertinentes pour prévenir les noyades. L’installation de panneaux d’interdiction et d’autorisation de baignade, de drapeaux de signalisation ainsi que le recrutement de surveillants de plages et maîtres nageurs  équipés sont à saluer et à encourager.

Il serait aussi intéressant de diffuser à grande échelle les consignes sécuritaires suivantes, fortement recommandées par les techniciens : se baigner exclusivement dans les plages autorisées et surveillées ; demander conseils aux surveillants et maîtres-nageurs, en cas de besoin ; toujours se renseigner sur les horaires des marrées et garder à l’esprit que les premières heures de la marée montante sont les plus dangereuses ; nager parallèlement à la plage, ne pas trop s’éloigner du rivage et ne pas lutter contre le courant s’il vous entraîne, car il finira par vous déposer ; ne jamais se baigner seul ni quand la mer est agitée, même dans les plages autorisées ; ne pas se baigner en état d’ivresse, après un repas copieux, après une longue exposition au soleil ou dans un courant d’air et après une longue débauche d’énergie ; éviter les jeux violents dans l’eau et en sortir vite à la moindre sensation désagréable ; éviter les plongées en apnée répétées, rapprochées ou prolongées ainsi que l’esprit de concurrence et de surpassement ; apprendre à nager avant de prendre des risques tels que monter sur un objet flottant qui peut emporter très loin ; ne jamais entraîner quelqu’un de force dans l’eau ; en cas de difficulté, signaler sa détresse en levant les bras ou en appelant au secours ; éviter les bains de nuit, savoir que la prudence est la mère de la sûreté et avoir toujours à l’esprit ce proverbe wolof qui dit que : «géej amul banxass» qu’on peut traduire par «la mer n’a pas de branches (où s’accrocher en cas de difficultés)» ; éviter, surtout les jeunes filles, les tenues indécentes pouvant entraîner des tentatives de viol dans l’eau qui sont aussi causes de noyades ; les maillots de bains de couleur clair : blanc, jaune, orange, vert, deviennent transparentes au contact de l’eau ;  sécuriser, par des clôtures, les bassins de rétention ; surveiller les piscines et installer des couvercles sur les puits et citernes à eau ; ne pas laisser les bassines et les fûts remplis d’eau à la portée des enfants.

Plages autorisées et non autorisées

Les plages autorisées à la baignade sont : Terrou Baye Sogui (derrière le Palais de la République), Ponton (derrière le Petit Palais, en allant vers l’hôtel Savana). Anse Bernard (entre Terrou Baye Sogui et Ponton), Plage des enfants (vers l’hôtel Le Lagon, sur la corniche Est), Koussoum (Porte du 3ème Millénaire), Terroubi (vers Fann Résidence, au niveau de l’hôtel du même nom), Conseil Constitutionnel (vers Magic Land), Piscine Mermoz (face à la Cité des Enseignants), Al Mahdi (Ouakam), Almadies 2, Yoff, Ngor, Île de Ngor, Cambérène, Île de Gorée.

Les plages non autorisées sont : Soumbédioune à la Gueule Tapée, une des plages les plus polluées de la Ville de Dakar avec celle de Hann. Virage (après l’Aéroport Léopold Sedar Senghor), Institut Pasteur (derrière la Clinique du Cap à Cap Manuel), Lat Dior (appelée Ngadjé par les populations autochtones),  Almadies 1 (après la Clinique des Mamelles), Côte d’Azur (cité BCEAO), Plage de l’Université (en face de l’IFAN, appelée Ndaly par les populations autochtones), Mermoz (en face de la résidence appelée les « Dents de la Mer »), Mamelle, Hann, Parcelles Assainies.

Il faut préciser que les plages les plus sûres sont celles situées sur la corniche Est où la mer est moins tumultueuse à l’instar de presque toutes les plages de la Petite Côte : Terrou Baye Sogui, Ponton, Anse Bernard et la Plage des Enfants. Les plus fous se baignent dans les rochers de Lagon 2, «Pont Bou Bess», Cap Manuel et les plages de la Grande Côte, telles Guédiawaye, Malika, Kayar, etc.

J’espère vivement que les initiateurs de cette Campagne Anti Noyade feront la promotion des voyages de découvertes du Sénégal, du livre et de la lecture qui permettent de voyager et de découvrir des hommes et des cultures en restant assis dans son salon ou au bord de la mer. Sans oublier les jeux de l’esprit. Car les grandes vacances sont une occasion pour la jeunesse de se détendre en allant se baigner en mer, certes. Mais elles doivent être, aussi  et surtout, une occasion pour elle de découvrir leur pays, de se cultiver et de façonner leur esprit et leur cœur en apprenant la sociabilité, le civisme et la citoyenneté.

 

ABDOU KHADRE GAYE
Écrivain, président de l’EMAD
 emadassociation1@gmail.com

 

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