Déconstruire le mythe de l’Europe

Backa Mbaye est un jeune réalisateur sénégalais qui souhaite sortir son premier long métrage en août prochain. Il a produit, lui-même, un documentaire intitulé ‘’Mirage’’ pour changer la manière de voir l’Europe comme un El Dorado par les jeunes Africains.
Un documentaire de 52 minutes parlant d’émigration clandestine sortira en août prochain. Le sujet semble être une rengaine, une véritable ritournelle. Cependant, ‘’Mirage’’ n’est pas un rabâchage. Du moins, c’est ce que soutient son réalisateur Backa Mbaye. Dans un entretien avec EnQuête, l’ancien technicien de la radiodiffusion télévision sénégalaise (RTS) explique que son documentaire va au-delà de la simple question de l’émigration clandestine. Il n’est pas donc de ces réalisateurs qui se contentent de revenir sur le parcours de ces jeunes vivant en Europe, sans papiers, et qui sont passés par la mer. Il n’est pas aussi de ces cinéastes qui se limitent à rencontrer ceux-là qui ont été renvoyés chez eux et à les interviewer. Backa Niang va au-delà et bien au-delà même.
‘’Quand je suis parti en Europe pour la première fois, je m’attendais à y découvrir une vie merveilleuse. Une fois sur place, je me suis rendu compte que les choses n’étaient pas aussi simples que je le pensais’’, explique-t-il. Comme bon nombre de jeunes Africains, Backa Mbaye croyait que l’Europe était un véritable El Dorado. Son rêve enchanteur a été brisé lors de sa première visite en France. En plus de son vécu personnel, il a rencontré d’innombrables jeunes qui étaient dans la même situation que lui. ‘’Quand je suis arrivé en France, je ne me voyais pas rentrer sans aller à Paris plus précisément aux pieds de la Tour Eiffel. Et c’est là-bas que j’ai rencontré beaucoup de jeunes Sénégalais avec qui j’ai échangé. Je me suis rendu compte, au cours de nos discussions, qu’eux tous étaient déçus.
L’Europe était un mythe pour eux. Ils croyaient pouvoir y gagner leur vie et être riches. Cependant, les choses ne se sont pas déroulées comme ils s’y attendaient tous’’, dit Backa Mbaye. Ainsi, c’est dans l’optique de déconstruire ce mythe construit autour de ce continent que le réalisateur a fait ce film. ‘’Je veux que les jeunes sachent que l’Europe n’est pas ce qu’ils pensent être. Ce n’est pas une terre où on peut s’enrichir en cliquant des doigts. Il n’est plus facile d’y trouver du travail’’, assure-t-il. ‘’J’ai fait des interviews avec ces jeunes qui nous parlent de leur vécu difficile en France, en Espagne et en Italie par exemple où j’ai tourné’’, ajoute-t-il. Pourquoi ne rentrent-ils pas alors est la question qu’on se pose.
‘’Ces jeunes, pour venir en Europe, ont eu droit au soutien financier de leur famille qui attend naturellement un retour d’ascenseur. Rentrer les mains vides, dans ce cas, serait plus que catastrophique même si l’on sait que, que cela soit cette année ou l’année prochaine, on ne peut pas satisfaire la famille laissée au Sénégal. Cette équation rend d’ailleurs instables certains d’entre eux. Quand tu leur parles, tu sens nettement qu’ils sont psychologiquement instables. Ils sont en Europe et n’ont pas de travail. Ils vendent de petits articles par-ci et par-là.
Et ce commerce n’est en vérité que de la mendicité déguisée. Parce que souvent ils disent à la clientèle : ‘’S’il vous plaît, achetez parce que depuis ce matin je n’ai rien vendu et on m’a appelé pour me dire que mon père est malade par exemple.’’ La personne peut ne pas être intéressée par l’article mais, touchée par le discours, laisse au vendeur quelques pièces’’, informe Backa Mbaye. En outre, il en existe des courageux qui n’ont pas hésité à jeter les amarres et rentrer. A ceux-là aussi, le réalisateur a donné la parole. ‘’J’ai rencontré des gens qui ont préféré rentrer au pays et trouver un travail avec 150 mille francs par mois que de rester en Europe’’, déclare-t-il.
Par ailleurs, dans ce documentaire, le réalisateur donne aussi la parole aux autorités. C’est ainsi qu’il a fait réagir l’actuel ambassadeur de la France au Sénégal Jean Félix Paganon et le directeur des Sénégalais de l’extérieur Sory Kaba
BIGUE BOB