Forces de sécurité et droits de l'Homme
L'humanité est ébranlée dans ses fondamentaux, ses fondements précarisés ; le monde est à la croisée ; le monde est à la croisée des chemins. Incertitudes et doutes existentiels s'installent. Face aux multiples et multiformes agressions économiques et autres aléas climatiques, les grandes puissances naguère florissantes et conquérantes ont mis genoux à terre et ployé l'échine le temps que le tsunami s'estompe. Les populations stressent et s'interrogent ! En réaction aux agressions physiques, atteintes aux biens, inondations et autres accidents mortels ou incapacitants, nous devons rapidement apporter des réponses urgentes, convaincantes et radicales, à l'extrême opposé de la démagogie.
Le droit le plus élémentaire, inaliénable et incontestable demeure sans commune mesure avec les autres, le droit à la vie ! Malheureusement, chaque jour se lève et se couche avec son lot de pertes en vies humaines, générées par des noyades, accidents routiers ou fluvio-maritimes, effondrements de bâtisses vétustes ou mal conçues, atteintes à l'intégrité physique des personnes, aggravées de viols et d'homicide, morts par défaut de soins médicaux ou suite à des carences alimentaires et vitaminiques, cette énumération étant très loin d'être exhaustive.
Nos sociétés africaines souffrent de microcéphalie irréversible parce qu'endémique, la valorisation harmonieuse et équilibrée des zones de vie n'ayant jamais pu être positivement prise en compte par les différents régimes. Les capitales africaines telles des entonnoirs ont toutes cette spécificité attractive à drainer vers elles, leurs banlieues et centres urbains, toutes les misères des villes et villages de l'intérieur. Sans oublier la migration, l'exode à sens unique des élites qui s'y font affecter, y élisent domicile pour y terminer leurs existences au détriment de leurs terroirs d'origine.
Toute saturation étant source de tensions, conflits et confrontations, il urge de prendre des mesures incitatives mais non contraignantes de retour vers l'intérieur du territoire national, par le redéploiement, la création ou la réouverture d'unités de production créatrices d'emplois et de richesse, favorisant la consommation et le désir de vie. Nous sommes cruellement interpellés par les réalités sécuritaires et un constat amer s'impose à nous. Si les Sénégalais sont convaincus de la réactivité et des compétences reconnues à leur police à résoudre prestement les épineuses équations des délits et crimes commis à leur détriment, ils le sont beaucoup moins quant à la capacité de cette même police à les sécuriser préventivement. Parmi les solutions que l'opinion publique préconise, nous avons retenu le renforcement des effectifs par un recrutement massif, l'implantation de polices de proximité dans les quartiers et même à l'extrême, le recours à l'armée ou la délation via un numéro vert etc. . .
D'entrée de jeu, il est à préciser hormis l'utilisation du génie militaire pour des interventions d'intérêt public, l'absence de qualités et compétences juridiques limitativement attribuées par la loi empêche son recours en matière de maintien et de rétablissement de l'ordre public, hors le cas peu souhaitable par ce qu'extrême et dangereux de l'état de siège.
Dans le pays où elle est implantée et expérimentée, la police de proximité a permis d'avoir une perception plus positive de la police aux yeux des populations par la proximisation et la familiarisation, mais n'a jamais permis de mettre un terme aux exactions de groupe en marge. Dans toute société imbue de certaines valeurs, la délation n'a jamais prospéré, en dehors des motivations revanchardes, pour des raisons d’éthique ou par peur des représailles éventuelles la nature ayant horreur du vide, il faut simplement revenir aux méthodes ayant déjà fait leur preuve. Si nous nous suffisons d'une police technocrate et pantouflarde qui ferme boutique à h pour revenir le lendemain en laissant sur place une permanence symbolique, l'espace urbain nocturne est investi et domestiqué par des hordes de prédateurs assoiffés de violence, de sexe, de sang et d'argent facile dans les années 1980, nul ne s'aventurait à sortir le soir sans s'assurer au préalable qu'il avait bien au chaud sur lui une pièce d'identification, la certitude étant quasi-absolue de terminer le reste de la soirée dans les grilles d'un commissariat pour vérification d'identité en cas de carence.
Un système 3*8 24h/24 permettait de vivre avec les populations, de jour comme de nuit dans les rues jusque sous leurs fenêtres pendant qu'ils dormaient. Le ratio 1/1000 n'est pas une impossibilité si les pouvoirs publics font des réajustements budgétaires courageux, au détriment de la politique et du prestige, mais en faveur de l'intégrité physique du plus grand nombre. Les violences policières, les bavures et et dérapages peuvent être minorés, les erreurs judiciaires moins fréquentes si l’État nous dote d'une police scientifique et technique moins artisanale par le biais de personnel spécialisé et de matériels de dernière technologie.
Si nous prenons le cas des viols très à la mode par les temps qui courent il arrive souvent qu'après une intervention ou une détention assez longue, un inculpé soit relaxé suite à des tests ADN déculpabilisants mais malheureusement effectué très tardn car comme disait l'autre, chaque jour en prison est une vie perdue. Ou a contrario, d'authentiques salopards, sont très souvent relaxés faute de charges suffisantes, au bénéfice du doute. Si l'aveu reine des preuves, des témoignages convergents et concordants peuvent asseoir la conviction d'un juge, le dépôt sur la table d'un procureur ou d'un juge d'instruction d'une procédure en béton parce qu'étayée par des arguments biologiques, physiologiques, scientifiques et techniques irréfutables parce que confondants, cette possibilité donc va inéluctablement dissuader beaucoup de policiers ou gendarmes d'utiliser des méthodes musclées et peu recommandées pour faire craquer et avouer un suspect au nom de l'obligation de résultat. Si la pression démographique est proche du seuil de rupture, les forces de l'ordre sont débordées et parfois submergées.
Au Sénégal, le train ne siffle plus, le transrail Dakar-Bamako ne pouvant en aucun cas remplacer un réseau routier, ferroviaire et fluvio-maritime digne des pays qui font les bons choix. Dans les pays développés ou émergents les réseaux ferroviaires et maritimes sont aux populations ce que les vaisseaux sanguins sont au corps humain : ils sont porteurs et pourvoyeurs de vie et de richesse. Une renaissance de notre réseau ferroviaire et fluvio-maritime permettrait de fixer beaucoup de saisonnier, et d'alléger la tension due à la sur-utilisation accidentogène du réseau routier urbain et inter-urbain, épargnant ainsi beaucoup de précieuses vies, et préservant les équilibres sociaux et familiaux fortement précarisés.
ALASSANE DIOP
Commissaire divisionnaire de classe exceptionnelle en retraite
Ancien professeur d'Anglais