Publié le 7 Mar 2019 - 15:47
NOTE DE LECTURE ‘’NDOUMBELANE’’

Le sévère diagnostic de Papa Makhtar Diallo de la société sénégalaise

 

Après ‘’Je m’indigne, donc je suis’’ et une participation dans ‘’Sen Njaxass (Cocktail citoyen)’’, Papa Makhtar Diallo revient à la charge avec ‘’Ndoumbélane’’ qui sonne comme un pied dans le plat d’une société sénégalaise en pleine déliquescence. La cérémonie de dédicace aura lieu ce samedi à L’Harmattan.

 

Une conscience citoyenne presque inexistante. Des valeurs piétinées. Des puissants qui écrasent sans pitié les plus faibles. C’est le tableau sombre décrit par Papa Makhtar Diallo dans ‘Ndoumbélane, la jungle sénégalaise’. Ici, il ne semble y avoir ni foi ni loi. Si ce n’est celle du plus fort. Indigné, dégoûté, agacé, Papa Makhtar, encore une fois, trempe sa plume dans l’encrier pour cracher son courroux à travers cet ouvrage de 147 pages. Dans ‘’Ndoumbélane, la jungle’’, l'auteur ne rate pas les politiques. Ou bien plutôt les politicards, comme il aime les appeler. Comme à son habitude, il ne mâche pas ses mots. A la page 36, par exemple, il lâche : ‘’… Présentez-moi un politicien honnête et je vous présenterai des prostituées vierges’’ (sic). Telle est, en tout cas, l’idée que se fait le président du Mouvement des indignés du Sénégal sur la manière de faire la politique dans le pays.

En fait, à l’en croire, au Sénégal, il y a malheureusement bien plus de politicards que d’hommes politiques au sens noble du terme. Comment en est-on arrivé là ?, s’interroge-t-il.

Remontant le temps, l’activiste revient sur le multipartisme intégral introduit par le deuxième président de la République, Abdou Diouf, dans les années 1980. C’était, si l’on se fie à son raisonnement, l’amorce du déclin de la vertu dans le landerneau politique. A partir de ce moment, explique-t-il, fini les idéologies. Fini les convictions. Et l’arène politique commença à devenir un véritable capharnaüm où les intérêts égoïstes priment sur le bien commun. Chacun créant sa propre formation politique. Une situation qui, selon lui, s’est davantage développée sous les règnes des présidents Wade et Sall. Dans un tel contexte, il ne faudrait pas s’étonner de la recrudescence de la violence, semble dire l’auteur outré. D’ailleurs, cette violence dans la politique est l’un des thèmes phares du livre, le deuxième produit par celui qui est affectueusement appelé ‘’PMD’’, après ‘’Je m’indigne, donc je suis’’.

Egalement co-auteur du livre collectif ‘’Sen Njaxass’’, Papa Makhtar Diallo ne se limite pas au champ politique. Il touche à bien des secteurs pour fustiger les pratiques les plus viles, ayant cours dans la société sénégalaise. A Ndoumbélane, selon lui, pas de place à la méritocratie. C’est le règne de la ruse, des artifices, de la roublardise, si l’on en croit le chroniqueur à Sen Tv. Dans ce livre pamphlet, la douane en prend aussi pour son grade. Dénonçant la grande corruption dans ce corps paramilitaire, il regrette que le souci de collecter de l’argent au profit du budget de l’Etat l’emporte  bien souvent sur l’exigence de protection de l’économie nationale. Toutefois, PMD ne manque pas de rendre dans son livre un vibrant hommage à tous ces gabelous qui, jour et nuit, font leur travail de manière consciencieuse.

Outre cette thématique, l’auteur aborde également d’autres sujets aussi importants et passionnants. C’est le cas de l’école sénégalaise qui, à l’en croire, est presque en lambeaux. Il cite parmi les causes de cette situation déliquescente : la pauvreté ambiante des ménages, le déficit d’infrastructures, le niveau des enseignants… Pour lui, il urge de repenser le système éducatif en vue de le rendre plus performant. Ce qui nécessite, d’après M. Diallo, l’implication de tous. Parlant du foncier, l’auteur regrette surtout la tendance à l’accaparement des terres par un groupuscule au détriment du grand nombre. Pour lui, le foncier, au Sénégal, est un véritable scandale qu’il faudrait prendre à bras le corps. Il en veut pour preuves les nombreux litiges fonciers dont fait état la presse à longueur de parutions, ainsi que les affaires pendantes devant les juridictions.

Revendiquant fièrement son statut d’indigné, Papa Makhtar tire sur tout ce qui bouge. Ce qui est loin d’être une sinécure. Car ‘’un indigné, dit-il, est somme toute très gênant. Il renvoie à la société une image pas toujours digérée. Il révèle par sa seule présence dans certains endroits des réactions crispées. J’ai vu des hommes se métamorphoser en un temps record. Je reste néanmoins optimiste tout en sachant que la route sera longue et complexe, mais je ne me sens vivre que si utile à mes semblables’’. Les critiques, les suspicions, les accusations ainsi que les rejets, PMD les perçoit. Mais ne s’en préoccupe nullement. Bien au contraire. Il dit : ‘’J’ai toujours su que ce serait le prix à payer, puisqu’il s’agissait, au fond, de se mettre au service exclusif d’une indignation non sélective pour combattre les injustices.’’

Son intention, en tant qu’indigné, fait-il savoir, n’est pas d’instaurer le désordre, mais simplement de se battre contre l’ordre établi. Mais le pire, si l’on se fie toujours à l’auteur, c’est que dans ce système, la victime est aussi coupable que son bourreau.

BIGUÉ BOB

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