Publié le 17 Aug 2012 - 08:00
OUSMANE NDIAYE, INITIATEUR DE LA GSPR

«Le Sénat ne rend qu'un seul service : caser une clientèle politique»

 

Dans cet entretien avec EnQuête, l'initiateur du mouvement Génération sentinelles pour la République (GSPR) brocarde l'indifférence des leaders face à cette ''forfaiture''.

 

 

Quels sont les objectifs de Génération sentinelles pour la République ?

 

Après l'alternance politique survenue le 25 mars et les législatives du 1er juillet, l'ordre du jour politique reste toujours les élections. Et il est structuré autour de la question relative à celui qui va occuper le poste de président du Sénat. Or pour nous, les préoccupations des populations sénégalaises liées aux réformes institutionnelles, la prise en charge des aspirations populaires légitimes, sont quelque part oubliées ou, à tout le moins, reléguées au second plan. Pire encore, nous avons constaté un suivisme total de l'ensemble de la classe politique sur les différents actes posés par Macky Sall. Certes, il y a une ''opposition'' mais elle n'en est pas encore une. Beaucoup de leaders se sont tus sur les questions majeures de la vie de notre démocratie parce qu'ils ont des postes dans le pouvoir ou parce qu'ils espèrent des strapontins. Devant cet état de fait déplorable, nous avons mis sur pied le GSPR pour porter certains combats comme celui de la suppression du Sénat.

 

Mais pourquoi n'avez-vous pas engagé ce combat au sein du M23 dont vous êtes coordonnateur des jeunes ?

 

La question est aujourd'hui en discussion dans le M23, un mouvement qui doit continuer sa mission, rester sentinelle et vigile de la démocratie, être un contre-pouvoir. Mais il n'a pas encore achevé sa mue. Après la chute d'Abdoulaye Wade, on s'est rendu compte qu'il y avait trop de politiciens dans le mouvement du 23 juin, aux côtés d'honnêtes citoyens aujourd'hui désireux de poursuivre la lutte pour le respect des institutions sénégalaises. Trancher cette question du Sénat devient alors difficile. Mais le M23 tardant à délibérer sur ce sujet d'envergure nationale, nous avons décidé de nous organiser en conséquence et prendre en charge le combat contre le Sénat, entre autres.

 

Quel est votre plan d'action ?

 

Nous avons déjà mis en place un comité d'initiative qui va prendre en charge une campagne nationale et internationale de sensibilisation et d'information de l'opinion sur l'aspect budgétivore de cette institution hier décriée par ceux-là même qui décident de son maintien. En plus de cela, une pétition visant à faire adhérer les citoyens à cette campagne sera initiée. Après tout cela, nous engagerons la deuxième phase de notre plan d'action par un sit-in après la Korité. Nous demanderons aux Sénégalais qui étaient sortis le 23 juin pour dire non aux dérives de Wade, de revenir dans la rue. Parce qu'en réalité, tout ce qui justifiait le combat des Abdoulaye Bathily, Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng, Idrissa Seck et autres qui sont aujourd'hui autour de Macky Sall, est resté intact. Le Sénat est maintenu, les populations continuent de vivre les mêmes difficultés liées à leur quotidien. Malgré cela, ces leaders ne disent rien !

 

Selon vous, qu'est-ce qui explique ce «revirement» ?

 

Leur attitude d'aujourd'hui est similaire à celle de Wade qui décriait dans les rues de Dakar les dérives du régime socialiste et qui, une fois arrivé au pouvoir, remet les mêmes pratiques. Ils font presque du wax waxeet. Nous ne pouvons ni comprendre ni accepter une telle attitude de ces gens qui étaient dans les Assises nationales et qui s'étaient battus dans le M23. Ce n'est pas parce qu'on est dans la même coalition que le président de la République que l'on doit fermer la bouche ou les yeux sur tout ce qu'il fait. Nous, nous sommes avec Macky Sall parce qu'il a posé des actes forts allant dans le sens de la bonne gouvernance, mais nous sommes contre le maintien du Sénat. L'argent utilisé pour entretenir cette Chambre dite haute peut servir à financer des projets de jeunes, acheter des ambulances pour des villages qui n'en ont pas, régler les problèmes des universités de Bambey, Thiès et Ziguinchor. En outre, le Sénat n'a pas de question spécifique qu'il peut à lui seul trancher. Tout ce qu'il peut faire, l'Assemblée nationale le fait mieux. S'il est maintenu, il va devoir parler au nom des Sénégalais alors qu'il n'est pas représentatif du peuple parce que le mode de désignation de ses membres n'est pas entièrement démocratique. Le Sénégal n'a pas besoin de deux chambres parlementaires. Le Sénat n'a qu'un seul service à rendre : entretenir une clientèle politique. Ce n'est pas acceptable... Même sur la base des conclusions des Assises nationales ou des engagements de certains candidats à la présidentielle de 2012, le peuple a constaté que depuis sa création, le Sénat n'a jamais été productif. Il est inutile, inopportun et budgétivore.

 

 

PAR ASSANE MBAYE

 

 

 

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