Publié le 10 Jun 2015 - 18:36
DEMOLITIONS DE 400 MAISONS A LA CITE TOBAGO

Les propriétaires crient leur désarroi

 

L’opération de démolition de maisons à la cité Tobago s’est poursuivie hier avec un dispositif plus important de bulldozers et de policiers. Les propriétaires crient leur indignation et évaluent le  préjudice entre 6 et 7 milliards.

 

Lorsque Médoune Seck vendait ses parcelles à Mbour pour s’acheter un terrain à la cité Tobago et y construire sa maison, il était loin d’imaginer qu’un jour, il aurait la visite indésirable et surprise de bulldozers. C’est pourtant ce qui a eu lieu. Hier encore (le premier passage c’était jeudi), le gouverneur de Dakar Mouhamed Fall s’est rendu sur les lieux tôt le matin sous une forte escorte policière et avec un effectif plus fourni de ces engins destructeurs. Médoune Seck le porte-parole du collectif des propriétaires de maisons affirme qu’il s’agit d’une dizaine de bulldozers.

Sur les lieux, tout est verrouillé par un dispositif sécuritaire. Impossible donc d’avoir accès à la cité Tobago. Toutes les issues sont bloquées. Un homme en t-shirt noir sur le lequel il est écrit ‘’sécurité’’ fait savoir qu’il n’est pas possible d’aller plus loin que là où il s’est planté. ‘’On m’a demandé de ne laisser personne passer. Je ne peux, par conséquent, vous laisser entrer’’. Un homme qui a le même t-shirt que lui et qui ressemble à son chef lui fait signe de la main de ne laisser personne passer. De loin, l’on aperçoit un bulldozer s’acharner sur une maison sous la supervision de deux personnes. On cherche alors un autre point d’accès. Mais là, on bute sur les forces de sécurité. ‘’Aujourd’hui, il n’y a pas accès. C’est interdit à tout le monde’’, explique calmement un policier droit dans ses bottes. Ici, On ne peut même pas entendre le bruit des moteurs.

A quelques pas de là, Médoune Seck exprime son indignation. ‘’Jeudi dernier, le gouverneur nous avait dit qu’il ne travaillait pas le vendredi, mais qu’il allait revenir le lundi et mardi. Je viens de le rencontrer mais il jubile. Il est très content de détruire nos maisons’’, s’insurge-t-il. Si l’on en croit M. Seck, des propriétaires de maisons sont chez eux et ont décidé de fermer leurs portes pour ainsi se faire broyer à l’intérieur. ‘’Ils disent que c’est tout ce qui leur reste. Ils ont investi tout ce qu’ils ont dans la construction de leur maison. Ils préfèrent donc mourir plutôt que de sortir’’, fait-il savoir. Ce qui ajoute à l’indignation des propriétaires, poursuit-il, c’est que la démolition a eu lieu sans sommation et jusqu’ici, ils ne trouvent pas d’interlocuteur. Sauf le directeur de cabinet du Premier ministre. ‘’Il n’a pris aucune décision et on le comprend. Tout ce qu’il peut faire, c’est de remonter l’information. Et nous, nous n’avons pas de feedback’’.

Eau, électricité et Adsl

Pour l’instant, le collectif a engagé Me El hadji Diouf comme avocat. Mais ses membres préfèrent le dialogue à une action judiciaire. On leur avait promis l’arrêt des destructions, mais celles-ci ont repris de plus belle. Désespéré, notre interlocuteur estime que, ‘’humainement’’, il n’y a que le président de la République Macky Sall qui peut intervenir. Un courrier lui a été adressé avant-hier (Ndlr dimanche 7 juin 2015). ‘’Tout ce que nous demandons, c’est qu’on nous invite à la table de discussion, qu’on nous donne au moins la parole’’. Certes, M. Seck a entendu parler de la destruction du mur de l’aéroport comme argument. Il n’y croit pas cependant. Il trouve même que c’est un argument qui n’a pas de sens. ‘’Quand on détruisait et reconstruisait le mur, ceux qui le faisaient portaient les badges de l’Ads. L’eau et le ciment venaient de l’aéroport. Il y avait aussi des sapeurs. Est-ce que nous pouvons avoir cela, si nous sommes dans l’illégalité comme on le dit. Est-ce que nous avons accès à l’aéroport pour prendre de l’eau et du ciment’’, s’interroge-t-il.  

Il rappelle que les maisons sont connectées aux réseaux de la Senelec et de la Sde. Il y a également l’Adsl. Il ne comprend pas alors que des maisons construites dans l’illégalité puissent bénéficier en plus de ses services proposés par des entreprises publiques de surcroît. Aux dires de Médoune Seck, il s’agit en tout de 400 maisons évaluées entre 6 et 7 milliards de FCFA.

BABACAR WILLANE

 

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