9 245 cas dont 1 206 portant sur des violences sexuelles
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Du début de l’année jusqu’au mois d’octobre, les 6 boutiques de droit de l’Association des juristes sénégalaises ont enregistré 9 245 cas de violences faites aux femmes et aux filles, dont 1 206 portant sur des violences sexuelles.
La violence faite à la femme constitue une forme de discrimination et une violation des droits fondamentaux de la personne humaine. A ce jour, plusieurs définitions sont couramment utilisées pour la définir, dans le contexte des violences basées sur le genre.
Cependant, dans le contexte sénégalais, il s’agit surtout de comportements individuels ou collectifs contre la femme ou la fille qui conduisent à une atteinte à son intégrité physique, notamment par des coups et blessures, véritables actes de négation de la dignité humaine. Lorsqu’ils ne sont pas mortels, ces comportements, traumatisants pour la victime, laissent des conséquences physiques et mentales graves.
Hier, lors de la cérémonie de lancement des 16 jours d’activisme, la présidente de l’Association des juristes sénégalaises (Ajs) est revenue sur les chiffres de ce fléau enregistrés dans les différentes boutiques de droit de sa structure implantées à la Médina, à Pikine, à Thiès, à Kaolack, à Ziguinchor et à Sédhiou durant les 10 premiers mois de 2019. De l’avis du commissaire Aby Diallo, elles ont enregistré, de janvier à octobre 2019, 9 245 cas de violences faites aux femmes et aux filles, dont 1 206 portant sur des violences sexuelles.
D’après elle, ces chiffres sont alarmants, si l’on sait que ce n’est que la partie visible de l’iceberg, parce que la dénonciation des violences contre les femmes n’est pas encore ancrée dans la culture sénégalaise. ‘’Quelles que soient leurs formes, les violences sont un frein pour le développement, parce qu’elles constituent des entraves à la pleine participation, au plein épanouissement, à l’éducation, à la réalisation de tout le potentiel des personnes qui les subissent. Elles sont, avant tout, une violation de leur droit à la sécurité, à la santé, à l’intégrité physique, à la pleine possession de leur corps, au bonheur, à la liberté d’aller et de venir, de procréer et surtout de ne pas subir les choix d’autrui.
Ainsi, ces formes de violence constituent, avant tout, des conduites antisociales sanctionnées par le droit pénal qui en précise les conditions d’incrimination et détermine des peines’’, a expliqué la commissaire.
Pour Aby Diallo, c’est dans cette logique que la loi n°99-05 du 29 janvier 1999 a apporté des sanctions et aggravé d’autres violences sexuelles. Qu’elles se déroulent dans la sphère publique ou dans le cadre familial, les agressions à caractère sexuel ont des conséquences désastreuses sur les victimes. ‘’Il s’agit de violences qui ne peuvent être tolérées. La plupart du temps, dans la sphère familiale, elles sont commises, de plus en plus, avec une atrocité inimaginable. C’est un acte de torture physique et mentale banalisée et dont la gravité est généralement minimisée. Il est donc indispensable de sensibiliser le public et de rappeler la nécessité de sanctionner cet acte criminel qui fait tant de victimes dans le monde. Les traumatismes qu’elles engendrent sont tragiques et méritent d’être traités avec la plus grande attention’’, a soutenu la présidente de l’Ajs.
L’infanticide, la 2e cause d’incarcération des femmes
En outre, elle a rappelé que les victimes d’inceste, étant dans le désarroi total, ont souvent recours à l’infanticide qui constitue, comme l’a révélé le dernier rapport du Haut-Commissariat aux Droits de l’homme, en partenariat avec l'Ajs, la 2e cause d’incarcération des femmes, avec un taux de 16 %. Beaucoup de condamnations sont prononcées avec, à la clé, des situations dramatiques de rejet par les familles. Leurs enfants ne sont pas épargnés, dans la mesure où ils seront sans identité complète parce que ne pouvant pas être déclarés par leur père.
‘’Ces enfants sont indexés et discriminés toute leur vie durant pour des fautes dont ils ne sont pas les auteurs. La problématique des violences faites aux femmes et aux filles est une question transversale autour de laquelle tout le monde est interpellé, afin d’apporter sa contribution en vue d’aboutir, un jour, à l’éradication de ces violences, notamment les violences sexuelles telles que le viol et l’inceste. Ces barbaries qui mettent en péril la sécurité des femmes et des filles, la cohésion sociale et installent la peur et la psychose partout, se passent, pour la plupart, dans la sphère familiale et sont commises, de plus en plus, avec une atrocité inimaginable’’, a ajouté Mme Diallo.
Cette dernière estime que la tolérance zéro doit être de mise, pour protéger les femmes et les filles d’une atteinte à leur intégrité physique et mentale au détriment de leur vie. A ce propos, l'Ajs interpelle toute la communauté et exhorte l'État, en tant que premier garant des droits humains, à urgemment renforcer la protection des femmes et des filles.
CHEIKH THIAM