La réalité climatique toujours encore plus alarmiste que prévue
Le second volet du 6e rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a été publié ce 28 février 2022. Traitant du thème ‘’Impacts, adaptation et vulnérabilité’’ d’une hausse de la température mondiale entre 1.5 et 2 degrés, il confirme les prédictions des précédents travaux du groupe d’experts sur l’évolution du climat.
La pêche, l’agriculture, la santé, l’accès à l’eau, l’habitat, etc. Pratiquement, tous les aspects de la vie moderne sont menacés par le réchauffement climatique en cours à travers la planète. Si une hausse de 2° de moyenne paraît insignifiante sur le papier, ses conséquences sont lourdes et deviennent de plus en plus graves à chaque demi-degré de plus. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) l’a de nouveau expliqué, ce lundi, dans le second volet de son 6e Rapport sur le climat depuis la Cop21. L’augmentation des températures entraîne l’acidification des océans avec des effets néfastes sur les volumes de pêche qui seront réduits de 1,5 million de tonnes par an à +1,5°C, à plus de 3 millions de tonnes par an à plus de 2°C.
Les rendements des cultures de maïs, de blé ou de riz vont se réduire, même en Europe. +2°C, c’est potentiellement deux fois plus de personnes sujettes à des pénuries d’eau qu’à +1,5°C (avec cependant de grosses variabilités selon les régions). Enfin, le réchauffement aura des impacts directs sur la santé humaine : une augmentation de la mortalité liée aux vagues de chaleur ; une hausse des maladies portées par les moustiques (telles que la malaria et la dengue) ; une augmentation des impacts indirects (famines, problèmes d’accès à l’eau, déplacements de population).
La situation est déjà alarmante. Selon les experts, la planète a gagné 1°C de moyenne par rapport à 1850 (période préindustrielle). Ce qui fait que l’on observe déjà les conséquences du réchauffement climatique. La réduction de la taille de la banquise arctique ou la fonte de nos glaciers dans les Alpes en sont des représentations emblématiques. Mais le réchauffement climatique augmente également le risque d’événements extrêmes (vagues de chaleur ou de froid, sécheresses, pluies torrentielles).
Plus nous passons de temps au-dessus de la barre de +1,5°C, plus les conséquences à long terme seront lourdes
‘’Quand bien même que l’on arrêterait toutes émissions aujourd’hui, les quantités que nous avons relâchées dans l’atmosphère auront des conséquences sur les siècles, voire le millénaire à venir. Les émissions humaines déjà présentes dans l’atmosphère ont peu de chances d’engendrer un réchauffement de 1,5°C d’ici la fin du siècle. Cependant, si les émissions se poursuivent à leur rythme actuel, ce réchauffement sera atteint entre 2030 et 2050 et se poursuivra dans la seconde moitié du siècle’’, alerte le rapport du GIEC. Ceci avant d’ajouter sur la gravité de la situation : ‘’Même si nous n’arrivons pas à réduire nos émissions suffisamment vite pour rester en dessous de la barre de +1,5°C, une politique assez ambitieuse sur le sujet nous permettrait de revenir sous cette limite, après quelques décennies. Mais plus nous passons de temps au-dessus de la barre de +1,5°C, plus les conséquences à long terme seront lourdes.’’
Ce rapport est publié trois mois après la Conférence internationale sur le climat, Cop26. Adopté le samedi 13 novembre 2021, le "Pacte de Glasgow pour le climat" est un accord pour accélérer la lutte contre le réchauffement de la planète, sans promettre de le contenir à 1,5 °C, ni de répondre aux demandes d'aide des pays pauvres. Sur le point critique de la limitation des températures, alors que la planète se trouve, selon l'ONU, sur une trajectoire "catastrophique" de réchauffement de 2,7 °C par rapport à l'ère préindustrielle, le texte appelle les États membres à relever leurs engagements de réduction plus régulièrement que prévu dans l'Accord de Paris, et ce dès 2022. Pourtant, cette entente promettait de limiter le réchauffement "bien en deçà" de 2 °C et si possible à 1,5 °C.
Des changements climatiques très sensibles au Sénégal
Au Sénégal, le changement climatique est une menace déjà sensible et plusieurs faits peuvent l’illustrer : ‘’Une baisse de la pluviométrie d’environ 300 mm en 30 ans ; des pluies plus intenses et de plus courtes durées ; une augmentation de la température d’environ 1,7 °C en 30 ans, etc. Les impacts négatifs sont également multiples : avancée de la mer ; érosion côtière ; désertification ; réduction des mangroves ; perte de terres arables et de pâturages ; réduction de la disponibilité de l’eau pour l’irrigation, la boisson et autres activités productrices, etc.’’, selon des experts de IedAfrique.
À ces défis ; s’ajoute la marginalisation de certaines couches sociales (notamment les femmes, les enfants et les groupes vulnérables) qui sont confrontées à des obstacles formels et informels dans l’accès et le contrôle des ressources (la terre), aux services de l’État et aux marchés.
Si les Etats n’ont pas eu le courage de s’engager pour sauver la planète, le GIEC montre tout de même la voie aux dirigeants du monde. Quatre volets ont été évoqués pour espérer influer sur le réchauffement climatique. Pour ne pas dépasser un réchauffement de 2°C d’ici la fin du siècle, estiment-ils, ‘’nous devons réduire de 25 % nos émissions d’ici 2030 et atteindre la neutralité carbone en 2070. Pour rester en dessous de +1,5°C, les émissions doivent être réduites de 50 % d’ici 2030 et être nulles à partir de 2050’’. Il ne s’agit pas simplement de produire mieux, mais aussi de consommer moins. Pour atteindre les objectifs du GIEC, il faudrait, par exemple, réduire de moitié, voire de trois-quarts la demande des bâtiments (chauffage et autres coûts de fonctionnement), des industries et du transport.
En même temps que les réductions des émissions, le rapport préconise une réduction drastique de l’utilisation des énergies fossiles et tout particulièrement du charbon et du pétrole. Plus difficile encore, retiennent les experts, ‘’si nous voulons maintenir les températures terrestres à un niveau acceptable, nous devons nous préparer, après 2050, à absorber plus de CO2 que ce que l’on rejette (émissions négatives). Cela passe tout d’abord par des politiques de préservation et de restauration des écosystèmes (reforestation, restauration de zones humides, etc.) qui apparaissent nécessaires, mais non suffisantes dans la plupart des scénarios.
Cependant, avec une population grandissante, la question de la concurrence entre terres agricoles et terres consacrées à la capture de CO2 se pose. Cette situation génère un véritable défi et exige de nous et des gouvernements de l’intelligence et de l’optimisation dans la gestion des terres’’.
Lamine Diouf