Publié le 13 Jun 2023 - 18:36
PARTICIPATION AU DIALOGUE NATIONAL

Yewwi isole Khalifa Sall et Taxawu Sénégal

 

Le choix de l’ancien maire de Dakar de participer au Dialogue national, rejeté par sa coalition politique, pourrait avoir des conséquences, laisse entendre un communiqué de la coalition Yewwi Askan Wi.

 

Qu’ils semblent loin, ces conférences de presse lors desquelles Ousmane Sonko et Khalifa Sall s’indignaient, rigolaient, chargeaient Macky Sall et se défendaient mutuellement. Techniquement, cette image n’est plus possible, tant que le leader de Pastef reste assigné à résidence dans sa maison à la cité Keur Gorgui et empêché de voir jusqu’à ses propres avocats. Même au niveau de la volonté, cette rencontre est peu probable, vu les positions qui s’éloignent entre le maire de Ziguinchor et le leader de Taxawu Sénégal.

En participant au Dialogue national lancé par le président de la République, Khalifa Sall est de plus en plus isolé dans la coalition qui a permis à sa formation politique de gagner la mairie de Dakar. Alors que les discussions sont en cours et que des résultats du dialogue sont attendus dans 12 jours, Yewwi Askan Wi pointe du doigt le choix de Khalifa Sall.

Dans son communiqué publié hier, la coalition regroupant la majeure partie de l’opposition a réaffirmé son rejet ‘’catégorique de cette rencontre sans intérêt pour le Sénégal’’. Mieux, ajoute la note, Yewwi Askan Wi ‘’porte à la connaissance de l'opinion qu'elle n'est représentée par aucune organisation ou personne physique à cette farce politique’’.

Yewwi réaffirme son rejet du dialogue

Inéligible depuis sa condamnation, en 2018, pour détournement de deniers publics, Khalifa Sall voit le Dialogue national comme la seule voie pour participer à l’élection présidentielle du 25 février 2024. L’enjeu est une modification des articles L29, L30 et L57 du Code électoral qui rendent inéligible toute personne condamnée à des peines lourdes. Les positions drastiques à l’encontre du pouvoir ne lui ont pas permis d’être candidat à la Présidentielle 2019 et aux élections locales et législatives de 2022.

C’est  ainsi qu’il ne compte pas commettre la même erreur. En effet, dès l’effectivité de la perche tendue par le président de la République lors de son discours d’indépendance 2023, Taxawu Sénégal a ouvert une brèche dans le refus catégorique de la coalition Yewwi Askan Wi de dialoguer avec le président Macky Sall. Ceci, en annonçant une consultation de sa base politique pour donner une suite  à l’appel du président Macky Sall. L’on apprendra par la suite, après la sortie qui a scellé la rupture entre Barthélemy Dias et Ousmane Sonko, que des discussions nocturnes étaient tenues depuis longtemps entre l’édile de Dakar et le président de la République.

Au même moment, Ousmane  Sonko, principal opposant au régime, a très vite rejeté un dialogue qui n’est rien d’autre, pour lui, qu’un moyen de ‘’valider une troisième candidature anticonstitutionnelle’’ de Macky Sall, ‘’isoler Ousmane Sonko et casser l’opposition en donnant un bonbon à sucer à chacun’’.

À l’image du leader de Pastef, Déthié Fall, Malick Gakou, Aïda Mbodj… ont rejeté l’appel du président de la République. C’est aussi le cas d’organisations de la société civile réunies au sein de la plateforme F24 qui s’oppose à une troisième candidature de Macky Sall en 2024.

Un dialogue ‘’inique’’

En assistant à la cérémonie de lancement du Dialogue national le  31 mai dernier, Khalifa Sall a tout de même souligné les grands points revendiqués par l’opposition : la non-participation de Macky Sall à la Présidentielle, l’inéligibilité des candidats de l’opposition, le parrainage citoyen, etc. Sauf que pour ses coalisés dans Yewwi, cela n’a rien changé. D’autant plus qu'entre-temps, les dernières manifestations violentes n’ont rien arrangé.

En effet, estime YAW dans son communiqué d’hier, ‘’ce rassemblement (le dialogue, NDLR) est d'autant plus inique qu'il se tient dans un contexte de deuil, d'arrestations arbitraires et de déni des droits et libertés. Le nombre de morts suite aux manifestations du 1er au 3 juin n'est pas encore connu’’.

Selon un bilan établi par Amnesty International, au moins 23 personnes ont été tuées, suite aux heurts qui ont frappé le Sénégal après la condamnation d’Ousmane Sonko à deux ans de prison ferme pour ‘’corruption de la jeunesse’’.

Invité du ‘’Jury du dimanche’’ sur iRadio, le Dr Cheikh Tidiane Dièye, membre de la plateforme F24, en a profité pour faire la leçon au leader de Taxawu Sénégal. “On ne dialogue pas avec quelqu’un en ayant le couteau derrière le dos”, précise le coordinateur de la plateforme Avenir Senegaal bi ñu bëgg.

Les mis en garde à Khalifa et à Taxawu

Yewwi Askan Wi assure que ‘’plus de 500 jeunes manifestants sont encore illégalement détenus dans les locaux de la police, de la gendarmerie et dans les prisons’’. Au même moment, ‘’Ousmane Sonko, membre éminent de la coalition, a été condamné à la suite d'une parodie de justice. Son domicile est soumis à un blocus sans précédent dans l'histoire politique du Sénégal et en dehors de toute légalité’’.

Assez pour s’interroger sur le futur de Taxawu Sénégal au sein de Yewwi Askan Wi ? En rappelant une des dispositions de sa charte fondamentale, selon laquelle tout membre doit ‘’s'abstenir, individuellement, de tous compromis ou compromissions politiques avec le régime de Macky Sall’’, YAW déclare se réserver ‘’le droit de tirer toutes les conséquences à l'encontre de tout transgresseur’’ de ces dispositions.

Du côté de la F24, Dr Cheikh Tidiane Dièye défend que l’éthique et la morale voudraient que lorsqu’un membre de ce groupe est ‘’pourchassé, agressé’’, tout autre membre devrait s’abstenir de trouver un consensus avec son oppresseur.

Lamine Diouf

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