Ce n'est pas gagné
Au Sénégal, la modernisation des daara tant vantée depuis le régime du Président Wade relève encore plus de l’ordre de l’invocation que de la réalité. Dans la région de Louga où une certaine expérimentation est menée depuis 2009, les chiffres sont parlants et édifient surtout sur le long chemin qui reste à faire.
Dans la région de Louga, les moyens injectés ne sont même pas le fait de l’État, tandis que les collectivités locales sont à la traîne. C’est le Projet Usaid/Éducation de base, dans sa composante Enfants vulnérables, qui fait office de locomotive, en attendant que les wagons du partenariat tant souhaité se mettent véritablement en branle. C’est en septembre prochain que le Projet, prévu pour durer quatre ans, va prendre fin. Et il appartiendra aux bénéficiaires, État et collectivités locales surtout, d’en assurer la continuité. Seulement, à sept mois de l’échéance, ce qui reste à faire est immensément plus important que le niveau de réalisation actuel. 56 daara seulement (26 à Louga, 18 à Kébémer, 11 à Linguère) sur les 1 194 que compte la région sont déjà pris en considération. 2 461 talibés de 6 à 12 ans sont enrôlés dans le référentiel de compétences en français, ce qui permettra de booster le taux brut de scolarisation dans cette région dont la place en la matière laisse à désirer.
1 595 enfants de 13 à 18 ans sont inscrits dans des filières de formation pré-professionnelle et professionnelle. 31 collectivités locales sur les 47 que compte la région sont concernées pour le moment. Sur un total de 89 439 apprenants, cela apparaît encore comme une goutte d’eau dans la mer. Du point de vue de la répartition spatiale, le département de Kébémer se taille la plus grande part avec 528 daara. Louga en compte 427 et Linguère 239. 66 % de ces daara n’ont pas d’eau, 82 % sont sans latrines et 64 % sans abris d’apprentissage. 41% n’ont pas accès à l’électricité. Tandis que 40 % des daara pratiquent la mendicité. Mais, 89% sont favorables à l’apprentissage du français. D'où l'urgence d'impulser une véritable modernisation des daara.
De bons points engrangés
Il y a à se féliciter cependant de la mise en place de mécanismes communautaires d’accompagnement. On peut citer les comités de gestion des daara qui mènent des activités en fonction des plans d’action établis. 53 des 56 daara précités en disposent déjà. Dans la typologie des problèmes prioritaires identifiés, il y a l’eau potable, l’édification de clôture, le couchage, les produits et équipements d’hygiène, entre autres. Au sein de ces comités de gestion, les femmes ont mis en œuvre le concept «Ndeyu daara». Depuis juillet dernier, en partenariat avec l’Inspection d’Académie, la Fédération régionale des associations des écoles coraniques (Fraec) a mis en place la Mutuelle de Santé des Daara de Louga (Musdal).
Le Projet Usaid/Edb a initié un partenariat avec l’Inspection d’Académie, le Conseil régional, la Chambre des métiers et les Organisations communautaires de base concernées. Des résultats en termes de succès et de limites ont été obtenus dans quinze filières porteuses, avec comme cible la jeunesse non scolarisée, en rupture scolaire, les parents démunis. Le Projet a aussi mis la main à la pâte, en procédant à la réhabilitation d’espaces d’apprentissage, la construction de blocs d’hygiène, de dortoirs, de cuisine et en faisant de l’adduction d’eau au bénéfice de certains daara. Il en est de même des équipements scolaires : 1 032 tables-bancs, des tableaux chevalets, des chaises pour bureaux, du mobilier de rangement, des fournitures scolaires et matériels d’hygiène.
Moustapha SECK
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