Publié le 21 Nov 2023 - 20:23
DÉFORESTATION, DÉGRADATION DES TERRES, ÉMIGRATION IRRÉGULIÈRE, AVANCÉE DE LA MER…

Les interrogations des députés, les réponses d’Alioune Ndoye 

 

Pour l’année 2024, le projet du budget du ministère de l'Environnement, du Développement durable et de la Transition écologique  est de 48 699 848 381 F CFA. Cette séance a permis aux députés de soulever les goulots d’étranglement de ce ministère et à Alioune Ndoye de donner des pans de réponse.

 

Pour l'exercice 2024, le projet de budget du ministère de l'Environnement, du Développement durable et de la Transition écologique  (ME2DTE), qui s'élève à 48 699 848 381 F CFA en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), a été voté hier à l’Assemblée nationale par les députés.

Lors de son face-à-face avec les députés, Alioune Ndoye a précisé que s'agissant du rapport annuel de performance 2022, 80 % des cibles ont pu être atteints, soit un niveau globalement satisfaisant, avec une progression d'un point en valeur relative par rapport à 2021.

Ces résultats, selon lui, concernent l'essentiel des activités phares menées par les différents services dans le domaine de la lutte contre la déforestation, la dégradation des terres, la conservation de la biodiversité et des aires protégées, la lutte contre le péril plastique, l'érosion côtière, les pollutions et les effets néfastes des changements climatiques, ainsi que la gouvernance environnementale.

Ainsi, il a dit que les résultats enregistrés sont satisfaisants et que ces différents progrès réalisés nécessitent d'être renforcés avec des moyens financiers beaucoup plus importants, pour atteindre l'objectif d'un Sénégal émergent vert, conformément à la vision du PSE.

Poursuivant son propos, il a indiqué que la hausse du budget va favoriser, entre autres, une meilleure prise en charge des jeunes recrutés dans le cadre du programme ‘’Xëyu Ndaw Ni’’ pour une reforestation nationale durable, le financement de deux projets d'investissement qui ont bouclé leur processus de maturation, le reverdissement des écoles pour le renforcement de l'éducation environnementale, la préservation des écosystèmes naturels contre la recrudescence des actions malveillantes et par ailleurs le soutien de la politique globale de reforestation sur toute l'étendue du territoire national, en rapport avec les collectivités territoriales.

Pour l'année 2024, il s’agira, selon Alioune Ndoye, de la mobilisation intégrale des ressources budgétaires de son département qui permettra d'assurer le financement correct de la mise en œuvre des plans de gestion des formations forestières, de la protection des écosystèmes, de la biodiversité et du cadre de vie, d'opérationnaliser les projets structurés dans le cadre du PSE-vert en vue d'un développement durable.

Intervenant à leur tour, des députés ont fait part de leurs préoccupations qui tournent autour d’une dynamique nationale pour l'amélioration de la gestion de l'environnement et des ressources naturelles, l'intégration des principes du développement durable dans les politiques publiques, le renforcement de la résilience des écosystèmes et des communautés au changement climatique, mais aussi la conciliation des intérêts des générations futures aux impératifs de développement.

Relativement à l'adoption du nouveau cadre mondial de la biodiversité, ils ont interpellé le ministre sur les stratégies envisagées par le Sénégal pour une bonne application de ce texte. Ils ont également demandé les actions mises en place pour la transition vers l'économie verte, qui nécessite un changement de comportements des entreprises concernées et des citoyens.

Sous ce registre, ils se sont informés sur les moyens mis à disposition pour favoriser la conciliation entre la transition écologique et la production prochaine d’hydrocarbures par le Sénégal, dans le respect de ses engagements internationaux en matière de lutte contre les effets du changement climatique.

À ce propos, il a été suggéré d'investir une partie des retombées de l'exploitation de ces ressources dans la prise en charge des enjeux environnementaux, afin de pallier les contraintes internationales liées à la promotion d'une économie verte.

En outre, le ministre a été interpellé sur l'état des engagements pris par notre pays, notamment les 2,5 milliards d'euros annoncés pour la promotion de la transition écologique visant à porter jusqu'à 40 % la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique national d'ici 2030 et à réduire les émissions de gaz à effet de serre à hauteur de 23 à 29 %.

Déclassement de 86 400 ha de plus, avec plus de 98 forêts qui sont en sous-aménagements

Sur la question des forêts classées, Alioune Ndoye a expliqué que généralement, le déclassement des forêts est toujours d'utilité publique. Il a précisé que le président de la République a classé 86 400 ha de plus, avec plus de 98 forêts qui sont en sous-aménagements. Dans ce sens, il a précisé que la demande d'un cimetière dans la forêt classée de Mbao par exemple sera étudiée, car il y a des arbitrages à faire.

Pour le problème de la décoloration du lac Rose, le ministre a informé que c'est un phénomène qui est provoqué par les inondations et le pompage des eaux pluviales vers le lac. Il a précisé qu'une équipe de techniciens, qui s'est penchée sur la question a relevé que les micro-organismes responsables de la coloration sont toujours présents au fond du lac, ce qui constitue un élément d'espoir puisqu'il y a la possibilité de pompage de l'eau de pluie se trouvant en surface. Il a ajouté également que plusieurs bassins de rétention sont en cours de construction pour préserver le lac de ces eaux de ruissellement, suite à l'avancée de l'occupation urbaine de plus en plus importante.

Sur la qualité de l'air, le ministre a précisé que c'est une préoccupation prise en compte par son département, avec l'installation de six réseaux de station de mesure pour Dakar, Guédiawaye et Pikine. Ainsi, le projet Senrem, qui vient de démarrer, permettra, en 2024, de poursuivre ce programme d'installation de stations de mesure à Diamniadio, Thiès, Kaolack, Touba, Saint-Louis, Ziguinchor et Kédougou. Il a ajouté d'ailleurs que le Code de l'environnement prévoit des dispositions sur les seuils d'émission pour tout ce qui concerne les polluants du trafic routier.

Sur les risques de marée noire, il est d’avis que même la Hassmar a vu ses prérogatives renforcées et davantage organisées et que le Centre de suivi écologique (CSE) a fait toutes les études et les plans de contingence et de formation sur la sécurité en mer.

Sur la lancinante question de l'émigration irrégulière, le ministre a expliqué que ce phénomène est dû aux pêcheurs qui se sont transformés en convoyeurs de migrants, pour gagner plus que les produits de l'activité de pêche. Et selon lui, il est nécessaire de conjuguer les forces pour préserver la jeunesse de ce fléau.

Sur la pollution du typha au niveau du fleuve Sénégal, il a soutenu que lors de son déplacement avec le Premier ministre, il a pris l'engagement de tenir une réunion technique entre son département et celui des Pêches et de l'Économie maritime pour la mutualisation des moyens nécessaires à la mise en place d'un programme de lutte contre ce typha.

En outre, il a informé qu'avec le concours de certaines ONG, des femmes ont la possibilité d'exploiter ce typha pour le transformer en biocharbon.

Sur la prise en compte des préoccupations des députés, elle s'est traduite selon le ministre, par une exécution minutieuse de leurs recommandations à travers une augmentation du budget alloué au département, qui est passé de 38,7 milliards F CFA à 48,7 milliards F CFA, soit une hausse de 9,917 milliards F CFA, soit 26 %.

S'agissant du renforcement des moyens alloués à la Direction des Eaux et forêts, chasses et conservation des sols et celle des Parcs nationaux, le ministre a indiqué qu'il y a une dimension importante de conservation des eaux et des sols, de défense et de restauration des sols (CES/DRS) qu'on retrouve dans d'autres départements ministériels.

À ce propos, le ministre a informé que le budget des eaux et forêts se situe globalement en termes d'investissements dans l'ordre de 8,8 milliards F CFA, soit une augmentation de 1,1 milliard F CFA, indépendamment des crédits alloués à l'Agence de la grande muraille verte, qui sont passés de 3,5 milliards à 4 milliards F CFA en 2024.

Enfin, pour la dotation jugée faible du Centre de suivi écologique (CSE), il a fait noter que ce centre était initialement une association et qu'elle bénéficie, en plus de l'appui de l'État, de ressources dans le cadre de conventions qu'il signe avec d'autres structures et organismes. Toutefois, il a indiqué avoir pris bonne note des demandes de renforcement des crédits de ce centre. 

Cinq mois de salaires pour les jeunes du programme ‘’Xeyu Ndaw Ni’’

À propos des cinq mois d’arrières de salaire des jeunes du programme ‘’Xeyu Ndaw Ni’’ soulevé par Guy M. Sagna, le recrutement des gardes forestiers qui sont contractuels depuis 1997 et qui gagnent moins de 20 000 F CFA, le changement de sac d’emballage de ciment à Dangote passant du papier au polyéthylène par Abdou Mbow, Alioune Ndoye n’a pas fourni de réponses.

Sur les autres interrogations, selon lui, hormis les questions politiques soulevées par les députés, la quasi-totalité des réponses est dans les rapports.

Par ailleurs, cette rencontre lui a permis de faire le bilan sur les feux de brousse. Au niveau national, entre janvier 2021 et novembre 2023, il y a eu 1 287 cas qui ont été enregistrés.

DR ISMAILA DIALLO (MEMBRE DU GROUPE PARLEMENTAIRE YAW)

"De manière générale, le budget de ce ministère est très faible"

"J'ai constaté que c'est un budget très faible par rapport aux défis. Le montant du budget global qui s'élève à 67 281 966 160 F CFA est une somme  insuffisante, eu égard à l'importance que revêt le secteur de l'environnement. Relativement au projet d'appui à l'environnement et à la gestion des ressources, il a été relevé une insuffisance des crédits alloués à ce chapitre (212 735 000 F CFA).

En effet, ce chapitre constitue un pan important de la politique environnementale. À ce titre, des crédits beaucoup plus consistants devaient être alloués à ce chapitre. Le Programme de lutte contre la déforestation et la dégradation des terres est faible. La dotation allouée au Conacilss (Comité national du comité inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel) est insuffisante. L'accomplissement de sa mission, qui est d'étudier toutes les questions relevant de la lutte contre la désertification et la sécheresse, nécessite beaucoup plus de crédits. La dotation de l'Inspection régionale des eaux et forêts de Kédougou (325 289 180 F CFA) est insuffisante.

Sur ce, il est à noter qu'une bonne partie du parc du Niokolo se trouve dans la région de Kédougou. Cette région est également traversée par plusieurs cours d'eau (fleuve Gambie, le Thiankoye, le Thiokoye, le Niériko). Les dotations des secteurs forestiers sont très faibles. En atteste celle du secteur forestier de Mbour qui s'élève à 4 215 000 F CFA. Les crédits alloués à l'Agence sénégalaise de la reforestation et de la grande muraille verte sont énormes (10 350 000 000 F CFA) alors que les résultats sur le terrain sont jusque-là insuffisants. Les crédits alloués à la Direction des aires marines communautaires protégées (DAMCP) sont insuffisants, compte tenu de sa mission qui est de mettre en place et de faire fonctionner des aires marines protégées. Elle appuie aussi les initiatives communautaires de gestion durable des ressources marines et côtières.

Concernant la lutte contre les pollutions, nuisances et les effets néfastes des changements climatiques, les dotations des divisions régionales de l'environnement et des établissements classés sont très faibles. Elles sont chargées de mettre en œuvre la politique du gouvernement en matière d'environnement, notamment la protection des populations et de leur cadre de vie contre les pollutions, nuisances et les déchets dangereux. Nous avons remarqué un problème de cohérence d'ensemble. Par exemple, la transition écologique qui n'a aucun programme ou catégorie de dépense sérieuse. De manière ramassée, nous jugeons que le budget alloué à ce ministère est très faible."

CHEIKH THIAM

 

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