Macky Sall va lâcher l’IGE

Dakar accueille depuis hier les ministres de la Justice d’Afrique pour renforcer la lutte anticorruption et renforcer l’Etat de droit. Le président de la République, qui procédait à l’ouverture officielle des travaux, a promis à cette occasion que l’inspection générale d’Etat (IGE) va reprendre du service.
‘’La corruption est plus complexe et plus difficile à cerner et combattre de par sa nature, ses modes opératoires. Elle démolit la confiance, entrave la mise en œuvre des politiques publiques, crée une situation d’opacité qui porte atteinte à l’économie et à la viabilité du service public’’. Le président de la République, Macky Sall, présidait hier l’ouverture de la conférence ministérielle sur le renforcement de l’Etat de droit et la lutte contre la corruption en Afrique. Et sur ce dernier point, il a affirmé son intransigeance dans ce combat en décidant de réactiver les organismes étatiques chargés de lutter contre le fléau. ‘’Je vais instruire prochainement l’IGE pour reprendre du service car ça doit être une pratique courante régulière et systématique pour que toutes nos structures puissent être auditées de manière permanente.
Je réaffirme ma volonté, plus que ferme, de poursuivre sans relâche le combat contre la corruption. Ce ne sont pas les sirènes qui vont arrêter le combat. Malgré les connexions multiples, je vais poursuivre la politique de rigueur, de transparence, de bonne gouvernance et d’efficience dans les dépenses publiques’’, a lancé Macky Sall. En décidant d’élargir la déclaration de patrimoine à d’autres autorités et agents publics à l’Ofnac, le chef de l’Etat fait savoir que la lutte pour la bonne gouvernance va se réveiller de sa torpeur. ‘‘Les gens ont pensé à un moment donné que, parce qu’on était au ralenti, ils pouvaient reprendre les mauvaises habitudes ; c’est une illusion. J’ai demandé au gouvernement de rester ferme sur ces questions. De toute façon, je ne reculerai pas sur ce point, quels que soient les défis et les résistances. Ce message est clair’’, lance-t-il.
‘‘La corruption existe ailleurs’’
2 600 milliards de dollars sont détournés chaque année, ce qui fait 3% du Pib mondial dont 60 milliards destinés à l’Afrique. Une somme supérieure à l’aide publique au développement (APD). ‘’Une hémorragie financière’’, selon le directeur du bureau régional pour l’Afrique du PNUD, Abdoulaye Mar Dièye, qui a avancé ces chiffres. Ce qui a motivé la présence de plus de quinze ministres de la justice de l’Afrique de l’ouest jusqu’à jeudi (demain) pour affirmer leur volonté de lutter contre la corruption.
Le président de la République s’est également insurgé contre les représentations mentales qui veulent faire de ce fléau une marque de fabrique africaine. ‘’La corruption n’est l’apanage ni d’un continent, ni d’une société ; pas plus qu’elle est liée au niveau de développement d’un pays. Il n’est pas acceptable que l’Afrique soit désignée le continent de la corruption. Il y en a ici, c’est clair, mais elle existe ailleurs et l’actualité le prouve à suffisance’’, déclare-t-il non sans s’attaquer aux caricatures tendancieuses qui font de la ‘‘société civile l’incarnation de la vertu ; et des agences publiques le siège du vice’’.
Cette conférence organisée avec le Qatar et le PNUD a enregistré la présence de Moncef Marzouki, l’ancien président de la Tunisie qui a reçu un hommage du président Macky Sall pour la stabilisation du pays. Selon Abdoulaye Mar Dièye, le Qatar s’était classé 27e pour l’indice de corruption dans le rapport de Transparency International. En avril de la même année, le gouvernement de ce pays a inauguré le centre qatari pour l’Etat de droit et la lutte contre la corruption. Par ailleurs, le procureur spécial du Qatar, Ali bin Fetais Al-Marri, présent à la rencontre, a été nommé comme mandataire spécial des Nations unies pour le recouvrement des avoirs volés. Ces progrès du seul pays arabe du Moyen-Orient où les femmes ont le droit de vote expliquent ce choix.
Ousmane Laye Diop