Publié le 25 Jun 2022 - 09:39
RÉMUNÉRATION COPIE PRIVÉE

Les acteurs culturels interpellent Macky Sall

 

Comme un seul homme, les acteurs culturels du Sénégal se sont mobilisés, hier, à Sorano, pour interpeller le président de la République sur la signature du décret relatif à la mise en œuvre de la loi sur le droit d’auteur et les droits voisins, notamment la rémunération pour copie privée.

 

Des acteurs et hommes de théâtre, des interprètes, des danseurs, des musiciens, etc., sont montés sur scène, hier, à tour de rôle, pour porter ensemble un plaidoyer.

En effet, après une longue période d’attente de la mise en œuvre de la loi 2008-09 sur le droit d’auteur et les droits voisins au Sénégal, notamment la loi concernant la rémunération pour copie privée, ils ont décidé, pancartes à la main, de manifester leur ras-le-bol.  C’était à l’occasion de l’Assemblée générale ordinaire de la Sodav qui se tient le quatrième jeudi du mois de juin de chaque année. L’idée, hier, des acteurs, était de se faire entendre davantage, d’espérer que l'autorité suprême, protecteur des arts et des lettres, ‘’comprenne’’ le sens de cette rémunération. 

Pour ce qui est des pertes concernant la copie privée, ’’elles peuvent être estimées à 10 milliards, selon le directeur-gérant de la Sodav. ‘’Si maintenant nous ne nous empressons pas de prendre ce qu’il y a est à prendre au niveau des supports tels que les CD, clés USB, etc., il risque d’y avoir des catastrophes’’, a alerté Aly Bathily. 

Ainsi, les acteurs culturels réclament la signature d’un décret pour que la rémunération  pour copie privée, adoptée dans le corpus juridique des droits de propriété littéraires et artistiques depuis le 25 janvier 2008, soit depuis quatorze longues années, soit une réalité. PCA de la Sodav, Ngoné Ndour s’indigne : ‘’La commission pour la rémunération équitable et la commission pour la copie privée ont fini de faire leur travail. Il manque juste un arrêté du ministère des Finances et du ministère de la Culture autorisant  la douane à prélever la redevance sur les supports qui entrent dans ce pays. Depuis des années, on court derrière ça. On ne comprend pas ce blocage-là. On est asphyxié.’’

Les acteurs culturels relèvent qu’un faux débat s’est agité sur cette rémunération-là. La copie privée n’est pas une taxe, reprécise Aly Bathily. À ce sujet, M. Bathily précise que le problème se situe à un niveau de savoir si c’est un taux ou non. ‘’Non !, tranche-t-il. Ce n'est pas un taux. C’est une rémunération, une compensation, une réparation’’. ‘’Nous n'avons pas besoin de toute cette littérature fiscale et économique et autre pour parler de rémunération équitable. C’est quelque chose qui est dédié aux artistes’’, a-t-il dit.

Œuvres utilisées durant les campagnes politiques

Source de rémunération la plus substantielle et la plus attendue   dans le dispositif juridique et réglementaire de la propriété littéraire et artistique,  la copie privée est, pour les acteurs culturels sénégalais, une source d’autonomie financière. Ils ont tous indiqué que sa mise en œuvre les soustrait des aides étatiques récurrentes et leur rendrait leur dignité. Elle finance également le monde de la culture. Elle est une rémunération compensatoire pour les auteurs d’œuvres, les artistes, interprètes et les producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes copiés dans un cadre non commercial et non professionnel. ‘’Dans ce pays, chaque fois, on reconnaît des droits qui sont accordés aux uns et aux autres. Ce droit permettrait aussi un meilleur financement de la culture. L’Etat est en train de retenir sous perfusion le secteur culturel, alors qu’avec cette rémunération, les gens auraient pu avoir accès à ce qui leur est dû, à une énorme masse financière en toute dignité, sans tout le temps d’avoir besoin d'être sous perfusion’’, a clamé M. Bathily.

Il note que la Covid-19 a prouvé à plusieurs pays africains la pertinence de ce genre de rémunération. C’est l’exemple de l’Algérie (8 731 704 828 F CFA) et du Maroc (2 39 258 388 F CFA). De son côté, la Côte d’Ivoire en est à ses premières perceptions RCP depuis le 1er juin dernier.

En sus du plaidoyer des acteurs culturels sénégalais sur la mise en œuvre immédiate de la rémunération pour copie privée, ils ont tenu à attirer l’attention du président Macky Sall sur le respect des dispositions du Code de la presse afférentes au droit d’auteur et aux droits voisins par les organismes de radiodiffusion (télédiffuseurs et radiodiffuseurs). Ils ont aussi, à cette occasion, noté qu’il y a ‘’la survie des industries créatives qui sont les premières pourvoyeuses de contenus ; donc de matière première, car, sans contenu, il n’y a point de diffusion’’. Par ailleurs,  la tenue des élections législatives qui se profilent à l’horizon est une occasion, pour les acteurs culturels, de lancer un message à l’endroit des formations politiques du Sénégal. ‘’Nos œuvres utilisées par les différents candidats doivent être rémunérées en contrepartie’’, ont-ils prévenu.

BABACAR SY SEYE

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