Ratzinger avait tout prévu en choisissant le nom de Benoît
D'ici une quinzaine de jours, Benoît XVI ne sera plus pape. Il a rendu publique le 11 février sa volonté de démissionner. Une décision rare, critiquée par certains, mais peut-être prédestinée par le nom papal qu'il s'était choisi, Benoît. Car les croustillantes anecdotes se trouvent aussi dans l'histoire religieuse.
Les papes sont comme les monarques britanniques. Leur intronisation et leur disparition ont ceci d’universel que ce sont des événements qui balisent nos agendas. Qu’on soit papiste ou parpaillot. Monarchiste ou allergique aux couronnes.
S’agissant de Benoit XVI, c’est son abdication qui marquera les esprits. Ce "Non possumus" (Nous ne pouvons pas) si parfaitement synchronisée avec l’obsolescence de l’Europe. Même vieillissement. Même renoncement. Même éviction de l’espoir. Ce pape qui fut longtemps gardien de dogme dans l’équipe vaticane n’aura rien pu faire contre la déchristianisation du vieux continent. Rien su faire contre l’appétit des clans pourpres de la Curie romaine.
Benoît de Nursie, Joseph Ratzinger et l'exfiltration
A croire que Ratzinger avait tout prévu en se choisissant le nom de Benoît, celui de Nursie, fondateur de la règle bénédictine. Lui aussi un fin lettré. Lui aussi hanté par "l’abîme des vices". Mais à peine est-il nommé abbé, vers 510, que ses frères moines tentent de l’empoisonner en mixant des herbes assassines au vin du calice. Benoît s’éclipsera dans une grotte. L'ermite rebâtit un embryon de monastère, mais c’est de justesse qu’il échappe au poison injecté dans... du pain béni.
C’est donc sur le tard, sept ans avant sa mort, qu’il se réfugie au Mont Cassin et écrit la règle "Ora et labora" (Prie et travaille) qui fut, trois siècles plus tard, la devise du puissant mouvement monastique. Ratzinger, trahi par ses forces et par ses proches, déjugé jusqu’à l’humiliation lors de sa réforme ratée de la Banque vaticane, a lui aussi choisi l’exfiltration. Une retraite cénobitique dans les murs du St Siège.
"Jean-Paul II, lui, avait compris que l’on ne descend pas de la croix", rétorque sèchement le secrétaire de Woytila. Est-il si sûr que Pierre, le premier des évêques de Rome, aurait agi autrement s’il en avait eu le choix ?
NouvelObs