‘’C’est un coup d’arrêt net pour notre économie en développement’’
Maillon essentiel de l’économie, le système bancaire n’est guère épargné par la crise actuelle due à la Covid-19. Dans cet entretien, le vice-président de l’Apbef (Association professionnelle des banques et des établissements financiers du Sénégal), Malick Ndiaye, revient sur les impacts de la crise.
On entend la grogne dans tous les secteurs, sauf chez les banquiers. Est-ce à dire que les banques sont, pour le moment, épargnées par la crise ?
(Rires) Vous le dites certainement pour taquiner, mais le secteur bancaire est loin d’être épargné par cette crise due à la pandémie de Covid-19. Nous sommes les partenaires privilégiés du monde économique et financier. Quand les entreprises, les professionnels et les particuliers souffrent, leurs banques souffrent forcément. Aujourd’hui, le système bancaire est en train de voir comment mettre en place des stratégies pour atténuer les impacts négatifs attendus à cause de cette pandémie mondiale qui n’épargne personne. Nous travaillons pour faire face aux conséquences néfastes de la Covid-19.
Concrètement, comment se manifeste cette crise et quels sont les secteurs les plus touchés ?
Concrètement, il y a une baisse des activités économiques. Laquelle va induire une baisse du chiffre d’affaires des entreprises, va entrainer une baisse des investissements… Tous les chefs d’entreprise sont en train de s’ajuster pour revoir leur plan de marche et tout cela va se ressentir au niveau du système bancaire. Le chiffre d’affaires du système bancaire va baisser, évidemment ; et nous souhaitons que la crise soit la plus courte possible, pour que ses effets ne soient pas disproportionnés par rapport à nos capacités d’absorption. Comme vous l’avez vu, la puissance publique, l’autorité monétaire, les acteurs économiques, tous ont déployé beaucoup d’efforts pour contenir les effets à des niveaux soutenables. Nous sommes une économie en développement, qui a besoin de beaucoup de croissance, de consommation et d’investissement. C’est un coup d’arrêt net auquel nous sommes en train d’assister.
Avez-vous procédé à une évaluation du manque à gagner pour le secteur ?
Il est prématuré d’évaluer les impacts au plan financier. Nous savons que les conséquences sont déjà difficiles. Quand vous prenez des secteurs clés comme le transport aérien, le tourisme et la restauration, on voit nettement comment la crise se manifeste ; avec des emplois menacés, des fermetures d’hôtels… Aussi, à cause des gestes barrières, tous les secteurs (BTP, transport de masse, enseignement…), tous les secteurs sont concernés. Même le secteur agricole n’est pas épargné. La mobilité étant réduite, les déplacements restreints, avec la suppression de certains marchés, ils ont du mal à trouver des débouchés. Tout ça aura des répercussions au niveau du système bancaire. Mais il est très tôt pour en avoir une idée précise.
Quel est, selon vous, le meilleur moyen pour sauver l’entreprise sans compromettre le système bancaire ?
Il faut sauver l’entreprise. Il faut sauver l’économie et tous les acteurs économiques. Nous nous réjouissons du plan de riposte mis en place par l’Etat, qui comporte un important volet de mobilisation de ressources financières. De ce point de vue, les banques sont appelées à aider les entreprises à ne pas avoir de difficultés, loin s’en faut. Déjà, la Banque centrale nous a demandé de faire des efforts pour accepter des reports d’échéance sans intérêt, pour trois mois renouvelable une fois. Le gouvernement est aussi en train de mettre en place un fonds de garantie de prêt en faveur des entreprises. Nous y travaillons avec le ministère en charge de l’Economie et son homologue des Finances, afin de mettre en place un dispositif d’appui et de soutien à l’entreprise.
Evidemment, ce dispositif ne doit pas compromettre les capacités du système bancaire. Autrement, cela n’aurait pas un intérêt et serait assez gravissime, puisqu’il faut également maintenir la stabilité du système financier. Oui pour un déploiement des mesures de sauvegarde, mais comme je dis, tous les acteurs ont besoin de soutien. Seule la solidarité peut nous aider à nous en sortir. D’où la contribution effectuée par les banques à hauteur de 1 milliard de F CFA.
M. AMAR