Publié le 20 Feb 2013 - 08:05
ENQUÊTE SUR… KINÉ LAM, ARTISTE CHANTEUSE

 Une Diva pionnière

Au début des années 90, Kiné Lam crée le Kaagu orchestra pour écrire en lettres d’or son nom dans les annales de la musique sénégalaise. L’écho de sa voix se fait sublime et talentueux sur un flot de décibels combinés dans dix-neuf albums en trente-six ans de présence sur la scène musicale du Sénégal. Par son œuvre musicale, elle demeure une Diva pionnière de la première heure.

 

Premiers pas

 

Par la grâce de Dieu, je suis née avec le don de chanter, confie Kiné Lam dans le salon de sa résidence sise au Parcelles Assainies. Ses parents Mbaye Lam et Khady Samb issus de grandes familles griottes, ne se sont jamais essayé au chant. Mais la passion héréditaire de la Diva pour la chanson prend sa source dans la sève de l’arbre généalogique de ses aïeux. Piquée par le virus de la chanson à bas âge, Kiné Lam ne tarde pas à mettre en exergue son talent de future cantatrice à l’occasion de manifestations festives telles que le théâtre scolaire, les baptêmes et les mariages.

 

L’année 1974 est un tournant décisif dans la carrière de Kiné Lam. La petite griotte côtoie la maturité et compose sa première chanson. C’est le titre Mame Bamba dont les paroles sont un requiem en hommage au fondateur du mouridisme dont elle est un disciple reconnu. Forte de cette expérience, elle se projette sur l’avenir en créant son propre groupe pour honorer différentes prestations. L’interprète de Dogo précise : J’avais déjà mon propre groupe dont le manager était mon père. Mais elle ne parvint pas à enregistrer un album avec sa première formation musicale pour cause : A cette époque, les K7 n’existaient presque pas, précise-t-elle.

 

Deux ans plus tard, Kiné Lam accompagne feu Ndiaga Mbaye pour animer plusieurs manifestations partout à Dakar. Ses talents de chanteuses captivent l’attention de Boubacar Guiro, un promoteur de spectacles. Ce dernier parvient à convaincre les parents de la jeune Kiné Lam afin qu’elle rejoigne le mythique ensemble traditionnel du théâtre national Daniel Sorano. En 1978, Kiné Lam se retrouve dans le grand temple sous la direction de Maurice Sonar Senghor pour une audition. J’ai été auditionnée par des doyens comme Annette Mbaye d’Erneville, et Samba Diabaré Samb, se souvient-elle. Elle va se faire une place auprès de grandes voix comme Khar Mbaye Madiaga, Fatou Ndiaye Samb, Fanta Sakho, Mahawa Kouyaté, Khady Diouf, Madiodio Gningue, Ndèye Mbaye, Daro Mbaye, Ndiaye Samba Mboup, Ndiaga Mbaye etc. Dans le courant de cette même année, elle effectue sa première tournée internationale et découvre l’Hexagone.

 

La France est le premier pays que j’ai visité, précise-t-elle. Au sein de l’ensemble traditionnel de Daniel Sorano, Kiné Lam acquiert une notoriété en se distinguant avec une technique de chant dont elle a seul le secret. J’étais tellement célèbre qu’il fallait informer les promoteurs de mon indisponibilité, se rappelle-t-elle. Élevée au grade de Chevalier de l’ordre national du Lion par le président Abdou Diouf, la Diva Kiné Lam Mame Bamba peut côtoyer les grands noms de la musique sénégalaise. Dans la foulée de son ascension musicale, elle multiplie les voyages sur la France, l’Italie, l’Espagne, l’Angleterre et les USA pour honorer des contrats ou recevoir d’autres distinctions.

 

La naissance du Kaagu orchestra

 

Une première expérience musicale avec l’orchestre nationale en 1977 devient un succès pour Kiné Lam. Quatre ans plus tard, elle est accompagnée par le super étoile de Youssou Ndour pour réaliser Mame Bamba son premier album avec le producteur Mass Diokhané. Le projet d’avoir son propre orchestre commence à prendre forme avec la sortie de l’album Cheikh Anta en 1989. Le titre Dogo en hommage à son époux, traverse les frontières du Sénégal et fait de cet opus un succès jusque dans les locaux de Syllart son nouveau producteur sur les bords de la Seine. L’album Cheikh Anta enregistré au studio JBZ d’Abidjan a vu les participations de grands musiciens tels qu’Abdou Mbacké transfuge du Super Diamono de Dakar et le percussionniste Papa Ndiaye Guéwel sous la direction musicale du maestro Boncana Maïga.

 

Pensionnaire du théâtre national Daniel Sorano, Kiné Lam Mame Bamba doit se libérer pour honorer plusieurs contrats dans le cadre promotionnel de son album. Mais pour cette femme issue d’une famille modeste et ambitieuse, le dilemme n’a aucune raison d’exister. La Diva démissionne de Sorano sans hésiter. Elle assume son choix : Avec le succès de Dogo, le cachet d’un seul contrat équivalait à douze mois de salaires. Toujours obnubilée par l’idée d’avoir son propre orchestre, elle commence à jouer avec de jeunes musiciens tels que Pape Dembel Diop, Iba Ndiaye, Itou du groupe Oasis. Dans la perspective d’enregistrer un nouvel album en l’occurrence Balla Aïssa Boury, elle sollicite l’expertise musicale du grand Cheikh Tidiane Tall qui dirigera plus tard les destinées de l’orchestre Kaagu. Ainsi, dans la persévérance et l’abnégation, Kiné Lam Mame Bamba va baliser la voie et inspirer d’autres artistes chanteuses à disposer de leur propre formation musicale pour des prestations de qualité.

 

Almami CAMARA

 

 

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