L’Union africaine suspend le Niger de ses institutions
L’Union africaine s’aligne sur les sanctions de la CEDEAO contre le Niger, mais reste prudente sur une intervention militaire.
Une semaine après la réunion du 14 août 2023 de son Conseil paix et sécurité (CPS), l’Union africaine (UA) a enfin sorti un communiqué officiel sur l’intervention militaire projetée par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) au Niger. L’instance continentale a annoncé, hier, avoir pris note ‘’de la décision de la CEDEAO de déployer une force en attente’’.
Sans prendre une position officielle, le CPS a demandé à la Commission de l'UA ‘’d'entreprendre une évaluation des implications économiques, sociales et sécuritaires du déploiement d'une force en attente au Niger et d'en faire rapport au conseil’’.
Cette position mi-figue, mi-raisin fait suite à des discussions houleuses entre pro et anti-intervention militaire au Niger, lors de cette fameuse réunion.
Selon des indiscrétions, le bloc de l’Afrique de l’Ouest, composé du Sénégal, de la Gambie, du Ghana et du Nigeria, s’est retrouvé isolé au CPS, les quatre autres s’étant opposés à l’utilisation de la force militaire pour imposer un retour de l’ordre constitutionnel au Niger.
Du fait de ces divergences internes, l’UA préfère encore patienter avant de prendre une position définitive.
L’UA demande une évaluation des conséquences d’une intervention militaire
Malgré cela, l’UA a décidé d’appuyer la CEDEAO dans sa lutte pour un départ des militaires du pouvoir et un retour du président déchu Mouhamed Bazoum.
En effet, l’organisation a fait savoir qu’elle a décidé, ‘’conformément aux instruments pertinents de l'UA, en particulier l'Acte constitutif de l'UA, le Protocole relatif à la création du Conseil paix et sécurité de l'Union africaine et la Charte africaine sur la démocratie, les élections et la gouvernance, de suspendre immédiatement la participation de la République du Niger de toutes les activités de l'UA et de ses organes et institutions jusqu'au rétablissement effectif de l'ordre constitutionnel dans le pays’’.
L’UA exhorte, par la même occasion, tous ses États membres et la communauté internationale, y compris les partenaires bilatéraux et multilatéraux, ‘’à rejeter ce changement anticonstitutionnel de gouvernement et à s'abstenir de toute action susceptible de conférer une légitimité au régime illégal du Niger’’.
Depuis le 26 juillet dernier, un putsch militaire a permis au général Abdourahamane Tiani de prendre le pouvoir et de mettre en place un Conseil national pour le salut de la patrie (CNSP) qui exerce déjà comme un gouvernement de transition.
Malgré les injonctions de la CEDEAO, le nouvel homme fort du Niger a annoncé un ‘’dialogue national inclusif’’, tout en proposant une période de transition ‘’qui ne devrait pas excéder trois ans’’. Une proposition qui a été rejetée par l’organisation sous-régionale. Lundi, le commissaire chargé de la sécurité et de la politique de la CEDEAO, Abdel-Fatau Musah, a déclaré à Reuters que la position de l’organisation restait claire : "Libérer Bazoum sans condition préalable, restaurer l'ordre constitutionnel sans plus tarder."
L’UA approuve les sanctions de la CEDEAO…
L’Union africaine épouse également cette position. Dans son communiqué, elle a salué les efforts de la CEDEAO sous la direction du président nigérian Bola Ahmed Tinubu. L’UA appelle également les États membres ‘’à mettre pleinement en œuvre les sanctions imposées par la CEDEAO et approuvées par le CPS, et demande à la Commission, en consultation avec la CEDEAO, d'informer régulièrement le Conseil sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre des sanctions imposées’’.
Au lendemain de coup de force militaire, la CEDEAO a mis en place un blocus économique total sur le Niger, tout en le suspendant de l’organisation. Ces sanctions visent également les officiels au pouvoir et leurs collaborateurs.
Pour aller dans ce sens, la Commission de l'UA a demandé, ‘’en étroite collaboration avec la Commission de la CEDEAO, de compiler et de soumettre d'urgence la liste des membres de la junte militaire et de leurs soutiens militaires et civils, y compris ceux qui sont impliqués dans la violation des droits fondamentaux du président Bazoum et d'autres détenus, en vue de sanctions ciblées et de l'application de mesures punitives individuelles’’.
… et appelle les militaires à coopérer
Le Conseil paix et sécurité invite la junte militaire au Niger à coopérer avec la CEDEAO et l'UA, en vue d'un rétablissement pacifique et rapide de l'ordre constitutionnel et les exhorte ‘’à placer les intérêts suprêmes du Niger et de son peuple au-dessus de tout, et de retourner immédiatement et sans condition dans les casernes et de se soumettre aux autorités civiles, conformément à la Constitution du Niger’’. Elle appelle le peuple nigérien à rester calme, à s'abstenir de toute action susceptible d'envenimer la situation et à adopter pleinement une approche pacifique en vue du rétablissement de l’ordre constitutionnel dans le pays.
Alors que cette crise politique au Niger cache des intérêts internationaux, le CPS rejette fermement toute ingérence extérieure d'un acteur ou d'un pays extérieur au continent dans les questions de paix et de sécurité en Afrique, y compris les engagements de sociétés militaires privées sur le continent, conformément à la Convention de l'OUA de 1977 pour l'élimination du mercenariat en Afrique.
BREVES NIGER: Dépassée, la junte rackette A peine un mois après leur coup d’Etat, la junte montre des signes d’essoufflement et de dérive économique. Les sanctions économiques prises par l’UEMOA et la Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) commencent a détérioré sévèrement la vie économique du Niger et à indisposer les putschistes. Les prix des denrées de première nécessité comme le riz, le lait et le sucre connaissent déjà une hausse de 15% et les banques commerciales sont obligées de limiter drastiquement les décaissements. Une situation qui ira en s’empirant. Face aux multiples difficultés et défis, la junte militaire au Niger n’hésite plus à contourner l’orthodoxie financière en supprimant par exemple le guichet unique et en obligeant les Douanes et les services des Impôts à verser l’argent collecté directement dans les comptes du Trésor public. Une initiative qui permet aux putschistes de se servir directement et plus facilement. Des rumeurs circulent et font état de la volonté de la junte de trouver des liquidités par tous les moyens, même s’ils ne sont pas légaux. Ainsi la SONIBANK a été contrainte de verser 500 millions de Francs CFA aux putschistes qui ont pu ainsi financer leur manifestation du 06 août au Stade Seyni KOUNTCHE. Selon ces sources, les militaires seraient même prêts à puiser dans les comptes bancaires des particuliers La situation risque s’empirer avec la décision prise par les putschistes de lancer une transition d’au moins trois ans. Une décision fortement rejetée par la CEDEAO. NIGER : La tentation de WAGNER de noyauter la junte Le Niger est entré dans une période de grandes incertitudes. Il est ballotté par une situation économique morose et une hantise d’une intervention militaire de la CEDEAO. Son seul soutien reste le groupe WAGNER. Ce dernier n’hésite à venir en aide aux putschistes en finançant par exemple les manifestations de Nigériens favorables aux militaires qui ont pris le pouvoir par la force. WAGNER a financé la deuxième manifestation dite nationale et patriotique qui s’est tenue après celle du 06 aout. WAGNER a mis sur la table 3500 euros pour payer les manifestants qui ont brandi des drapeaux russes, des bannières et des affiches pro-WAGNER avec des portraits d’Evgueni PROGOGINE et de Vladimir POUTINE. Cette manifestation n’a pas eu cependant l’écho attendu. L’Objectif de WAGNER est de s’insérer au sein de la junte et de manipuler à son guise les affaires nigériennes. Le but est de détériorer davantage les relations entre la junte d’une part et les pays de le CEDEAO, ainsi que les puissances occidentales d’autre part. Ce jeu dangereux n’exclut pas de possibles provocations par des Nigériens des troupes étrangères installées dans le pays et déclencher ainsi une haine contre les Français et les Occidentaux et contre les futurs soldats de la CEDEAO qui seront envoyés dans le pays, La stratégie de WAGNER est de faire croire que PRIGOGINE a été pardonné par POUTINE et lui permettre de revenir dans le jeu russe. |
Lamine Diouf