Le tir groupé contre Sonko
Conséquences de la gronde du président contre ses partisans politiques, coupables, à ses yeux, de ne pas le soutenir assez ? Les leaders politiques de la mouvance présidentielle originaires de la Casamance ont publié, hier, une déclaration incendiaire à l’encontre du leader de Pastef/Les patriotes.
Ousmane Sonko devait-il tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de parler ? C’est bien ce que lui reprochent les responsables politiques de la mouvance présidentielle de la Casamance, tant chère au leader de Pastef/Les patriotes. Dans une déclaration incendiaire publiée hier, des ‘’enfants de Sédhiou, de Bounkiling, de Goudomp, de Ziguinchor, de Bignona, d’Oussouye, de Médina Yoro Foulah, de Kolda, de Vélingara, en somme de la belle région naturelle de Casamance’’, s’indignent et expriment leur ‘’désapprobation totale aux propos irresponsables, dangereux et immatures de cet attiseur de braises aux desseins inavoués’’. Référence faite, selon le communiqué, aux propos de celui qui est arrivé premier en Casamance, lors de la dernière élection présidentielle, lorsqu’il a affirmé, à Ziguinchor, que ‘’le président Macky Sall et son gouvernement n’aiment pas la Casamance’’.
En visite dans la capitale du Sud, lundi 14 septembre 2020, pour s’enquérir de la situation des familles sinistrées, victimes des inondations dans la commune de Ziguinchor, Ousmane Sonko avait sévèrement critiqué l'intervention du gouvernement et du président de la République Macky Sall dans la région naturelle de Casamance, en ces termes : ‘’Il (Macky Sall) n’aime pas la Casamance, encore moins notre pays le Sénégal. Le président de la République, qui a échoué sur toute la ligne dans sa politique en Casamance, voire même le Sénégal, préfère plus l’Europe, la France, la Turquie, la Chine que le Sénégal. Des pays à qui il offre nos milliards à travers des contrats en or qu’il signe avec leurs entreprises.’’
Mais pour ces responsables casamançais, ces déclarations du leader de Pastef sont celles de trop. Si ‘’de par l’expérience humaine, le ‘trop-parler’, parce qu’il rime toujours avec dérapage, n’a jamais porté le ‘parler-vrai’’’, rappelle la déclaration, ‘’ce n’était ni l’endroit ni le moment, pour ce ‘trop-parler’ de Ousmane Sonko, qui défie en réalité la région, la nation et la vérité historique’’.
Les signataires, parmi lesquels le président de la Commission nationale du dialogue des territoires Benoît Sambou, la présidente du Haut conseil du dialogue social Innocence Ntap Ndiaye, l’ancien ministre d’Etat, député-maire de Ziguinchor Abdoulaye Baldé et des ministres de la République dont Abdoulaye Diop, Abdoulaye Baldé, Abdoulaye Bibi Baldé, Moussa Baldé, Aminata Assome Diatta, Aminata Angélique Manga, ou encore Mamadou Lamine Keita, Président de l'Observatoire national sur l'investissement (ONI), doutent même des intentions du leader de Pastef/Les patriotes.
‘’Il lui faut prendre position : est-il pour ou contre la paix en Casamance, dans un Sénégal uni et solidaire ?’’
En effet, ils se basent sur d’autres propos qu’ils attribuent à l’opposant, sur la crise en Casamance, à savoir : ‘’Nous sommes disposés, si tous les acteurs le souhaitent, à jouer un rôle pour que cette situation soit derrière nous. Mais on ne peut pas prendre une initiative, dans un pays qui s’appelle le Sénégal, avec un Etat.’’
Des déclarations qu’ils jugent ‘’extrêmement graves’’, surtout émanent d’un représentant du peuple, député à l’Assemblée nationale du Sénégal et dont ils demandent des explications sur le principe intangible de l’intégrité du territoire national et de l’unité nationale, proclamé dans le préambule de la Constitution. ‘’Il lui faut prendre position : est-il pour ou contre la paix en Casamance, dans un Sénégal uni et solidaire ?’’, exigent-ils.
Les sous-entendus continuent, lorsqu’en opposition au message d’Ousmane Sonko, ses adversaires soutiennent que ‘’le Sénégal demeure notre rempart invincible, une muraille infranchissable contre les extrémismes et les désordres de toutes sortes. Nous avons le devoir d’y veiller, pour le léguer tel quel aux générations futures’’.
Ainsi, ils assimilent l’attitude du leader de Pastef/Les patriotes à une soif de pouvoir qui, toutefois, ne doit pas ‘’autoriser tous les excès’’.
Convaincus d’un Sénégal ‘’indivis’’, le maire de Ziguinchor et les ‘’apéristes’’ comptent faire face ‘’au nom de la Casamance, celle qui travaille pour la paix définitive, c’est-à-dire la Casamance véritable et éternelle, celle que nous aimons, dans le Sénégal solidaire et inclusif que nous voulons : le Sénégal de tous, le Sénégal pour tous’’.
Cette position s’explique, disent-ils, par le fait que, depuis l’avènement du président Macky Sall à la tête du Sénégal, ‘’jamais nous n’avons été, en effet, aussi proches d’une paix définitive en Casamance’’. En effet, la région connait une accalmie depuis plusieurs années, au moment où les tractations de paix se sont multipliées, depuis l’arrivée au pouvoir du président Macky Sall en 2012. Elles avaient repris en octobre 2017 à Rome, sous l’égide de la communauté catholique de Sant’Egidio, médiatrice dans ce conflit, sans déboucher jusqu’ici sur un accord de paix. Réélu en 2019, il avait affirmé qu’une ‘’paix définitive’’ en Casamance était l’une des priorités de son second mandat.
Les résultats de cette politique sont d’ores et déjà visibles, assurent ces Casamançais partisans politiques du président Macky Sall. La construction du pont de la Sénégambie, la liberté de circulation retrouvée en sont les confirmations. D’autant plus que, ajoutent-ils, ‘’en vérité, jamais la région n’a été autant destinataire d’investissements publics que sous le président Macky Sall’’.
C’est pourquoi ils invitent pratiquement les habitants de la région naturelle de Casamance à ne pas se tromper d’ennemi, en adoubant celui ‘’qui a pourtant réalisé ces avancées significatives pour la région’’.
Lamine Diouf