Publié le 20 Nov 2012 - 04:20
PR SAÏD NOUROU DIOP, DIRECTEUR DU CENTRE ANTI-DIABÈTE ''MARC SANKALÉ''

''Il y a entre 2000 et 2500 nouveaux cas par an''

 

Le diabète est une maladie qui prend de l'ampleur au Sénégal alors que l'accessibilité au traitement pose problème. Avec la faible subvention de l’État, beaucoup de malades sont prises en charge par le centre Marc Sankalé. Le professeur Seydou Nourou Diop a bien voulu en parler avec EnQuête.

 

Qu'est-ce qui cause le diabète ?

 

Le diabète est d'abord en grande partie une maladie héréditaire. En fait, il n’y pas un diabète mais plusieurs diabètes. Celui qui est le plus fréquent est appelé le diabète de type 2 et il a une composante héréditaire. Habituellement, quand on l'a, c'est parce que dans la génération d'avant, certainement, chez le père ou chez la mère ou le grand parent, le diabète existait même si on ne le savait pas. Bien sûr, il y a à côté de cet aspect héréditaire, ce qu'on appelle les facteurs de hauts risques qui sont les sujets obèses, les sujets qui sont hypertendus. Il y a aussi des facteurs qui, lorsqu'ils apparaissent chez certaines femmes, il faut faire de la prévention parce qu'elles risquent de devenir diabétique. Ce sont des stigmates qui permettent de dire que ces femmes, certainement, avaient déjà un diabète mais que celui-ci n’était pas encore révélé. Ce sont des femmes qui accouchent de gros enfants de plus de 4 kg et des femmes qui font des avortements répétés (...).

 

Est-ce que le traitement du diabète est accessible au Sénégal ?

 

Il y a effectivement un problème d'accessibilité. Fort heureusement pour le type de diabète malheureusement le moins fréquent qui est le diabète de type 1, l’État du Sénégal, depuis 2003, a mis en place une subvention annuelle de plus de 300 millions de francs pour amoindrir le coût de l'insuline. C'est ce qui fait qu’aujourd'hui, le diabétique qui se rend en pharmacie doit être conscient qu'il paye entre 40 et 45% du coût de l'insuline, le reste étant supporté par l’État . L'insulinase n'est pas pour le moment gratuit, de même pour les autres médicaments pour le groupe le plus important constitué des diabétiques de type 2 qui doivent prendre des comprimés. Ces comprimés ne sont pas encore subventionnés. Les diabétiques de type 2, leur traitement peut facilement atteindre chaque mois 75 000 à 100 000 F, compte non tenu du régime alimentaire auquel ils sont soumis. Il est important aujourd'hui que la prise en charge du diabète soit financée pour que les populations puissent se traiter correctement. Donc nous continuons, avec l'association des diabétiques, de nous battre pour que ce traitement soit adapté et soit accessible à toutes les populations diabétiques.

 

Et quelles sont les difficultés rencontrées dans la prise en charge des malades ?

 

Il y a l’acquitté à la consultation de l’accès aux examens biologiques. Parce que le diabète aussi, c'est une question de surveillance biologique. Le médecin doit faire faire à son malade régulièrement au moins trois ou quatre fois par an un certain nombre d'analyses qui peuvent coûter excessivement cher. Par exemple, le diabétique doit au moins, une ou deux fois par an, faire une analyse qui permet de montrer le niveau d'évolution du diabète qu'on appelle le dosage de l'hémoglobine glyquée. Ce dosage doit être fait deux ou trois fois par an et rien que ce dosage dans les structures publiques coûte entre 8 000 et 12 000 Cfa. Alors que dans le privé, cela peut aller jusqu'à 20 000 F...

 

A quelle vitesse le nombre de malades augmente-t-il au Sénégal ?

 

C'est très difficile de le savoir. Mais ce qu'on peut dire, c’est que si on compare les années 80 aux années 2000 : au début des années 80, le nombre de malades que nous prenions en charge au niveau du Centre Marc Sankalé avoisinait à peu près 200 nouveaux cas tous les ans ; depuis l'an 2000, nous ne prenons pas en charge moins de de 2000 à 2500 nouveaux cas tous les ans. Aujourd'hui, nous en sommes à plus de 36 000 cas rien qu'au niveau du centre Marc Sankalé.

 

Quelle est la tranche d'âge la plus touchée ?

 

Il y a ce qu'on appelle le diabète de type 1 qui atteint essentiellement des sujets jeunes qui ont moins de 25-30 ans, qui est le moins fréquent car c'est 10% de la population des diabétiques. Il y a le diabète de type 2 qui atteint surtout les gens à partir de 40 ans et plus qui occupe 90% de la maladie. Donc c'est surtout les adultes qui posent le plus de problème.

 

Parfois l'amputation d'un membre du corps du malade lui crée des problèmes psychologiques et ce dernier finit par mourir. Qu'est-ce qui explique cela ?

 

Écoutez! D'abord notre rôle, c'est de prévenir. C'est pour cela que l'éducation dont je parlais tout à l'heure est importante pour prévenir justement l’amputation du diabète, parce que si on enlève la jambe à un diabétique, cela veut dire qu'il y a eu une complication, soit au niveau de ses vaisseaux sanguins, soit au niveau de ses nerfs, soit par une infection. Tout ceci peut être prévenu par le dépistage précoce de la maladie et une bonne prise en charge de base. Pourquoi ces malades meurent ? C'est d'abord un problème psychologique dans un premier temps. Ce n'est pas facile pour quelqu'un qui est entier de perdre un de ses membres et beaucoup de malades ne le supportent pas. Mais l'autre élément, c'est que le même phénomène qui explique qu'on ait coupé la jambe malheureusement, c'est un phénomène qui va toucher le cœur ou qui va toucher le cerveau.

 

 

Viviane DIATTA

 

 

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