Publié le 15 Jan 2024 - 12:52
NATIONALITE DE KARIM WADE

Un véritable serpent de mer !

 

Certains Sénégalais ont toujours accusé Karim Wade d’avoir la double nationalité ou d’être un binational, à la fois Sénégalais et Français. Avec cette nouvelle polémique, son parti monte au créneau pour démonter les accusations.

 

De quoi s’agit-il ? En fait l’article 28 de la Constitution sénégalaise impose à tout candidat à la présidentielle d’être exclusivement Sénégalais. ‘’Tout candidat à la Présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise, jouir de ses droits civils et politiques, être âgé de trente-cinq (35) ans au moins et de soixante-quinze (75) ans au plus le jour du scrutin. Il doit savoir écrire, lire et parler couramment la langue officielle’’. Voilà le cœur du débat en ce qui concerne le fils de l’ancien président de la République, né à Paris de mère française. De ce fait, il est également Français et Sénégalais de par sa naissance.

Depuis que Karim Wade a pris le lead du Parti démocratique sénégalais et que des ambitions présidentielles avaient commencé à lui être prêtées, cette accusation a toujours été mise sur la table par ses adversaires. En 2019, alors qu’il se portait candidat pour la première fois, le fils de l’ancien Président avait initié une procédure pour renoncer à sa nationalité française, en vue de se conformer à la législation en vigueur. Etait-il allé jusqu’au bout de la démarche ? Les réponses sont divergentes. Dans un communiqué, publié hier, la coalition Karim Président répond à ses détracteurs. ‘’Questionner la nationalité de Karim Wade, qui a clairement renoncé à sa binationalité est l'expression méprisable d'une discrimination ou d'une xénophobie qui n'honore pas certains candidats qui en sont à l'origine. Le Conseil constitutionnel, après une étude approfondie, a statué de façon incontestable sur cette question. Karim Wade a accompli, conformément aux exigences légales, toutes les formalités nécessaires concernant sa renonciation à la nationalité française qui au demeurant a été actée par les autorités françaises.’’

En fait, le débat a été ramené au-devant de l’actualité à la faveur d’un document publié le week-end et qui montre que Karim Wade serait inscrit sur les listes électorales en France. Journaliste à Pressafrik, Ayoba Faye indique sur son compte X : ‘’Karim Wade est toujours Français ! On vient juste de vérifier sur le site officiel service-public.fr sur lequel est disponible le fichier électoral. A ce jour du 13 janvier 2024, le candidat du PDS est toujours inscrit sur les listes électorales françaises.’’ Pour lui, à la lumière de cette information, il y a lieu de douter de l’effectivité de la procédure de renonciation que ses proches n’ont eu de cesse d’invoquer.

Très vite, l’information fait le tour de la toile et chacun y va de son commentaire. Certains candidats n’ont d’ailleurs manqué de s’engouffrer dans la brèche. Dans un communiqué, Thierno Alassane Sall, candidat à la Présidentielle, interpelle le Conseil constitutionnel (voir ailleurs).  

Karim est-il allé jusqu’au bout de sa renonciation ?

Selon la loi française, la nationalité qui peut s’acquérir de plusieurs manières peut aussi être perdue dans certaines conditions, en suivant une certaine procédure. Aux termes desdites dispositions, ‘’perd la nationalité française le Français, même mineur, qui, ayant une nationalité étrangère, est autorisé, sur sa demande, par le Gouvernement français, à perdre la qualité de Français. Cette autorisation est accordée par décret’’. Aussi, ajoutent les mêmes dispositions, ‘’le Français qui se comporte comme le national d'un pays étranger peut, s'il a la nationalité de ce pays, être déclaré, par décret après avis conforme du Conseil d'Etat, avoir perdu la qualité de Français.’’ Dans le cas de Karim Wade, c’est bien lui qui avait initié, en tout cas selon ses proches, une procédure de renonciation.

Pour les soutiens du fils de Wade, le Conseil constitutionnel a clos le débat en ‘’déclarant recevable la candidature de Karim Wade, après un examen minutieux du strict respect des conditions imposées pour se porter candidat à l'élection présidentielle’’, soulignent-t-ils non sans s’insurger contre ce qu’ils considèrent comme un acharnement, un racisme et une xénophobie. ‘’Nous déplorons que, malgré cette décision, certains s'acharnent à tenter de discréditer Karim Wade en soulevant des questions fantaisistes relatives à sa nationalité française. Ces manœuvres politiciennes portent atteinte à l'esprit de notre démocratie et visent à détourner l'attention des citoyens des enjeux réels de l'élection présidentielle du 25 février prochain’’, lit-on dans leur communiqué.

En fait, ce qu’il faut préciser, c’est que le Conseil apprécie le caractère exclusif de la nationalité des candidats en se basant essentiellement sur la déclaration sur l’honneur des candidats eux-mêmes. En sus de cette déclaration sur l’honneur, il y a le certificat de la nationalité qui prouve que le concerné est sénégalais, mais qui ne saurait prouver qu’il est exclusivement sénégalais. Même si la loi offre au Conseil la possibilité de mener toutes diligences de nature à vérifier certaines déclarations, le temps imparti ne permet pas de mener certaines investigations poussées. Il appartiendra donc à ceux qui reprochent à Karim Wade d’être également de nationalité française d’en apporter la preuve devant le Conseil constitutionnel.

Rappelons que seuls les candidats retenus par le Conseil constitutionnel peuvent introduire un recours pour demander le retrait de Karim Wade de la liste. Encore faudrait-il qu’ils puissent produire des preuves suffisantes pour montrer que le fils de l’ancien Président détient la nationalité française.

BI ET DOUBLE NATIONALITE

La réponse de l’ancien Président aux détracteurs de son fils

Dans une lettre ouverte en date de 2016, Abdoulaye Wade livrait son point de vue sur cette question déjà vielle de près de 10 ans.

C’était une réponse aux allures d’un véritable cours de droit. D’emblée, soulignait l’ancien Président, il faut distinguer nationalité d’origine et nationalité d’acquisition. ‘’La nationalité d’origine est celle que l’enfant acquiert automatiquement à sa naissance. Elle peut relever du lieu de naissance (jus soli, droit du sol) ou du lien de sang (jus sanguinis). L’enfant n’a choisi ni son lieu de naissance ni ses parents. La nationalité qu’il acquiert du fait de ces deux droits qui s’imposent à lui. La nationalité d’acquisition est la nationalité que l’on acquiert au cours de sa vie. Elle suppose une demande de l’intéressé, ce qui la différencie de la nationalité d’origine, car pour avoir celle-ci, l’individu n’a rien demandé…’’   

 La bi-nationalité et la double nationalité, expliquait l’avocat, sont traitées différemment pour ce qui concerne la perte de la 2ee nationalité. ‘’Rappelons que le droit français prescrit que l’acquisition d’une autre nationalité fait perdre la nationalité française, même si c’était une nationalité de naissance, mais l’acquisition d’une autre nationalité n’est pas soumise à des formalités françaises…’’ Pour lui, il y a une sorte de discrimination contre les Sénégalais établis à l’étranger. ‘’Alors qu’il n’est rien demandé au Sénégalais non émigré, le Sénégalais émigré doit, à peine d’irrecevabilité de sa candidature, prouver qu’il est de nationalité exclusivement sénégalaise, ce qui signifie pratiquement qu’il doit renoncer à sa nationalité française d’origine ou d’acquisition’’, constatait-il pour le déplorer, non sans s’interroger sur comment prouver qu’on n’a pas une nationalité. Par exemple, dans le cas de Karim, comment prouver qu’il est exclusivement sénégalais, au cas où on le lui demanderait. ‘’Le terme « exclusivement » introduit une impossibilité, car si on peut prouver qu’on n’est pas Français, Belge ou autre, on ne peut pas prouver qu’on est exclusivement Belge, Allemand, Sénégalais ou Français’’.

Abdoulaye Wade de se demander comment justifier que l’on ne se focalise que sur un cas et en laissant d’autres. ‘’Comment justifier que l’on singularise un candidat plutôt qu’un autre et qu’on lui demande, lui seul, de prouver qu’il n’a aucune autre nationalité que sénégalaise, alors que Macky Sall lui-même ne peut pas le prouver qu’il n’est pas américain, alors que la plupart des Sénégalais sont convaincus qu’il a acquis la nationalité américaine, qu’il est domicilié à Houston où il possède une maison ? Qu’est ce qui prouve que sa femme et, surtout ses enfants, n’ont pas la nationalité américaine ? Si l’on demande à une personne dont la bi nationalité est connue de prouver qu’elle est exclusivement de nationalité sénégalaise, la même preuve devrait, à peine de discrimination, être exigée de tous les candidats.’’

Mor AMAR

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