Un roman à la gloire des exclus
La maison d’édition ‘’Jimsaan’’, fondée à Dakar par des écrivains sénégalais de renom, a fait la présentation samedi du roman ‘’La plaie’’, chef d’œuvre de Malick Fall. Réédité, ce roman publié en 1967 à Paris, évoque la vie en se situant du côté des exclus.
Le roman ‘’La plaie’’, réédité par la maison d’édition ‘’Jimsaan’’, a été présenté ce samedi. Rédigé en 234 pages, le roman fait un diagnostic sans complaisance des maux qui gangrènent la société sénégalaise, selon Pape Samba Kane. L’histoire n’est qu’un prétexte pour faire de la belle littérature. ‘’Le narrateur feu Malick Fall n’est pas linéaire. L’histoire est inracontable. Il va, il vient. Après, on se demande s’il y a une histoire’’, a commenté le présentateur. ‘’Le roman, a-t-il poursuivi, raconte l’histoire d’un homme, Magamou Seck, qui quitte son village avec tous les rêves pour aller en ville, du temps des colons. Et là, il se blesse, contracte une plaie qui le confine dans la marginalité. Il est devenu une sorte de pilier de marché avec une plaie que tout le monde fuit. C’est un prétexte pour raconter la condition humaine’’. La leçon à en tirer, d’après Pape Samba Kane, est ‘’de ne pas laisser les gens vous coller une identité, mais s’en choisir’’.
Louis Camara, également présentateur, a tenu à démontrer que « le roman est magistral, composé de galeries de caractères fortement modelés et d’un lyrisme somptueux ; écrit d’une poésie époustouflante et de rythme de musicalité ». Le professeur de littérature Alioune Diané a fait la part belle à l’histoire qui, selon lui, éclipse la partie obscure de nous-mêmes. ‘’Malick Fall nous tend un miroir. Il y a dans ce contexte un monument de langage qui donne l’impression qu’il s’adresse à nous.
Le roman donne de l’originalité et il a ainsi utilisé une écriture déterminée, sur mélange d’inspiration et écriture nouvelle’’, explique l’enseignant. Alioune Diané de dire : ‘’Pour connaître la société, soyons avec les exclus’’. Il assimile ‘’le roman à un diagnostic sans complaisance, destiné à la société sénégalaise. La faim, l’exode rural, la misère, l’effondrement des valeurs traditionnelles, au nombre desquels on peut retenir le travail sur la question de l’identité’’. Selon le professeur Alioune Diané, l’auteur installe le lecteur dans un malaise illustré par le silence gêné de la critique sénégalaise. ‘’Comment comprendre en effet que dans une société qui se veut raffinée et d’une exquise politesse, M. Fall choisisse la saleté la plus répugnante comme objet de sa création littéraire ?’’
L’auteur Malick Fall, originaire de Saint-Louis, fut enseignant, directeur d’école, conseiller culturel de Léopold Sédar Senghor. Cet écrivain, décédé à l’âge de 74 ans, avait le sens de l’humour, d’après les témoignages.
AIDA DIENE