Publié le 30 Sep 2024 - 20:22
SAINT-LOUIS - ÉMIGRATION IRRÉGULIÈRE

Les familles des disparus peinées et meurtries

 

Comme toutes les autres localités du pays, la vieille cité de Ndar n'est pas épargnée par les malheurs de l'émigration irrégulière. De nombreuses familles saint-louisiennes ont perdu des parents dans le phénomène du “Barça ou Barsakh”. Il est quasi impossible de parcourir un seul quartier de la capitale du Nord sans y dénombrer de jeunes veuves et de nombreux orphelins. Ce sont des familles meurtries qui gardent encore de douloureux souvenirs de leurs proches restés dans les eaux de l'océan Atlantique.

 

Dans le département de Saint-Louis, le renforcement du dispositif sécuritaire de surveillance des côtes a eu un effet très positif. Depuis l'installation de la base navale de la marine nationale à l’Hydrobase et la multiplication des patrouilles mixtes dans les zones stratégiques d'embarquement, le nombre de départs de candidats à l'émigration clandestine a considérablement baissé.

Toutefois, les séquelles laissées par les premières vagues de départ sont toujours palpables dans les familles des disparus.

À Saint-Louis, Pikine est l'un des quartiers qui a payé le plus lourd tribut de sa jeunesse dans le phénomène “Barça ou Barsakh”. D’ailleurs, il y a quarante-huit heures, les jeunes de cette localité ont organisé un récital de Coran en mémoire de leurs nombreux camarades morts en mer.

Il est 11 h passées de quelques minutes dans les ruelles du populeux quartier de Pikine, dans le faubourg de Sor. Nous sommes à la recherche du domicile de la famille Niang, dont quelques membres sont portés disparus en mer depuis plus d'une année. Après quelques indications de voisins, nous arrivons sur les lieux où règne un calme plat. Aucun bruit dans la maison, à part les pleurs d'un petit garçon de moins de 3 ans assis sur un banc près de sa maman, au seuil de la cuisine. Après les salutations et le but de notre visite, notre interlocutrice nous oriente vers le chef de famille assis sur un fauteuil dans le salon, les yeux rivés sur un téléviseur aux dimensions moyennes.  D’une voix basse, le vieux M. Niang nous accueille avec un petit sourire pour nous mettre à l'aise. Mais visiblement, il ne s'est pas encore remis du choc. Pour lui, la famille Niang n'est pas à sa première perte dans l'océan, puisque le fils aîné de la famille a perdu la vie par noyade dans les eaux maritimes de la Mauritanie en 2018.

"C'est dur. Mais c'est la volonté divine. Personne ne peut échapper à son destin. Il y a six ans, leur grand frère disparaissait à Nouadhibou, sur la route de l'Europe. Il y a juste un an jour pour jour que la famille subissait une autre catastrophe avec la disparition, au large de Saint-Louis, de ses deux frères cadets. Ces derniers m'ont laissé deux épouses et cinq petits-enfants, dont le plus âgé a moins de 14 ans. Comme je n'y peux rien, je m'en remets au bon Dieu et prie pour le repos de leurs âmes. Mais j'avoue que je suis très profondément meurtri", a signalé le vieux Niang.

Veuves et orphelins inconsolables

Revenant sur ses enfants restés en mer, le père de famille n'a pas tari d'éloges sur leur exemplarité. "Malgré leur jeunesse, ils étaient de braves travailleurs et très obéissants à leurs parents. Des mois après la catastrophe, je ne parviens toujours pas à expliquer les réelles motivations de leur voyage. Ils gagnaient décemment leur vie et n’enviaient pas leurs camarades. Donc, ils ne se plaignaient pas du tout. Leur disparition a vraiment laissé un grand vide dans la maison, car ils étaient les espoirs de la famille. Mais Dieu en a décidé autrement. ND. Niang a laissé derrière lui une épouse et trois enfants, son frère D. Niang une épouse et deux enfants. C'est pourquoi nous demandons aux autorités nationales une vigilance accrue pour réduire davantage les départs, car la mer a anéanti beaucoup d'espoirs de famille. Aujourd'hui, l'émigration irrégulière a décimé entièrement ma famille. Il ne me reste plus sur terre qu’une fille qui vit très loin de moi à Vélingara auprès de son mari", s'est désolé le vieux Niang, presque au bord des larmes.

Les tentatives pour faire parler les autres membres de la famille sont restées vaines. À chaque fois que l'une des deux veuves a essayé, l'interview est interrompue par des sanglots. Néanmoins, la veuve de ND. Niang est parvenue à placer quelques mots, entre deux sanglots. Pour la jeune M. Loum, sa vie est brisée à jamais. "Je ne crois pas pouvoir surmonter un jour la mort tragique de mon mari. Je ne peux rester un instant sans penser à lui. Je ne peux me défaire de son visage et de ses éclats de rire. Ce qui est survenu à la famille est terrible. Pour vous dire que Ndiaga ne verra jamais son dernier fils, né quatre mois après sa disparition", a expliqué M. Loum.

IBRAHIMA BOCAR SENE (SAINT LOUIS)

 

Section: 
UN MILLIER DE BÊTES VOLÉ EN UN AN, CHERTÉ ALIMENT BÉTAIL, TENSIONS ÉLEVEURS-AGRICULTEURS... : Ces doléances qui attendent Bassirou Diomaye Faye à Kaolack
GRÈVE GÉNÉRALE DE 48 HEURES, BAISSE DES SALAIRES ANNONCÉE… : L'ordonnance prescrite par le Sames à l’État du Sénégal
CONDAMNÉS EN PREMIÈRE INSTANCE POUR ESCROQUERIE : Un douanier et son ex-épouse jugés en appel
DIFFAMATION : Madiambal Diagne conteste sa condamnation, face à l’absence de Téliko
Saint-Louis SNR
Espérance de vie au Sénégal
PRÉVALENCE DU VIH/SIDA CHEZ LES JEUNES ET ADOLESCENTS : L’inquiétude des autorités sénégalaises, malgré les efforts
AVEC 4 ONCOPÉDIATRES AU SÉNÉGAL : Ces difficultés du Sénégal pour lutter contre le cancer de l’enfant
RAPPEL À DIEU DE SERIGNE MOUSTAPHA SALIOU : Le fils du 5e khalife de Bamba était âgé de 82 ans
LINGUÈRE : CHANGEMENT DE STATUT : Le ranch de Dolly va devenir une Agence de développement de l’élevage
VOL DE 4 TÉLÉPHONES PORTABLES DE VALEUR : Comment l’un des deux suspects a été trahi par sa photo
GESTION DES ÉLECTIONS - STAR : Un système de vote innovant créé au Sénégal
MARIAGE AU SÉNÉGAL : 10,7 % des femmes âgées de 20 à 49 ans ont été mariées avant l’âge de 15 ans
Vice-président de l’AAEA
Radiothérapie de l’hôpital Dalal Jamm
KAOLACK : FAUTE DE QUITTANCE DOUANIÈRE : La majorité des vélo-taxis  non encore immatriculée
UNE BAGARRE RANGÉE QUI TOURNE AU DRAME : Fady Badji le principal accusé risque 10 ans de réclusion criminelle
NOUVEAUX INCIDENTS À L'UNIVERSITÉ IBA DER THIAM DE THIÈS : Les cours suspendus
SAINT-LOUIS : SEMAINE DE LA SANTÉ MÈRE-ENFANT : Les acteurs  s’engagent à hisser les indicateurs
NOUVELLE LOI PHARMACEUTIQUE : Une quinzaine de journalistes sensibilisés