UN DIALOGUE ENTRE ETATS VOISINS SUR L’EMPLOYABILITE DE LA JEUNESSE AFRICAINE

Il s’agit précieusement de s’entretenir avec plusieurs personnes des pays voisins pour trouver des solutions au chômage chronique de la jeunesse. C’est plus qu’un forum, c’est une interpénétration de stratégies pour construire un ensemble concret de solutions de sorties de crise. Le chômage est un défi mondial et universel donc il faut impérativement parvenir à adopter des plans inter-Etats pour identifier les contraintes communes et mettre en place un cadre favorable aux investissements privés pour des emplois décents. C’est un exercice qui exige de l’intelligence, la souplesse et une diplomatie particulière pour l’attractivité et la compétitivité des territoires ; de la méthode et beaucoup de connaissances pour permettre aux financiers d’être à l’aise dans l’innovation et la recherche. C’est une nécessité d’établir un dialogue africain le plus large possible pour bâtir une volonté de création d’emplois durable entre Etats frontaliers.
Dans Financial Times, Ajay Banga, Président du Groupe de la Banque mondiale, disait dans un article intitulé Development is how we compete, grow and stay secure : “ le monde en développement abrite la prochaine génération de travailleurs, d’entrepreneurs et d’innovateurs- un dividende démographique qui, s’il est mis à profit, propulsera la croissance mondiale pendant des décennies. Il possède aussi d’abondantes ressources naturelles qui peuvent faire tourner les industries, nourrir les nations et transformer les économies. Le développement ne se limite pas à l’allégement des souffrances ; il contribue à libérer cet immense potentiel inexploité. » D’après le bulletin d’information de la Banque mondiale du mois d’avril 2025, bientôt 1,2 milliards de jeunes dans le monde sur le marché du travail.
Pourquoi un dialogue africain en urgence ?
Le Sénégal, la Mauritanie, la Guinée Conakry, la Guinée Bissau, la Gambie et les autres subsahariens ont presque la même situation économique et sociale. Nous y trouvons des problèmes budgétaires, la question migratoire, des chocs climatiques et ses désastres, une insécurité causée souvent par des groupes armés, plusieurs incertitudes liées à la géopolitique mondiale, une explosion de la jeunesse et un chômage chronique et générationnel. Ces pays ont d’énormes ressources naturelles (or, fer, bauxite, diamant, pétrole, gaz, phosphate, etc.) et plusieurs pastorales surtout en Mauritanie. Des façades maritimes (Sénégal et Guinée,), un potentiel hydrologique et agricole très dense, une économie forestière considérable et des avantages liés au positionnement géographique (la Guinée fait frontière avec six pays – Sénégal, Guinée Bissau, Mali, Sierra Léone, Libéria et Cote d’ivoire). Le Mali avec ses potentialités a besoin d’appui pour développer l’industrie alimentaire et un secteur privé pour transformation de son secteur primaire. En plus du coton, le Mali est le plus grand producteur de tomate, riz et mais en Afrique. Avec une paix durable, il pourra être la « chine » de l’Afrique. Les burkinabés sont les plus cultivateurs en Afrique. La Cote d’Ivoire est le premier exportateur mondial de fèves de cacao, elle est riche en caoutchouc, cobalt, bois, eau et poissons.
Quels sont les secteurs porteurs de croissance et générateurs d’emplois viables et décents ?
D’abord l’agriculture et la pêche peuvent rapidement résoudre le chômage et la migration. Il suffit que les Etats garantissent la sécurité dans certaines zones pour voir ces secteurs se développer. Par exemple, l’agriculture représente 23% de la totalité du PIB, 55%de la population active et plus de 40% des recettes en devises étrangères. Le Professeur Philippe HUGON, spécialiste de l’économie du développement, en analysant les perspectives agricoles en Afrique subsaharienne disait : « Il faudrait en Afrique de l’ouest, où existent des zones de densité élevée, multiplier dans les 25 prochaines années les rendements par 2,3 et la productivité du travail par 3,1 en moyenne. »
Ensuite un autre secteur plein d’opportunités, l’industrie de la mode basée sur le savoir faire local. Trois Etats peuvent porter cette politique stratégique : le Mali, la Cote d’ivoire et le Togo. D’importants investissements à l’endroit des stylistes, modélistes- créateurs et des designers pour assurer la consommation locale au plan africain. Par l’industrie du textile africaine est concurrencée par des importations de textile chinois de bon marché et de qualité inférieure. Des importations illégales de tissus ont perturbé presque toutes les chaines de valeurs (production de coton- filature-torsion en fil-tissage-impression-conception). Pour inverser la tendance et créer de la richesse pour des emplois, les Etats ont intérêt à travailler avec l’Ethiopie par des partenariats solides.
Enfin les Etats peuvent unir leurs forces pour mettre en place de grandes industries agroalimentaires pour permettre la transformation en masse des les matières premières agricoles et la relance l’industrie gastronomique pour développer le tourisme. L’art culinaire créé du tourisme gastronomique et des métiers de la restauration. Par exemple nous pouvons créer plus de 10 métiers en cuisine (le pâtissier- le boulanger-le chocolatier-le traiteur-le sommelier-le fromager- styliste culinaire-nutritionniste- chef cuisinier etc.)
En conclusion une Afrique organisée et soucieuse de la génération future peut bel et bien résoudre en grande partie le problème du chômage des jeunes. Il suffit d’unir nos forces en investissant davantage sur ces secteurs ciblés pour créer une croissance inclusive, des emplois durables et décents. C’est indigne que nos enfants quittent clandestinement le continent pour s’aventurer dans des espaces incertains et instables. L’Afrique doit prendre destin en main pour gagner le combat du futur .
Alpha YOUM
Spécialiste de Gestion publique et Droit social
Président Paix-Citoyenneté/Sénégal