Le ministre de l’Intérieur instruit les préfets de se pourvoir en cassation, au besoin
Après les décisions rendues par la Cour d’appel et validant certaines listes de partis et de coalitions de partis de l’opposition initialement rejetées par les autorités préfectorales, le ministre de l’Intérieur compte passer au niveau supérieur. Il veut aller à la Cour suprême pour casser les décisions de la Cour d’appel.
Après que la Cour d’appel a décidé de rétablir certains partis et coalitions de partis dans leurs droits, après le rejet de leurs listes aux prochaines Locales, l’autorité semble ne vouloir rien céder.
En effet, dans une note interne adressée aux préfets et sous-préfets, le ministre de l’Intérieur leur demande ‘’de ne pas intégrer les listes supposées validées par la Cour d'appel, car aucune notification officielle n'est encore faite. Le cas échéant, il sera possible de prendre des arrêtés additifs. Sauf instruction contraire, on s'inscrit dans une perspective d'élever le contentieux au niveau de la juridiction supérieure’’.
Ainsi, il compte demander à ses représentants administratifs de se pourvoir en cassation. D’ailleurs, ils prévoient de voir avec leurs experts juridiques si ce pourvoi est suspensif ou pas.
En tout état de cause, dit l’autorité, il leur faut ‘’bien préparer les éléments de droit ou de fait à mettre à l'appui, si nécessaire ; se garder de tout commentaire, surtout envers les politiques’’. Elle leur demande, en outre, de ‘’transmettre les cas de recours ayant prospéré et dont (vous) avez écho’’. Mais elle reste ferme : ‘’partout où les cours d'appel ont manifestement violé la loi, le ministre vous demande de former des pourvois en cassation auprès de la Cour suprême. Il vous demande également d'encadrer personnellement les préfets et sous-préfets, et de travailler avec le secrétaire général, le DGE. Vous réclamerez également qu'on vous notifie les arrêts rendus et non de simples lettres qui n'ont qu'une valeur informative’’, lit-on toujours dans la note interne.
Cette dernière fait suite non seulement à la décision de la Cour d’appel de donner raison aux coalitions de l’opposition ayant déposé des recours après le rejet de certaines de leurs listes, mais également à la publication, hier, des listes définitives par les préfets et sous-préfets.
A Dakar, par exemple, plus d’une semaine après la clôture du dépôt des listes des candidats pour les Locales de 2022, la préfecture du département a publié hier le répertoire des coalitions retenues pour briguer les suffrages. Ainsi, un arrêté portant publication des déclarations de candidature à l’élection des conseillers municipaux a été publié. Le document rend ainsi publiques les listes recevables suivant l’ordre de dépôt les dossiers de candidature présentés par les partis ou coalitions de partis politiques légalement constitués pour l’élection des conseillers municipaux de la ville de Dakar du 23 janvier 2022. Il s’agit, renseigne l’arrêté de l’autorité préfectorale : du parti Convergence démocratique Bok Guis Guis, de la coalition Benno Bokk Yaakaar, de la grande coalition Wallu Sénégal, de la coalition Sénégal 2035, du parti Union citoyenne Bunt Bi et de la coalition Yewwi Askan Wi.
D’autres localités ont également officiellement annoncé les coalitions retenues. Flairant le coup du ministère de l’Intérieur, Yewwi Askan Wi voulait prendre les devants. Déterminée à participer aux prochaines échéances électorales, après le démarrage de la publication des listes définitives, elle a, à travers une circulaire publiée hier, instruit ses membres à procéder à des vérifications. ‘’A compter de ce jour et conformément aux articles L251 et L287 du Code électoral, nous demandons à tous les mandataires de listes de la coalition Yewwi Askan Wi de se rendre auprès des préfectures et sous-préfectures pour vérifier l’effectivité de la publication des listes de candidats investis par notre coalition’’, relève le document. Toujours dans la circulaire, ces mandataires sont également instruits de demander une copie de l’arrêté de publication desdites listes à l’autorité administrative, comme prévu par les derniers alinéas des deux articles précités du Code électoral.
A partir de là, ajoute-t-on, le mandataire dont la liste n’a pas été publiée devra s’attacher les services d’un huissier pour constater ce fait en vue de déposer une requête en réclamation auprès de la Cour d’appel de ressort dans les trois jours suivant ce constat, tel que prévu par les articles L252 et L288 du Code électoral.
La lutte n’est pas terminée et s’annonce âpre.
HABIBATOU TRAORE