Publié le 31 Mar 2022 - 09:43
INCIDENTS AU CAMP PÉNAL, CELLULES GAZÉES, DÉTENUS ENVOYÉS À L’HÔPITAL

Frapp et l’administration pénitentiaire à couteaux tirés

 

Les cellules du camp Pénal n’ont pas encore livré tous leurs secrets. Si le mouvement Frapp a parlé de cellules gazées par des matons, lors d’une fouille de routine, et des prisonniers envoyés à l’hôpital, l’administration pénitentiaire dément toute violence envers les détenus.

 

Que se passe-t-il au Camp pénal ?  Dans un document parvenu à notre rédaction, hier, les amis de Guy Marius Sagna rapportent un usage abusif de la force, avec le jet de grenades lacrymogènes dans les chambres 13, 14 et 15 de ladite prison. A la suite de cette attaque, informe le secrétariat exécutif national (SEN) du FRAPP, 18 détenus ont été ainsi envoyés à l’infirmerie en raison de leur mauvaise condition de santé souffrant d’asthme. Toujours dans le document, les camarades de Guy Marius Sagna « invitent l’administration de la prison de Camp pénal à faire intervenir la commission spécialement mise en place pour les conflits avant de tirer sur les prisonniers ». Et dénoncent le surpeuplement du Camp pénal et le manque de formation de certains agents de cette administration.  

Mais, cette version est battue en brèche par Mbaye Sarr, Inspecteur Régional de l’Administration Pénitentiaire (IRAP) de Dakar. Il affirme que l’information selon laquelle des grenades lacrymogènes ont été lancées dans les chambres 13, 14 et 15 de la prison du Camp pénal et 18 détenus envoyés à l’infirmerie à la suite d’échauffourées, est fausse. « Ce qui s’est passé est très simple. Ce matin, on a fouillé deux chambres, les 14 et 12 sans aucun problème. Au moment de fouiller la chambre 15, un groupe de détenus a refusé de sortir pour qu’on procède à la fouille », a confié Mbaye Sarr sur les ondes de la Rfm. Les détenus, a-t-il confié, ont refusé systématiquement que leur chambre soit fouillée, brûlant même des matelas.

Selon toujours nos informations, les gardes se sont mis en position attendant des instructions. C’est ainsi que l’administration a fait appel au comité des sages constitué de prisonniers élus par leurs pairs pour les faire revenir à la raison. Ce que le groupe de réfractaires a finalement accepté. Les familles de prisonniers qui étaient au niveau du portail ont été ainsi sensibilisées par rapport à la situation, se défend l’administration pénitentiaire.

Cet incident vient relancer les divergences entre les organismes des droits de l’homme et l’administration pénitentiaire, souvent accusée de négligence envers les détenus. Ainsi, les problèmes d’hygiène, de surpeuplement, la vétusté des bâtiments et le sous-effectif des agents sont souvent pointés du doigt par les organismes des droits de l’homme comme l'Association pour le soutien et la réinsertion sociale des détenus (Asred).

D'après l’association de défense des prisonniers, la célérité dans les dossiers d’instruction pourrait permettre aux détenus d’être édifiés sur leur sort, surtout avec la criminalisation de la drogue, du viol, du terrorisme et l’apparition de nouvelles infractions sur la cybercriminalité et la protection des données personnelles. Selon l’Asred, la vraie question aujourd’hui est le surencombrement des cabinets d’instruction.

Les défis du milieu carcéral sénégalais

Pour remédier à ces défis, l’Etat du Sénégal entend mettre en œuvre son programme de construction de nouveaux centres pénitenciers au Sénégal. En effet, les deux seules vraies prisons sont la Maison d'arrêt et de correction (Mac) de Saint-Louis et la Maison d'arrêt de Rebeuss (Mar) construites, respectivement, en 1863 et en 1929. Toutes les autres prisons du pays sont d'anciens locaux transformés en geôles. Le gouvernement sénégalais compte aussi faire une série de recrutements pour renforcer l'effectif de l'administration pénitentiaire.

 Le ministère de la Justice Ismaëla Madior Fall indiquait en 2017 la construction des établissements pénitentiaires modernes de 500 places à Fatick, Ziguinchor, Diourbel, Saint-Louis, Kaolack, Thiès et Tambacounda. « Il y a encore dans notre pays une relative surpopulation dans les prisons. C’est pour ça que l’option a été prise par le Président de la République de construire une extension de la prison de Rebeuss à Sébikotane avec 500 places qui vont être aménagées. Il y a aussi le projet de construction d’une nouvelle prison de 2000 voire 2500 places », avait indiqué l’ancien garde des sceaux.

Toutefois, ces projets peinent à se concrétiser laissant présager de futures tensions dans nos établissements carcéraux. 

Makhfouz NGOM

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