Publié le 7 Jan 2025 - 19:22
FRANCE-AFRIQUE

Une séparation difficile

 

Alors qu'on n'a pas fini de commenter le départ des bases militaires françaises d'Afrique francophone et des perspectives de la coopération militaire entre lesdits partenaires, une sortie de Macron vient compliquer la tâche. 

 

C'est un divorce qui aurait pu se faire à l'amiable, mais il est en train de se faire dans la douleur. Entre l'Afrique francophone et la France, les relations se compliquent jour après jour. Hier, une déclaration du président de la République française est encore venue envenimer les rapports déjà tendus.

Selon Emmanuel Macron, c'est la France qui a été à l'origine des négociations pour une réorganisation de la coopération militaire et non l'inverse. “... On a décidé de réorganiser notre présence militaire... ; on nourrissait nous-mêmes un discours postcolonial. Dans les pays d'Afrique francophone, est-ce que ces bases avaient encore une justification ? Est-ce que c'est ça le rayonnement de la France ? Non. Ce n'était plus compris et c'était utilisé par les réseaux d'activistes, qui n'hésitaient pas à dire : regardez les Français, ils ont un camp avec 2 000 soldats, ils vont organiser un coup d'État”.

C'est pour lutter contre cette forme de désinformation, soutient le président français, que son pays avait décidé de revoir la coopération militaire avec l'Afrique francophone. “Nous avons proposé aux chefs d'État africains de réorganiser notre présence. Comme on est très poli, on leur a laissé la primauté de l'annonce. Ne vous trompez pas, c'est nous qui avons... Et parfois, il a fallu pousser. Ce n'est pas parce qu'on est poli que cela doit se retourner contre nous en disant qu'on est chassé d'Afrique. Dans bien de ces pays, on ne voulait pas enlever l'armée française ou même la réorganiser. Mais on l'a assumé ensemble”.

De l'avis de Macron, la France n'est pas en recul, comme certains l'ont prétendu. Elle est simplement lucide et elle s'adapte. Selon lui, ce sont les autres qui regardent les rapports entre la France et ses partenaires en Afrique avec des lunettes d'un autre temps.

L'autre partie du discours qui a le plus choqué, c'est quand il traite certains pays d'être ingrats. Parlant spécifiquement des pays du Sahel, le président français a affirmé  : “Je pense qu'on a oublié de nous dire merci, mais ce n'est pas grave, ça viendra avec le temps. L'ingratitude est une maladie non transmissible à l'homme. Je le dis pour tous les gouvernants africains qui n'ont pas eu le courage vis-à-vis de leurs opinions publiques de le porter, qu'aucun d'entre eux ne serait aujourd'hui un pays souverain si la France ne s'était pas déployée dans cette région. On était là à la demande d'États souverains. On est parti parce qu'il y a eu des coups d'État. À partir du moment où les gens ont fixé d'autres priorités, on est parti parce que nous ne sommes pas des supplétifs de putschistes.”

À l'en croire, la France est de toute façon en train de se tourner davantage vers les pays anglophones, des pays comme le Nigeria, le Kenya, l'Éthiopie... “Nos lunettes sur l'Afrique ne sont plus les bonnes”, a-t-il insisté. 

RÉACTIONS 

Ousmane Sonko parle d'affirmation erronée, pour le cas du Sénégal

Le Premier ministre Ousmane Sonko a été l'un des premiers dirigeants à réagir sur sa page Facebook. D'après lui, le président français n'a pas dit la vérité sur cette affaire relative au départ des bases militaires, en tout cas dans le cas du Sénégal. “Le président Emmanuel Macron a affirmé aujourd’hui (hier) que le départ annoncé des bases françaises aurait été négocié entre les pays africains qui l’ont décrété et la France. Il poursuit en estimant que c’est par simple commodité et par politesse que la France a consenti la primeur de l’annonce à ces pays africains. Je tiens à dire que, dans le cas du Sénégal, cette affirmation est totalement erronée”.

Selon le n°2 du régime sénégalais, aucune discussion ou négociation n’a eu lieu à ce jour entre les deux pays. “La décision prise par le Sénégal découle de sa seule volonté, en tant que pays libre, indépendant et souverain”.

Sur la souveraineté des États, Ousmane Sonko a aussi été plus ou moins tranchant. Au président français qui déclare “qu’aucun pays africain ne serait aujourd’hui souverain, si la France ne s’était déployée”, il rétorque : “Constatons que la France n’a ni la capacité ni la légitimité pour assurer à l’Afrique sa sécurité et sa souveraineté. Bien au contraire, elle a souvent contribué à déstabiliser certains pays africains comme la Libye avec des conséquences désastreuses notées sur la stabilité et la sécurité du Sahel. C’est enfin le lieu de rappeler au président Macron que si les soldats africains, quelquefois mobilisés de force, maltraités et finalement trahis, ne s’étaient pas déployés lors la Deuxième Guerre mondiale pour défendre la France, celle-ci serait, peut-être aujourd’hui encore, allemande”.

Le gouvernement tchadien dénonce un manque de reconnaissance 

Le Tchad a aussi réagi à cette sortie d'Emmanuel Macron. Dans un communiqué du ministre chargé de la Défense et des Affaires étrangères, le régime tchadien a exprimé sa “vive préoccupation” et parle d'une “attitude méprisante” du président français envers l'Afrique et les Africains. “L'histoire atteste que l'Afrique a joué un rôle déterminant dans la libération de la France lors des deux guerres mondiales. Les sacrifices immenses consentis par les soldats français pour défendre la liberté ont été minimisés et aucun remerciement digne de ce nom n'a été exprimé”, regrette le gouvernement tchadien. Rappelant que le Tchad n'a pas attendu la France pour bâtir une armée forte et résiliente. Le communiqué martèle que Parsi n'a jamais appuyé le Tchad de manière significative dans ce domaine. “En 60 ans de présence marquée par des guerres civiles, des rébellions et une instabilité politique prolongée, la contribution française a souvent été limitée à des intérêts stratégiques propres, sans véritable impact pour le développement durable du Tchad”, lit-on dans le communiqué qui invite le président français à se concentrer sur les problèmes internes de son pays au lieu de s'en prendre à l'Afrique. 

 

 

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