Publié le 13 Feb 2013 - 12:10
VATICAN

L'heure a-t-elle sonné pour l'élection d'un pape noir ?

Le Ghanéen Peter Turkson et le Nigérian John Onaiyekan sont parmi les papabili les plus crédibles

 

Le renoncement de Benoît XVI à son pontificat ouvre la délicate séquence de sa succession à la tête du Vatican. Avec à la clé un débat qui n'est pas nouveau : le futur pape sera-t-il italien, comme la plupart dans l'histoire ? Européen comme les deux derniers ? Ou non occidental, voire africain, comme la majorité des fidèles dans le monde ?

 

 

Un pape venu d’Afrique. Ce ne serait pas une première (il y a déjà eu dans l'Antiquité les trois saints Victor 1er, Miltiade et Gélase 1er, d'origine berbère) mais un pape noir, si. À notre époque, ce serait peut-être un juste retour des choses. Et pour cause : c’est en Afrique qu’on recense environ 15% (environ 160 millions) du 1,2 milliard de catholiques dans le monde. Une communauté de fidèles qui va toujours croissant. Mieux, le pourcentage de catholiques – par rapport à d’autres religions - y est en constante progression. Bref, si elle n'est pas la première en terme de nombre de fidèles (l'Amérique latine en compte 42%, l'Europe 25%), l'Afrique constitue « la » terre d'avenir pour l'expansion de la religion catholique.

 

 

Alors sur le continent, deux noms sont sur toutes les lèvres pour la succession à Benoît XVI, qui a prévu de renoncer à son pontificat le 28 février : ceux du Ghanéen Peter Turkson et du Nigérian John Onaiyekan. On pourrait rajouter à la liste un autre Nigérian, Francis Arinze, dont le nom avait été évoqué en 2005 au moment de désigner un successeur à Jean-Paul II. Mais aujourd’hui son âge est un handicap : il est octogénaire.

 

 

Même si la probabilité est faible de voir un subsaharien devenir évêque de Rome, de nombreuses voix s’élèvent pour pousser en ce sens. « Je pense qu'avec la représentation de la communauté noire dans la grande communauté catholique, il est légitime qu'on en arrive à un pape noir », estime René Legré Hokou, président de la Ligue ivoirienne des droits de l'Homme.

 

 

Vitalité

 

 

« Un pape africain, ça pourrait donner plus de vitalité à l'Église catholique dans le monde noir, cela dénoterait du caractère universel de cette religion », ajoute-t-il. Au nombre des partisans pour un Africain au Saint Siège, on compte également l'économiste nigérian Pat Utomi. Cet ancien candidat à la présidentielle dans son pays et figure de la communauté catholique ne bouderait pas son plaisir de voir un fils du continent siéger au Vatican. Mais s’empresse-t-il de dire, « il faut mettre cela de côté ». Pour lui, l’essentiel est ailleurs.

 

« Je pense que ce qui compte, c'est que ce soit la bonne personne, avec une vision qui corresponde à l'époque », explique-t-il. Or selon lui, l'Afrique est représentative, à plusieurs niveaux, des problèmes auxquels l'Église catholique est confrontée.

 

« Jean-Paul II était une réponse à l'Union Soviétique », pense Utomi. « D'une certaine façon, le défi de l'Église est de réussir à trouver (...) un terrain d'entente avec l'islam et avec le mouvement pentecôtiste ». Car si le catholicisme est en expansion en Afrique, il est fortement concurrencé par les églises évangélistes. Les jugeant plus proches d’eux et répondant à leurs soucis quotidiens, de nombreux Africains y ont adhéré.

 

Les défis sont immenses. Aussi, dans des pays comme le Nigeria, partagé entre un nord majoritairement musulman et un sud à dominante chrétienne, les tensions ethniques et religieuses ont entraîné des accès de violence. L'archevêque d'Abuja John Onaiyekan, nommé cardinal en octobre, n'a d’ailleurs pas ménagé ses efforts pour rassembler les chrétiens et les musulmans de son pays.

 

 

Dirigeant habile

 

 

« Il nous faut un dirigeant habile - de la même façon que Jean Paul II a réussi à dialoguer avec l'église d'Orient, avec les orthodoxes de l'Est », ajoute Utomi. Les appels du pied des Africains feront-ils pencher le vote du Conclave romain en faveur d’un pape noir ? Rien n’est moins sûr. D’autant plus que les candidats africains ne seront pas seuls dans la course. Le futur pape pourrait aussi bien être originaire d'Amérique Latine ou d'Asie, relèvent déjà les observateurs.

 

Mais selon certains, un autre critère sera déterminant : l’âge. Benoît XVI pourrait prodiguer ses conseils pour que le choix d’un nouveau pape se porte sur une personnalité plus jeune. Car c’est à cause, entre autres, de son âge très avancé (85ans) que Benoît XVI a renoncé à sa mission.

 

 

Alors va-t-on vraiment assister à l’élection d’un pape noir ? Le scepticisme règne, malgré l'engagement du Vatican auprès du continent noir. « Je doute que nous ayons un pape africain », a déclaré le paroissien Zeb Renardo de l'église San Antonio da Polana, à Maputo, capitale du Mozambique, peu après l'annonce de Benoît XVI, ajoutant que « le moment n'est pas encore venu ».

 

 

Comme lui, d’autres se font une raison et se félicitent des progrès accomplis. Pendant son pontificat, Benoît XIV a foulé par deux fois la terre africaine. Au Bénin, en 2011, et en Angola et au Cameroun en 2009. Suffisant, aux yeux de l'archevêque de Lagos, Alfred Adewale Martins. « Je pense que nous devons remercier Dieu pour cet homme (...), pour la sollicitude dont il a fait preuve pour l'Église, en particulier en Afrique ».

 

À défaut d’un pape africain, un pape non européen serait-il une solution ? C’est l’avis qu’on en a dans le plus important sanctuaire chrétien d'Afrique, la basilique Notre-Dame de la Paix de Yamoussoukro, en Côte d'Ivoire, consacrée par Jean Paul II en 1990. « Le monde est actuellement multicolore », rappelle son recteur, le père polonais Stanislaw Skuza, qui conclut songeur : « pourquoi pas un prêtre non-occidental ? »

 

 

 

 

JeuneAfrique

Section: 
USA-AFRIQUE : Les nouveaux termes de l’échange
BABA AIDARA, JOURNALISTE : ‘’Wade avait obtenu le premier Compact, Macky le second, Diomaye…’’
CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES POUR LE DÉVELOPPEMENT : Le Sénégal Partage son Expérience en Financement Social
A Madrid : Un troisième sommet Afrique-Espagne pour continuer d'amplifier les échanges commerciaux
USA : Les Brics expriment leurs «sérieuses préoccupations» face aux droits de douane de Trump
AFGHANISTAN – UN RECORD DE 256 000 MIGRANTS REVENUS D’IRAN : L’OIM alerte sur une crise humanitaire et un grave déficit de financement
DONALD TRUMP CONVOQUE UN MINI-SOMMET AFRIQUE-USA À WASHINGTON : Enjeux minéraux, sécurité et diplomatie ciblée
ATTAQUES DU 1ER JUILLET : Bamako pointe des “sponsors étatiques” sans preuve  
MALI : Attaques jihadistes massives aux portes du Sénégal, une alerte ignorée ?
RÉPRESSION VIOLENTE AU TOGO : Trois jours de sang et de silence
L'AFRIQUE QUI BRULE ET CELLE QU'ON APAISE : Togo, Kenya, RDC-Rwanda, trois secousses, un même mépris
SONKO EN CHINE : Diplomatie active, accords concrets et nouvelle ère stratégique
CONFLIT IRAN-ISRAËL : Trêve fragile
CRISE NUCLÉAIRE : L’Ambassadeur d’Iran à Dakar interpelle la communauté internationale
RIPOSTE IRANIENNE CONTRE AL-UDEID : L'offensive de Téhéran bouleverse l’équilibre régional
ISRAËL-IRAN : Guerre préventive ou civilisationnelle ? 
EMPLOIS DANS LE MONDE EN 2025 : 53 millions seront créés, soit sept millions de moins que prévu
DIOMAYE PRESSENTI, BIO DÉSIGNÉ : Les coulisses d’un choix inattendu à la tête de la CEDEAO
YUVAL WAKS (AMBASSADEUR D’ISRAËL AU SÉNÉGAL) : ‘’S’il y a une réaction de l’État du Sénégal…’’
CRISE AU MOYEN-ORIENT ET ENVOLÉE DU BRUT : Le paradoxe pétrolier sénégalais