Awa Baba Thiam et Salla Sow s’accusent à la barre

L’affaire qui a opposé Awa Baba Thiam à Salamata Sow, plus connue sous le nom de Salla Sow, a été évoquée hier, devant la barre de la Chambre correctionnelle du tribunal de Dakar. Dans une salle d’audience tendue, deux anciennes amies se sont retrouvées face à face. Chacune accusée par l’autre, chacune se disant victime. Leurs griefs s’accumulent depuis plus d’un an et ont trouvé un écho retentissant dans les médias comme sur les réseaux sociaux.
L’origine du conflit remonte à un épisode familial. Awa Baba Thiam affirme qu’après avoir reçu un message de Salla Sow au petit matin du jour du mariage de sa fille, elle a été la cible de nombreux commentaires hostiles sur les réseaux sociaux, attisés par des audios qui la mettaient directement en cause. Elle se dit profondément atteinte. Devant le tribunal, elle explique que ces messages sont partis d’un groupe privé, avant d’être diffusés à large échelle. Selon elle, les propos tenus par Salla Sow ont déclenché des réactions virulentes de la part de certains internautes, influenceurs ou commentateurs, qui ont ensuite animé des directs pour la dénigrer publiquement.
Face à elle, Salla Sow n’a pas nié avoir enregistré des messages agressifs. Mais elle affirme que ses propos, envoyés dans un cadre strictement privé, étaient le fruit d’un profond sentiment de trahison. Elle soutient qu’elle avait largement contribué aux préparatifs du mariage, jusqu’à en supporter une grande partie des dépenses. Elle dit avoir vécu comme une humiliation le fait d’avoir été ignorée lors de la cérémonie. Elle reconnaît avoir insulté son amie dans un moment de colère mais rejette toute responsabilité dans la diffusion des enregistrements. Selon elle, seule Awa Baba Thiam les a reçus.
L’enquête menée en amont du procès s’est penchée sur les circonstances exactes de cette diffusion. Elle a notamment révélé le rôle possible d’une tierce personne. La domestique d’Awa Baba Thiam, Saly Kama, a déclaré que sa patronne avait utilisé son téléphone pour envoyer des messages à Salla Sow. Toutefois, les enquêteurs ont estimé que les messages ne pouvaient être attribués à Saly Kama en raison de leur niveau de langue et de leur construction, jugés incompatibles avec son niveau d’instruction. Cette conclusion a nourri des interrogations supplémentaires quant à la chaîne de diffusion des audios et à l’intention de leur publication.
Le dossier ne s’est pas limité aux seuls échanges verbaux. À la barre, Salla Sow a évoqué des éléments très personnels, notamment une période où Awa Baba Thiam l’aurait sollicitée pour intervenir dans une affaire de reconnaissance d’enfant impliquant une personnalité connue. Ces révélations ont choqué la défense d’Awa Baba Thiam, qui y a vu une atteinte injustifiée à la vie privée. Son avocat, Me Mamadou Guèye Mbow, a vivement protesté contre l’exhumation de faits qu’il juge sans rapport avec le dossier.
De son côté, Awa Baba Thiam a répliqué en insistant sur la nature de leur relation. Elle évoque une amitié ancienne, solide, mais qui s’est détériorée à la suite d’un désaccord personnel. Selon elle, tout a basculé lorsqu’un différend a éclaté au sujet d’un cercle d’amis. Salla Sow n’aurait pas supporté de voir certaines personnes fréquenter Awa Baba. Ce conflit aurait envenimé leur relation jusqu’à ce point de rupture.
Dans cette affaire, les deux femmes sont poursuivies. Awa Baba Thiam pour diffamation, injures, menaces de mort par le biais de technologies de l’information et collecte illicite de données personnelles. Salla Sow pour diffamation et injures publiques. Elles comparaissent en même temps comme prévenues et parties civiles.
Les plaidoiries ont donné lieu à des positions tranchées. L’avocat de Salla Sow, Me Amadou Yéri Ba, a demandé le franc symbolique au titre des dommages et intérêts, considérant que sa cliente avait surtout réagi à une situation blessante. Il a plaidé la relaxe et estimé que cette affaire n’avait pas vocation à alimenter une surenchère judiciaire.
À l’inverse, Me Mamadou Guèye Mbow a soutenu que l’honneur et la réputation d’Awa Baba Thiam avaient été gravement affectés par les propos de Salla Sow et les conséquences qui s’en sont suivies. Il a demandé la somme de 100 millions de francs CFA en réparation du préjudice moral. Pour lui, cette procédure est le résultat d’une inversion injuste des rôles, où la victime s’est retrouvée accusée.
Le procureur a requis l’application stricte de la loi pénale à l’encontre des deux parties, sans faire de distinction entre elles.
Au terme d’une audience dense, marquée par des éclats de voix, des interruptions et des échanges parfois amers, la présidente du tribunal a rappelé aux deux femmes la nécessité de faire preuve de retenue. Elle les a appelées à revoir leur comportement, les qualifiant de figures publiques censées inspirer une certaine exemplarité. Salla Sow a présenté ses excuses au tribunal à la fin de l’audience.
Le jugement a été mis en délibéré. Le verdict est attendu pour le 14 août 2025.
MAGUETTE NDAO